15 | Nouna

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— Il est tombé tête la première dans le fumier et plus jamais il n'a foutu un pied chez Ed, conclus-je mon histoire.

Takashi éclata de rire, échafaudant déjà des blagues à lancer à Adamo la prochaine fois qu'il le verrait. Ce dernier le méritait bien, à toujours rire de tout et de rien.

Les restes de notre repas reposaient devant nous et mon assiette brillait de propreté tant je n'avais voulu gâcher aucune miette de cette délicieuse victuaille.

Comme la dernière fois, Takashi m'avait certifié que ce n'était pas grand-chose et malheureusement, je ne pouvais pas aller contre lui ; je connaissais le contenu de mon propre frigo. D'où le génie de ce repas. Quand ce n'était pas sandwich ou autre préparation rapide, j'optai pour livraison à domicile et à partir de là, je ne faisais pas trop ma difficile.

Depuis la mort de Ian et de manière générale, Takashi représentait la première personne avec qui je partageais un repas. Je me faisais à sa présence. À son ombre sur mon canapé et à ses récriminations contre un pauvre ressort de pacotille. Comme quoi, on s'habituait à tout. Surtout à une présence dans votre vie.

Qu'il soit le Koning ou non ne changeait rien à ça. J'appréciai qu'il soit, même pour attendre une foutue réponse qui impacterait le reste de ma vie. Mais il ne faisait pas mine d'en reparler. Pas pour le moment en tout cas. Il parvenait, je ne sais trop comment, à séparer son rôle de sa personne. Ou alors il était comme ça de base et ça risquait de faire de lui un Koning très intéressant. Et aussi casse-couilles que je pouvais l'être.

— Tu es entourée de sacrés phénomènes.

— On s'y fait assez vite, répondis-je. Et finalement, je ne suis que rarement à la clinique.

J'avalai les kilomètres, ma vieille voiture tenant la distance je ne sais trop comment. Ici, nous n'étions pas trop nouvelles technologies, ce qui ne manquait pas dans le reste du pays.

Ainsi, il était dorénavant possible de franchir une grande distance en un temps tout relatif. La pointe de la technologie, tout en privilégiant l'environnement, une cause qui tenait à cœur à la fois au Kaizer et au Premier ministre.

Je suivais ça d'une oreille distraite, essayant tout de même de rester un peu à la page. Histoire de ne pas paraître pour une cul-terreuse. Bien que Perth ne soit pas le bout du monde d'ici, je n'y allais jamais, pas plus que les autres habitants. Une sorte de démarcation invisible nous tenait éloignés des grandes villes. Je préférai mon trou paumé avec mes vaches et mes champs. Un choix de vie comme un autre, mais lorsque vous étiez Terras, les jeux étaient faits dès le départ. Je généralisai peut-être. Durant mon périple en Australie ; une Terra perdue parmi un monde trop vaste, j'avais rencontré des réhabilités. C'est ainsi qu'on les appelait. Et ils s'en sortaient foutrement bien, que ce soit à la capitale ou ailleurs. Intégré dans le système, presque des lycans nés de l'Empereur.

— Un dessert ? proposai-je alors.

— Parce que tu as eu le temps de préparer quelque chose pendant que tu me regardais cuisiner, peut-être ?

Le petit coquin. Ses pupilles brillèrent, pleines de moquerie à peine dissimulée.

— Trop malin, Koning. Vraiment.

Je me levai et attrapai un gros pot de glace dans le congélateur. Je pris deux cuillères au passage et revins m'installer.

— Tu manges vraiment très mal, Nouna.

Il tenta le ton mode sermon, mais ne réussit pas vraiment. J'éclatai de rire. Ce fut plus fort que moi.

Ce type possédait tout un tas de mimiques trop mignonnes pour un mec censé diriger un territoire. Mais ça ne voulait pas dire qu'il ne fallait pas se méfier ou le craindre. Il devait être foutrement bon pour avoir été choisi par l'Empereur pour occuper pareille position.

LES MAINS DE POUVOIR Tome 2 Fragmented Désire [Terminée]Where stories live. Discover now