8🎄Un Noël de Conte de Fées

290 44 469
                                    

Belle encoda le dernier livre de sa journée dans le système intégré de gestion de bibliothèques, repérant de manière experte le titre propre, l'année et la maison d'édition, l'auteur, et autres informations nécessaires à la description technique du document. En levant les yeux vers l'horloge blanche aux aiguilles noires n'égayant pas le moins du monde la bibliothèque, pourtant accueillante et confortable, elle éteignit l'ordinateur et se leva pour rassembler ses affaires. En ôtant son épais manteau de son clou, elle contempla le sapin orné de guirlandes et de boules bleues et argentées décorant la pièce.

La jeune femme sourit et détourna les yeux pour embrasser la salle d'un regard, fière d'observer l'ambiance à la fois chaleureuse et hivernale qu'elle avait pu installer dans la bibliothèque - sa bibliothèque. C'était elle qui avait monté le projet, déterminé le budget dont elle aurait besoin, les meubles et le matériel informatique nécessaires, le fonds de livres à mettre à disposition... et c'était elle qui la gérait dans son entièreté. Oui, c'était sa bibliothèque, et son seul sursaut d'orgueil. Son écharpe et son bonnet enserrant respectivement son cou et ses oreilles, Belle sortit du bâtiment pour marcher sous les flocons s'accrochant désespérément au trottoir et à ses boucles brunes qui tombaient dans son dos.

D'un pas soutenu, elle rejoignit Philibert, sa voiture grise qu'elle avait fini par nommer au fil des années, pour une raison qui lui échappait. Le véhicule l'attendait, couvert de neige, à la place précaire que la jeune femme avait trouvée pour se garer. Un soupir lui échappa et elle glissa sa main gantée sur le pare-brise pour ôter la couche blanche qui s'y était déposée. En frissonnant, elle s'installa au volant de la voiture, extirpa ses doigts des gants et frotta ses phalanges pour tenter de les réchauffer. Lorsqu'elle alluma le contact, l'horloge lui indiqua qu'elle avait toujours juste le temps de rentrer chez elle pour se changer avant de rejoindre ses amies.

Belle n'avait plus vraiment de famille, depuis qu'elle avait perdu son père ; alors, tous les ans, pendant les fêtes de fin d'année, elles mettaient un point d'honneur à lui rappeler que les liens de sang ne constituaient pas les seuls liens indestructibles et essentiels. La jeune femme leur en était sincèrement reconnaissante ; certaines abandonnaient leur compagnon et leurs enfants l'espace d'une soirée pour s'assurer du bon déroulement de l'annuel repas de Noël au restaurant. Tout en sortant de son appartement vêtue de sa robe bleue favorite, elle se souvint que cette année, elles mangeraient italien à la Bella Notte. Rien qui ne relève réellement d'un repas de fête de fin d'année à proprement parler, mais ce qui les intéressait véritablement était de partager un repas dans la joie de se retrouver.

La jeune femme trouva une place à laquelle se garer dans le parking du restaurant, qui était pourtant presque complet, situation qui lui arracha un soupir de soulagement. Laisser sa voiture près du Neverbar ne l'enchantait guère plus que de l'abandonner à proximité du Tea Party, qui s'avéraient pourtant être les deux seules enseignes dotées d'un parking dans les alentours de la Bella Notte. Un bar et un salon de thés à l'allure innocente mais au cœur dépravé. Le Bois Dormant, le magasin de matelas dans lequel travaillait Aurore, possédait malheureusement un parking réservé à la clientèle et dont l'accès était barré en-dehors des heures d'ouverture du commerce, alors que la Chaussure Solitaire, dont Cendrillon était à la fois vendeuse et femme de ménage, se trouvait bien trop éloignée de sa destination.

En poussant la porte du restaurant, Belle prit soudainement conscience qu'elle ignorait lesquelles de ses amies seraient présentes. Cendrillon, en organisatrice fiable et précise, s'était chargée de se renseigner et de réserver une table suffisamment grande. Elle avait même choisi le restaurant, certifiant au groupe que la Bella Notte n'avait pas accueilli leurs réjouissances depuis plusieurs années déjà. Aucune d'entre elles n'aurait osé remettre en question les registres de leur minutieuse camarade, qui tenait soigneusement un agenda rétrospectif de sa vie ; aussi s'étaient-elles contenter d'acquiescer sans protestation futile.

Calendrier de l'Avent 2020 [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant