Insomnies

Chapitre 49 (1)

04/03/2018 à 08:13

     Les deux adolescents dorment encore à poings fermés, sans se douter de l'entrée de l'homme dans l'appartement. Celui-ci découvre avec surprise le salon dans un piètre état, des cartons de pizzas ainsi que des cannettes de jus jonchent le sol. Il se demande ce qui a bien pu se passer dans cette maison. Il décide de se rendre dans la chambre de Yann. Il hésite à frapper, puis finit par entrer comme ça pour conserver l'effet de surprise. Mais c'est lui qui est surpris en découvrant Yann avec cette fille enroulée autour de lui. Qu'est-ce que tout cela signifiait ?

     — Yann, aboie-il.

     Les adolescents endormis s'éveillent en sursaut. Lilas, sous le choc, se retrouve par terre. Yann découvre avec stupéfaction qui se tient devant eux. Ce n'est autre que son père. Il ne sait pas s'il doit se réjouir, pleurer et se jeter dans ses bras ou simplement lui dire bonjour, comme s'il saluait un simple inconnu. Parce que cet homme est, en effet un inconnu pour lui. Il ne se souvient même plus de ce qu'il a pu vivre avec lui. Lilas s'approche de Yann sous le regard noir de son père.

     — Qu'est-ce que tout cela signifie ? Peux-tu m'expliquer ?

     — Eh bien, mes amis m'ont organisé une petite fête en l'honneur de mon dix-neuvième anniversaire. Laisse-moi te rafraîchir la mémoire, papa, gueule-t-il d'une voix cinglante.

     Lilas écarquille les yeux en voyant son ami aussi remonté. Une atmosphère tendue règne dans cette chambre.

     — Je suis désolé, je n'ai pu me libérer que ce matin. Je voulais te faire la surprise.

     — Évidemment, le disque devrait être rayé maintenant, jappe-t-il froidement.

     — C'est qui cette fille ? J'ai à peine le dos tourné que tu fais déjà n'importe quoi ?

     — De quel droit me fais-tu des reproches ? Je fais ce que je veux de ma vie, t'as rien à me dire. Et cette fille s'appelle Lilas, c'est mon amie.

     — Yann, je comprends que tu sois en colère contre moi, mais j'avais beaucoup de travail. Elle ressemble à autre chose sauf à une amie, remarque-t-il en jaugeant Lilas.

     — Euh Yann, je pense qu'il est préférable que je m'en aille, chuchote celle-ci.

     — En effet, il vaudrait mieux, rétorque le père de Yann.

     — Tu ne vas nulle part, c'est lui qui part.

     — Mais Yann…

     — J'ai dit, tu ne bouges pas d'ici.

     — Je suis tout de même chez moi Yann, voyons.

     — Trouve-toi un de ces hôtels luxueux pour y passer le restant de ton séjour.

     Lilas n'en revient pas, elle est choquée de la violence avec laquelle Yann parle à son père. Ce Yann ordinairement calme, dévoile une autre facette de lui dont elle ignorait l'existence. Elle décèle néanmoins à travers cette animosité, une profonde amertume. Son cœur s'emballe.

     — Nous poursuivrons cette discussion plus tard, proclame-t-il, après s'être décidé à s'en aller.

     Yann ne le raccompagne même pas à la porte. À peine a-t-il tourné le dos que le jeune homme s'effondre sous le regard contrit de son amie.