(2) Chapitre 13

416 19 15
                                    

Et voilà le dernier chapitre ! L'histoire est en plan depuis plusieurs années, donc je vous promets pas de la terminer, mais qui sait ?


Au moment où je pousse la porte de la chambre que je partage depuis plus d'un mois déjà avec Astrale, je sens mon cœur se serre douloureusement dans ma poitrine. J'ai besoin de me confier à ma meilleure amie, de toute urgence. Mais, au fond de moi, une voix ne peut s'empêcher de murmurer mes pires angoisses.

N'en parles à personne, chuchote-t-elle depuis les ténèbres de mon esprit. Ne fais confiance à personne. Ils mentent tous. Tous. Tous.

Je m'agrippe la tête entre les mains; je veux que ces voix cessent ! Les découvertes que j'ai fait me terrorisent, mais je ne dois pas me laisser envahir par ce sentiment glacé qui tente pourtant de s'infiltrer dans mon cerveau, par tous les moyens.

Un grand frisson me traverse, et enfin, j'ouvre les yeux. Je réalise alors que je me suis recroquevillée dans un coin de la chambre, les membres tremblants, la respiration faible. Et mon cœur, tambourinait dans ma poitrine, marquant d'un rythme effréné le sang qui me remonte à la tête.

J'ai besoin d'air. Mais surtout, plus que jamais, j'ai besoin de parler à quelqu'un — malgré les mots de la voix, qui continuent de hanter mon esprit.

Je pourrais en parler à Ombre ou à Ruy, mais j'ai peur de leur réaction. Jamais je n'aurais dû surprendre cette conversation, et désormais, je vais payer toutes les responsabilités de cette découverte.

Avec un profond soupire, je me passe une main encore tremblante sur le visage, avant de relever la tête. Je suis seule dans la chambre ; j'aurais dû m'y attendre. J'ai l'impression de ne pas avoir vu Astrale depuis une éternité, j'ignore totalement où elle se trouve, ni pourquoi elle n'est pas là. Elle travaille certainement son invocation avec un membre des Invisibles... En tout cas, elle ne m'a rien dit.

Je sens mes yeux me piquer, sans que je comprenne pourquoi. Je m'apprête à me frotter les yeux, mais au même instant, un épais voile noir s'abat devant mes paupières.

Puis c'est le noir complet.

Je suis tirée du sommeil par une voix grave, tranchante, me déchirant le crâne. Dans un sursaut incontrôlé, je me redresse d'un seul coup, pour tomber nez à nez avec les yeux clairs de mon cousin, me fixant avec une colère bien mal dissimulée.

— Kora, commence-t-il, sur un ton que je ne lui connais pas. Il paraît que tu me cherchais ?

Je cligne des yeux, avant de jeter un regard autours de moi. Quand m'étais-je endormis ? Puis je sens soudainement mon sang se glacer dans mes veines, à mesure que les souvenirs me reviennent, et que les paroles de Ruy atteignent ma conscience. Je me rappelle alors le mensonge de la veille, lorsque j'étais tombée sur Trix à l'angle d'un couloir. Je lui avais dit chercher Ruy, tout en assurant connaître le lieu dont il me parlait — quelque chose comme Gwanora, Granria peut-être.
Je sens que je vais amèrement regretter ce mensonge ; et je n'est pas besoin du regard assassin de mon cousin braqué sur moi pour le comprendre.

— Lève-toi, siffle-t-il. Il faut qu'on parle.

Je réprime un grognement de protestation : je préfère ne pas l'énerver davantage. Je me lève donc, ignorant la douleur de mes muscles qui ne me quitte plus, et me dépêche de rejoindre Ruy qui m'attend dans l'embrasure de la porte.

— N'oublie pas ton manteau.

Je ne peux m'empêcher de hausser un sourcil. Même si la grande cape noire marquée de l'œil blanc des invisibles est considérée comme une sorte d'uniforme, je n'avais jamais été obligée de la porter — même si je le faisais tout de même. Et voilà que ça devient une obligation...

— Pourquoi ? Ne puis-je me retenir de demander, malgré le regard de mon cousin, toujours braqué sur moi.

— Aujourd'hui, c'est moi qui pose les questions, se contente-t-il de répondre, en m'indiquant la sortie du doigt. Dépêche-toi.

À contre cœur, je le suis dans le dédale de couloirs stériles, jusqu'à perdre totalement la notion de temps et d'espace. Une douleur aiguë se propage dans mes jambes, et j'ai l'impression de marcher depuis des heures, lorsque nous nous stoppons finalement devant une grande porte blanche. Je ne peux retenir un petit couinement en reconnaissant la salle où Ruy nous avait emmené, Astrale et moi, lorsque nous nous apprêtions à rejoindre l'organisation. Cette journée me paraît si lointaine, désormais, que c'en est déroutant.

— Qu'est-ce qu'on fait ici, Ruy ? je murmure.

— Notre cheffe a demander à te voir, Kora. C'est rare.

— Tu sais pourquoi ?

— J'ai ma petite idée, oui... Mais ça ne sert à rien d'insister, je ne te dirais rien.

Je me force à ravaler mes questions, qui se comptent pourtant en dizaines. Dans le brouhaha que forment mes doutes au sein de ma conscience, une question ressort pourtant.

Et si elle avait découvert que j'avais écouté en cachette une discussion confidentielle entre deux membres des Invisibles ?

Une peur profonde me tord le ventre à cette idée. Gethen est un télépathe puissant ; qui sait si il n'avait pas profiter d'un entraînement pour me sonder ? Si c'était le cas, je ne pouvais pas m'en être rendue compte, n'était pas télépathe moi-même.
Mais ça aurait été violer les codes éthiques. Les Invisibles étaient-ils vraiment tombés si bas ?

Dans mon esprit, j'ai encore du mal à trier toutes ces informations, ni à choisir quoi penser de cette organisation. D'un côté, ils défendent les bonnes valeurs, j'en ai la conviction. Cela fait des millénaires que les problèmes s'accumulent dans les Cités Perdues, entre les différentes classes sociales, la discrimination envers les Sans-Talents, les Mal-Assortis et les jumeaux.
Il y a quelques mois encore, j'étais presque persuadé de ne jamais débloquer de talents. Cette idée m'avait terrorisée, et en y repensant, ce n'était pas normal. Avoir un talent ou non ne dépendait pas de la personne concernée, il est si injuste de la juger et de décider de son mode de vie en fonction de ça !

Non, le problème, ce n'est pas le buts des Invisibles. Ce qui me dérange réelement, c'est plutôt les moyens qu'ils seraient susceptibles d'utiliser pour arriver à leurs fins. En plus d'un mois au sein de l'organisation, je n'avais fait que m'entrainer.

Mais le problème n'était pas là.

Je m'étais entraînée à me battre.

Kora - Fanfiction Gardiens des cités perduesWhere stories live. Discover now