CHAPITRE 19

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Je déposais mon sac sur le palier en enfilant mes chaussures. Depuis ce matin, la pluie ne faisait que tomber. De plus, je venais de passer une effroyable nuit. J'avais vécu, en boucle, la condamnation de Dan. Je revis sa décapitation, le sang couler sur le sol, sur les vêtements de Egdar. Les cris des étudiants résonnaient dans ma tête, comme une chanson qui ne voulait jamais s'arrêter.

Je rehaussais ma queue-de-cheval et descendis les marches. Le sweat de l'Armée me protégeait de la pluie. Lorsque je poussais les grandes portes métalliques, je me retrouvais face à Egdar. Quelques mèches humides dépassaient de sa capuche. Il me souriait.

Amira n'avait pas eu le temps de venir me chercher ce matin.

— Bonjour Meï, je m'excuse de me retrouver à la place de votre amie. Amira m'a supplié de venir vous chercher. Vous allez bien ?

— J'ai passé une mauvaise nuit, répondis-je, avec un mal de ventre. Le Tribunal m'a retourné la tête.

Nous marchions jusqu'à rejoindre la gare. Sur notre chemin, je lui racontais mon sommeil et tous les mauvais cauchemars de la veille. Il écouta puis il semblait attentif puisqu'il me posa quelques questions. Egdar me demanda depuis combien de temps je vomissais. Je n'arrivais pas à lui donner une réponse correcte puisque moi-même je ne savais pas quand est-ce que tout cela avait commencé.

Il marchait devant moi, à quelques centimètres l'un de l'autre. Son bras longeait son corps. Sa main bandée faisait des gestes aléatoires jusqu'à empoigner le manche de son sabre.

— Nous sommes en retard, dit-il. Dépêchons-nous.

Avec sa main, il attrapa mon avant-bras pour suivre ses pas. Mon professeur me traîna sous la pluie et ne faisait pas attention à moi. Les bandes blanches semblaient être rugueuses puisque je sentais une sensation désagréable sous mon sweat – je ne portais rien en dessous.

L'homme s'arrêta sur le côté gauche de l'entrée de la gare, à côté de petits commerçant qui installaient laborieusement leurs stands. La pluie pliait la bâche à cause du poids de l'eau – les marchandises attendaient dans le camion.

Il lâcha son étreinte lorsque le visage d'Elane apparut sous la tempête. Elle était vêtue d'un long imperméable transparent où l'on pouvait observer sa magnifique robe blanche, couverte de dentelles et de plumes beiges.

Elle embrassa les joues de mon chef avant de me saluer à mon tour. Derrière elle, je reconnus Jake et Peter, croisant les bras sous un abri, créé par le toit d'une maison. Ju, quant à elle, dansait sous la pluie. Son parapluie multicolore transcendait le ciel et apportait de la joie. L'eau plaquait ses boucles rousses.

Amira arriva, suivit par quelques soldats. Elle avait pris un parapluie et portait de longues bottes brunes qui lui remontaient jusqu'aux cuisses.

— Je te remercie, dit-elle en saluant Egdar. J'ai eu un imprévu avec mes frères.

D'autres personnes nous rejoignirent sur la place, attendant le train. Ils ne s'agissaient pas de l'Armée mais de ceux, travaillant dans le Centre ou ailleurs.

Un homme, vêtu d'un costume bleu marine et d'un béret, sortit des escaliers pour annoncer l'arrivée eu train.

Nous faisions la queue afin qu'il puisse valider nos tickets. Derrière le chef de l'Armée Noire, nous descendions l'escalier pour rejoindre le train. Les membres du Conseil partirent à l'opposé du premier wagon. Les autres suivaient Egdar – il ouvrit la porte et nous le suivions, pas à pas, jusqu'à prendre nos places.

Les sièges verts donnaient un air triste au train. Les rideaux rouges ne permettaient pas de faire passer la lumière grâce à leur épaisseur – les lanternes présentes au côté des fenêtres gaspillaient de l'énergie.

Le Prince Immortel (TOME 1)Where stories live. Discover now