8. Triangle amoureux

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"Tout ne tourne pas toujours autour de toi. Si tu n'étais pas si égoïste tu comprendrais... " 

Tes yeux me fixaient remplis de larmes, ton corps tremblait entre deux sanglots.

Mais qu'est-ce que je devais comprendre hein au juste ? Que tu me l'avais mise à l'envers ? Et qu'en plus maintenant c'était toi qui te positionnais en victime ? ah oui, ça c'est sûr, je l'avais bien compris !

****

Quelques jours maintenant que nous étions rentrées de Chau Doc, et comme on n'allait pas s'arrêter sur une si belle lancée, tu cherchais à me surprendre encore. 

Un matin au bureau, je recevais ton message m'annonçant que tu avais une surprise pour moi. Joueuse, tu me donnais un indice dans la foulée « it's something you lovingly accept but don't love about me » (c'est quelque chose que tu acceptes gentiment mais que tu n'aimes pas à propos de moi).

J'adorais que tu joues comme ça avec moi. Je ne savais jamais à quoi m'attendre avec toi ! Mais qu'est-ce que ça pouvait bien être ? Je sentais l'excitation me gagner au travail, et je me forçais tant bien que mal à rester concentrée sur mes tableaux de chiffres. 

Ah la patience ce n'était décidément pas mon fort ! 

345 000, 347 000, 378 000... mais ou en étais-je déjà ? J'étais physiquement présente mais mon esprit était absent, déjà parti avec toi. En plus j'avais déjà une petite idée en tête ! Je mourrais d'envie de te retrouver à la maison le soir même pour découvrir si j'avais raison.

Et quelle ne fut pas ma joie quand je découvris que je ne m'étais pas trompée !

C'est ainsi qu'en rentrant ce soir-là, après t'avoir appelée et cherchée fébrilement dans toute la maison sans succès, je te trouvai finalement sur le roof, avachie sur un canapé. Tu te tenais là, t'étirant nonchalamment les bras en l'air, les paumes tournées vers le ciel. 

Je ne pouvais en croire mes yeux. Il y avait là devant moi deux petites taches blanches allongées et lisses. Tu me souris, et m'envoyais un clin d'œil, espiègle. 

Je te fixais encore quelques instants puis éclatait d'un rire joyeux en sautant dans tes bras. Pas un poil ! Plus le moindre petit poil à l'horizon !! Tu t'étais ENFIN faite épiler les aisselles !!

Ce jour était décidément à marquer d'une pierre blanche. 

J'avoue que sur l'épilation ça faisait longtemps que j'avais battu en retraite ; longtemps que j'avais renoncé à te convaincre. Nous avions eu cette discussion des dizaines de fois : tu me faisais remarquer que les poils c'était naturel, qu'il n'y avait donc rien de sale à ça, et que mon opinion n'était que la résultante d'une construction sociale. Je pensais comme ça parce que la société bannissait les poils sur les femmes, parce que j'étais conditionnée par mon éducation et par les autres. Et puis en plus les poils tu trouvais ça sexy. Pourquoi pas après tout ? Je ne trouvais pas vraiment de contre argument, c'était ton opinion et pour une fois je n'avais rien à redire. 

Tu me faisais prendre conscience avec stupeur que je n'avais jusqu'ici jamais vraiment pensé par moi-même mais toujours à travers le prisme de la société que je n'avais d'ailleurs jamais questionné. 

Si ça avait été la mode des poils sous les bras pour les femmes, alors surement je n'aurais pas associé ça a un manque d'hygiène ! Surement j'aurais trouvé ça normal et même sexy !

En tout cas je le reçu comme une belle preuve d'amour.

Je savais que si tu refusais de t'épiler ce n'était pas seulement pour le plaisir de pointer la connerie des normes sociales ou de choquer les « biens pensants ». C'était surtout un hommage à ton ex, cette fille de 22 ans elle aussi, qui t'avais séduite et dont tu parlais comme d'une véritable beauté enchanteresse. Comme j'aurais aimé que tu me décrives un jour comme ça ! Je sentais que tu l'avais vraiment aimée et qu'elle t'avait fait beaucoup souffrir... 

Mirage au VietnamWhere stories live. Discover now