p.5 › déclaration(s).

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Respire.

À cet instant, une bulle se crée. Elle perce la surface, englobant mon souffle d'un dôme d'eau à peine palpable. Rien que capturée, cette image est sublime : l'eau paraît comme pétrifiée, figée dans son instant.

Bloque.

Fébrile, mon corps épouse la courbe des vagues. Et tendus par l'envie de les refouler, les muscles se délient, se contractent. Je ne fais plus qu'un avec le courant, je m'en imprègne, mais je résiste. Repousser les avances de ce flot entraînant, d'une poussée de bras, longer son ventre, glisser au-dessous. J'aime le fait d'être ainsi coupé du monde, plongé sous la terre. L'eau est une femme que l'on s'efforce d'écarter sous peine de perdre pied. Elle peut faire peur, mais moi, je la connais par cœur.

Relâche.

Mon thorax s'enflamme alors. Au contact de l'air sur mes lèvres, j'ouvre les yeux. Le monde ne tangue pas : j'ai depuis longtemps appris à calmer mon cœur.

Autour de moi les flotteurs m'empêchent de suivre la progression des autres nageurs, éparpillés sur les neuf couloirs restant. Je lève la tête et admire la lumière orangée qui vient caresser les verrières du plafond, le temps de souffler. À quelques mètres de là, Barett le coach des Pinks chronomètre la nouvelle recrue. Un certain Cesar, d'après ce que j'ai compris. Cela doit être son premier entraînement étant donné l'attention qui lui est portée.

« Hé, Ky ! lance une voix sur ma droite.

Arraché à mes contemplations, je pivote sur moi-même et observe le corps gracieux d'Anastasia Ollister glisser à mes côtés. Elle me sourit, l'air sûre d'elle, et m'adresse une œillade enjouée.

— Oh salut Ana, je lui réponds en retirant mes lunettes.

— Tu sais que j'attends toujours mon duel de papillon, Malabar ? » glisse-t-elle avec un rire.

Anastasia Ollister. Un sacré bout de femme celle-là. Sœur de la célèbre Brooke Ollister, finaliste et gagnante du tournoi d'Ohio de l'année précédente, c'est désormais à elle de prendre la relève. Sa morphologie pulpeuse ayant toujours fait l'objet de railleries auprès de ses adversaires, elle est réputée pour y avoir toujours tenu tête et s'est classée favorite de Blurdale il y a peu.

Elle arbore un corps fort, des muscles développés, ainsi qu'un visage tout en rondeur fait de pommettes rebondies et d'une ravissante bouche en cœur : tout ce à quoi un mec ne peut pas résister – du moins un mec comme moi.

« Je ne voudrais pas te décourager pour les six mois à venir, vois-tu.

— Oui, oui bien sûr, prends-moi pour une fillette. Et ton maillot, on en reparle ?

Machinalement, nos deux regards percent la surface de l'eau. Je pourrais m'arrêter et prendre le temps de vous expliquer le pourquoi du comment de l'imprimé "éléphant" que je porte en ce moment, mais cela ferait une bien trop longue histoire.

— Je suis fair-play au niveau des paris perdus, c'est déjà ça, je réplique tandis qu'elle s'humecte les lèvres pour ne pas rire.

S'ensuit un silence gênant. Elle tripote le bord du mur, je me mordille l'intérieur des joues. Mais alors qu'elle s'apprête à ajouter quelque chose, le sifflet du coach retentit dans toute la salle, répercuté par l'architecture concave du lieu.

— Les requins ! Fini pour aujourd'hui ! C'est à nos dames de s'entraîner, lance Barett en fouettant le sol de ses claquettes en caoutchouc. 

— On se voit plus tard. » murmure Ana dans un clin d'œil.

stratosphère.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant