Chapitre 29

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Elles parcoururent le trottoir lentement, Grace sentait ses jambes devenir lourdes. Elle ramena son café à ses lèvres en fixant les passant, s'imaginant le voir surgir de nulle part et la serrer dans ses bras.
— Que se passe-t-il Grace ? Je sens que quelque chose ne va pas ? Tes cauchemars sont revenus ?
Elle ferma brièvement les yeux.
— Non ils ne sont pas revenus maman c'est juste un peu de fatigue.
— Si quelqu'un ta refait du mal il faut me le dire Grace ! Gronda sa mère en l'obligeant à s'arrêter.
Grace secoua de la tête rapidement.
— Personne maman tu m'entends ? Crois-tu sincèrement que Savana m'aurait laissée de cacher quelque chose ?
Elle soupira, vaincue, elles se remirent à marcher, Grace s'était mise à lui parler de tout et de rien. Alors que son esprit était perdu, son cœur tapait dans ses tempes. Elle avait l'impression que la honte était peinte sur son visage.
Au bout d'une heure de marche, sa mère n'était pas remontée à l'appartement. Elles s'étaient quittées en bas de l'immeuble. Grace l'observa partir en la remerciant intérieurement de lui avoir changé ne serait-ce qu'une heure les idées. Car au moment où elle se retrouva seule. L'angoisse, la douleur et la peur l'avaient de nouveau submergé.
Elle baissa les yeux sur le trottoir, les bras croisés puis quand elle les releva, un homme l'interpella. Posté sur le trottoir d'en face, il regardait dans sa direction, le regard dissimulé derrière des lunettes de soleil. Elle s'avança pour le dévisager, il était grand, sa peau était aussi noire que la couleur de son café. Il avait les mains dans le dos, le menton levé.
Grace descendit du trottoir, regarda sur sa droite et sur sa gauche avant de traverser. Mais quand elle fut sur le point de s'engager, elle se stoppa.
Il avait disparu.
Elle remonta sur le trottoir et poussa la porte de l'immeuble pour pénétrer à l'intérieur. Était-elle paranoïaque ? Ou l'homme avait réellement son regard braqué sur elle ?
Grace remonta les marches à toute vitesse.
Allait-elle enfin pouvoir faire éclater son chagrin ? Cette douleur immense qui l'empêchait de respirer ?
Le lendemain, c'est comme un automate qu'elle enfila ses collants de danse. Ses yeux étaient rouges, brûlants, elle avait pleuré une bonne partie de la nuit, sans pouvoir s'arrêter.
Elle avait coupé son téléphone, elle ne voulait plus le regarder, attendre, dans l'espoir qu'il s'allume...
— Grace ?
Elle releva la tête vers Savana.
— Oui ?
— Tiens c'est pour toi...
Grace prit le téléphone qu'elle lui tendait.
— C'est un téléphone que je gardais en secours, il te serra utile, comme ça je pourrai te joindre.
Grace appuya sur le bouton et vit en fond d'écran, Savana et elle souriantes, heureuses...
— Merci...
— Tu es sûre que tu veux travailler ? Tu n'es pas obligée tu sais.
— Je préfère, je ne veux pas rester ici à me morfondre.
Savana poussa un soupir.
— Très bien, mais si ça ne va pas tu rentres d'accord ?
Grace attrapa son sac.
— Oui, promis.
Elle quitta l'appartement sans se retourner. Elle avait besoin de sortir, se changer les idées, ne plus penser.
Mais hélas, elle donna le cours le plus difficile de sa vie. Il lui manquait tellement qu'elle n'arrivait plus à faire le moindre mouvement.
— Mademoiselle Lynnshe ?
Quand les petites étaient parties, l'infirmière entra dans la salle et lui demanda de la suivre de la main.
— Que se passe-t-il ?
Elle soupira.
— Le nouveau directeur passe le personnel au peigne fin c'est à ton tour.
Elle s'arrêta près du secrétariat et lui adressa toute sa compassion.
— Bonne chance Grace !
Grace prit une bouffée d'air et cogna à la porte du bureau.
— Entrez...
Elle pénétra dans le bureau et referma soigneusement la porte.
Il se leva.
— Mademoiselle Lynnshe ? C'est ça ?
— Oui c'est ça.
— Enchanté je suis Alexandre Doclan le nouveau directeur.
Elle vit dans son regard quelque chose de bizarre, sa main se resserra gentiment contre la sienne. Elle la récupéra rapidement.
— Pourquoi je suis ici ?
— Oh un examen de routine.
Son regard insista sur son corps, il était penché en avant, les mains sur son bureau, lui adressant un sourire en coin.
— Depuis quand travaillez-vous ici ? Dit-il enfin en se laissant tomber sur son fauteuil.
L'espace se resserra autour d'elle, il avait tout, sauf une attitude de travail.
— Presque un an à peu près.
Il ne dit rien, il se contenta d'avoir un hochement de tête.
— Vous voulez bien monter sur la balance.
Grace le dévisagea, presque révulsée.
— Quoi ?
Il se leva.
— J'ai besoin de voir votre poids.
— Et on peut savoir pourquoi ? Jusque-là personne ne nous a demandé de faire ça ?
— Et bien ça vient de changer mademoiselle Lynnshe.
Grace préféra obtempérer pour sortir de ce bureau étroit au plus vite.
Elle monta sur la balance, les bras le long du corps.
— 54 kg hum ?
Grace releva les yeux, incrédule.
— Oui et alors ? Qu'est-ce que j'ai ? Vous n'allez pas me dire que..
— Vous êtes grosse ? Et bien j'en ai peur.
Elle serra les dents et descendit de la balance.
— C'est une école de danse classique ici mademoiselle Lynnshe pas un club de salsa entre amis.
Grace le foudroya du regard sans répondre.

Elle se recula quand ilfit un pas vers elle.
— Pour être respectée, il faut respecter votre corpsmademoiselle Lynnshe. Déclara-t-il en continuant d'avancer.
Grace croisa les bras contre sa poitrine.
Sa main se posa sur son épaule, elle réprima un mouvement de recul et relevales yeux vers lui, le cœur battant.
— Qu'est-ce que veut votre corps ?
Sa voix était hors contexte, il se mit à la scruter les yeux baissés sur sonjustaucorps.
Un goût amer lui monta à la gorge. Elle se dégagea violemment et sortit dubureau en laissant la porte ouverte.
Elle se réfugia dans les vestiaires une main sur la bouche.
— Toi aussi tu es trop grosse ?
Émilie Clarks l'élève parfaite, au corps aussi raide qu'un bâton,vint s'asseoir à côté d'elle.
— Tu sais, tu n'es pas la seule à avoir eu cette remarque.
— Vraiment ? Dit-elle d'un ton irrité.
Elle sourit, un sourcil constamment levé.
— Tu sais, ce n'est pas difficile de perdre deux ou trois kilos enquelques jours. Expliqua-t-elle fièrement.
Grace préféra ne pas répondre. Son cœur était meurtri, sa peine pouvait selire sur le bout de ses lèvres tremblantes. Le nouveau directeur venait delui faire des avances dégoûtantes.
Son monde s'effondrait littéralement.
— Je t'ai vu danser l'autre jour, tu es douée.
Sa voix cristallisée la fit revenir à son triste monde.
Elle s'en moquait de bien danser, elle voulait juste garder son emploi.
Émilie Clarks fouilla dans son sac et lui montra une boîte blanche.
— C'est ce que je prends chaque jour, ça fait desmiracles. Lança-t-elle fièrement.
Grace dévisagea la boite de pilule, le front plissé.
— Qu'est-ce que c'est ?
— C'est pour maigrir, j'ai perdu trois kilos en moins d'une semaine avecça.
Elle lui donna un léger coup d'épaule.
— Tiens, je te la donne si tu veux, j'en ai pleins d'autres de toutefaçon.
Elle lui posa sur les genoux et quitta le vestiaire.
Grace baissa la tête, et serra ses genoux en regardant la boite. Leslarmes lui montèrent, elle la prit et la serra dans sa main.
Elle se leva et quitta le vestiaire en essuyant ses larmes.

Un troublant milliardaireWhere stories live. Discover now