Chapitre 4: Nouvelles brutales

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Je restais là, paralysée entre mes couvertures, l'air complètement inerte. Tout allait trop vite pour être vrai; je devais être tombée dans un roman de science fiction pour que ça tourne de cette manière..! Des tas de question volaient dans mon esprit, valsaient, toutes incompréhensibles et sans réponse. Quelle était cette inquiétante silhouette qui rôdait autour de notre maison? Pourquoi moi? Pourquoi seule? Pourquoi mon frère ne m'aidait-il pas? Que s'était-il passé avec ma mère? Devais-je ma vie à un stupide téléphone?
Tout tournait, ça me donnait la nausée tellement ça me rendait malade. C'en était trop, trop, j'étais trop sensible pour supporter ça, pas assez forte. Une larme coula sur ma joue, puis deux, et enfin une multitude. Elles continuaient de tomber de concert avec la pluie torrentielle, et je ne pouvais plus rien faire pour les arrêter.

Mes pleurs ne cessèrent que lorsque vint l'heure du dîner. Je me levai sans vraiment réaliser où j'allais et sortis de ma chambre tel un fantôme. Je descendis les escaliers machinalement, les yeux et les joues encore rougis. Quelle fut ma surprise lorsque je vis ma mère et mon frère discuter et rire autour d'un bon repas comme avant..! La onzième marche craqua et révéla ma présence à ma famille. Ma mère se tourna vers moi, l'anxiété se lisait clairement sur son visage mais je fis mine de ne pas le remarquer. Mon frère se tut aussitôt et replongea son nez dans son assiette. Je n'y croyais pas, cette scène était trop banale après ce qu'il venait de se passer.

"Ma-maman? Tu... Tu es.. Enfin, tout à l'heure, tu étais... C'était une blague, c'est ça? Une mauvaise blague, oui! Ah ah, bravo, j'ai bien failli y croire!
-Claire, écoute, ce n'est pas aussi simple... Commença ma mère"

Mais je ne l'écoutais pas, je ne l'écoutais plus, j'avais trouvé le pourquoi à toutes mes questions, toutes ces interrogations qui avaient empoisonné mon après-midi. Je continuais, prise dans mon élan et ne voulant plus rien, même pas la vérité:

"Oui, tout est clair, maintenant! Alors maman n'est pas possédée, Gaël ne découpe pas de malheureuses poupées vaudou des journées durant, et je ne dois pas ma vie à un vulgaire appel inconnu..! Je-...
-Sœurette, Maman n'est pas stable mentalement parlant. M'annonça mon frère de 17 ans, bientôt 18."

Cette nouvelle me frappa de plein fouet. Je me tournai lentement vers lui, pour être sûre de bien avoir entendu. Comment pouvait-il garder un air aussi indifférent en disant ça?Comment pouvait-il l'annoncer aussi facilement?! Mon frère et moi étions très complices mais j'avais vraiment envie de vomir devant sa personne, parfois, et c'était le cas à cet instant précis. Je le détestais pour m'avoir dévoilé la vérité (ou une partie, tout du moins) aussi sèchement. Je n'arrivais même pas à m'énerver tellement j'étais choquée:

"Quoi? Mais... Elle était normale avant, je vois pas pourquoi ça ressortirait maintenant...!
-Nous avions voulu te le dire avant, ma chérie, m'assura ma mère en s'avançant vers moi, mais...
-Attends, "nous"? Parce que en plus j'étais la seule à ne pas le savoir?!
-Gaël avait 4 ans lorsque votre père est parti et que j'ai rechuté dans ces crises, j'ai dut lui avouer ce qu'il se passait, mais toi tu n'avais que 2 ans...
-Tu crois que c'est une raison?!"

Le chagrin d'avoir été mise à l'écart surpassait ma colère, si bien que je m'exprimais avec une petit voix aiguë. Un silence se passa sans qu'aucun de nous n'osa parler. Ma mère ne m'avait pas répondu, je n'avais même pas vu son regard empreint de tristesse et d'angoisse. Mon frère, enfin, de sa voix grave et sombre, acheva la première partie:

"Ce n'est pas tout. Maman doit partir à Paris pour faire des examens. Ça durera un mois minimum, mais s'ils la jugent inapte à vivre normalement... Disons que ça peut être bien plus long...
-Et qui nous gardera, hein?! De quel droit nous enlèvent-ils notre seule famille??
-Ton-ton frère peut très bien s'occuper de toi, Claire, reprit ma mère d'une voix blanche, il est presque majeur, après tout..."

J'avais compris le sous-entendu dans la phrase de mon frère. Oui. Ça pouvait durer éternellement, elle pouvait être internée pour toujours. Je refoulai mes larmes, tentant d'être forte, et demandai d'une petit voix, exaspérée et dévastée:

"Bon. Est ce que quelqu'un a au moins une bonne nouvelle pour compenser?
-Votre père est de retour en Bretagne. Annonça ma mère"

Stop. Elle parlait bien de celui qui nous avait abandonné? Cela me remplit de joie et me répugna tout à la fois. Mes poings se serrèrent, je devais refouler tout ce qui montait en moi pour ne pas pleurer devant eux. Je leur répondis d'une voix brisée:

"J'espère pour vous que c'est une blague."

Je me tournai vivement vers les escaliers et les monta en vitesse, ignorant les appels de mon frère. Je ne pouvais arrêter mes larmes de couler, je ne pouvais arrêter mes pas précipités, je ne pouvais empêcher tout ce qui faisait ma vie de s'écrouler. Je m'enfermai dans ma chambre, la boule au ventre. Une silhouette se dessina dans l'encadrement de ma fenêtre mais j'étais aveuglée par la colère.

Entre la vie et la mortWhere stories live. Discover now