Hurleblast - Tome 1 : Le pouvoir des Meidhir

Chapitre 15

Leeroy avait conduit Darius jusque dans sa cabine, et ce dernier grommelait à chaque fois que le capitaine du navire tentait de lui venir en aide.

Lorsque Leeroy eut un geste malheureux en tentant de le border lorsqu'il fut allongé sur sa couche, le chef de garde se fit violence.

— Je ne suis pas un enfant !

— Il n'y a pas besoin d'être en bas âge pour apprécier un peu d'aide.

Darius grogna à nouveau plus qu'il ne parla et réajusta sa couverture dans un geste machinal.

Leeroy l'observa un instant. Il s'était passé beaucoup de choses ces derniers temps. Il avait l'impression que les évènements dramatiques s'étaient enchainés en lui laissant peu de répit. En se remémorant leurs mésaventures et en contemplant le corps partiellement dénudé du chef de garde, il se souvint avoir gouté fugacement à ses lèvres.

La plupart du temps, Darius était en amure, une cuirasse composée de métal, mais surtout d'un cuir souple qui n'entravait pas ses mouvements. Sa peau était hâlée, plus encore qu'au début de leur voyage. Le soleil des hautes mers avait harmonieusement tanné sa peau. Ses cheveux noirs étaient dispersés sur le drap blanc. Il avait la main négligemment posée sur sa nuque, mais son regard fuyant laissait supposer qu'il se savait observé.

— Notre équipage est à présent réduit de moitié. Est-ce que cela est suffisant pour les réparations et la suite du voyage ?

Leeroy avait parlé plus pour détendre Darius que pour récolter de réelles informations. Non pas qu'il se moquait de leur voyage et de leur embarcation, mais une autre question lui brûlait les lèvres.

— Nous devrons redoubler d'efforts, mais je pense que nous pourrons arriver à notre prochaine escale. Nous ne sommes plus très loin. Là, nous terminerons les travaux de réparation et nous pourrons par la même occasion engager de nouveaux marins.

Leeroy acquiesça machinalement, écoutant à peine la réponse.

— Concernant ce qu'il s'est passé dans la geôle...

— Nul besoin d'en parler.

Il s'en était douté. Darius n'avait aucune envie de parler de ce fâcheux geste.

— J'aimerais simplement que les choses soient un peu plus claires...

— Tout est très clair, interrompit une nouvelle fois le chef de garde. La situation était telle qu'une réaction incongrue peut malencontreusement survenir.

Leeroy aurait aimé rire du choix de chacun des mots de Darius s'il ne s'était pas senti blessé.

—Je ne me souviens pas de ce baiser en de si mauvais termes.

Cette fois-ci, Darius planta son regard dans le sien. Il avait osé mettre un mot à ce qu'il était arrivé. Il y avait eu un baiser, un baiser que Leeroy ne voulait pas regretter.

— À vrai dire, j'ai même apprécié ce moment avant de réaliser...

— Avant de réaliser ta terrible erreur ?

— Avant de réaliser que j'étais sans doute le seul à vouloir qu'un tel baiser ait lieu.

Leeroy avait déjà été repoussé plusieurs fois au cours de sa courte vie. Il avait déjà embrassé par jeu, pour séduire, pour tromper, pour duper. Néanmoins, il ne s'était jamais retrouvé aussi blessé par un rejet. Il n'avait jamais été très soucieux de parvenir à créer un quelconque lien via un échange de baiser. Il mit cela sur le compte de la promiscuité à bord du navire, mais il ne pouvait ignorer les pincements au cœur que provoquait en lui le chef de garde, et ce n'était pas dans sa nature d'occulter le moindre sentiment.