57/ Mots

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Sin agonisait lentement dans les bras de sa sœur dont les cris et les pleurs ne faiblissaient pas. Le sang jaillissait sans relâche de son corps et la vie le quittait peu à peu. San implorait le Dieu cerf de venir en aide à son frère. Celui-ci ouvrit faiblement les paupières et tourna ses iris noirs vers elle :

— Le Dieu cerf ne me sauvera pas San, je ne le mérite pas.

— Qui le mérite alors ? Si ce n'est pas toi ? sanglotait-elle.

— Quelqu'un qui, contrairement à nous, cherchera à ramener la paix plutôt qu'engendrer la haine et le conflit.

— Cela n'existe pas, poursuivit San, les yeux inondés de grosses larmes salées.

Sin sourit, et du sang sortit alors de sa puissante mâchoire :

— Ne perds pas espoir San. Même si je pars, je suis persuadé qu'un jour tu trouveras quelqu'un pour me remplacer, et tu l'aideras.

San hocha la tête, promettant à son frère d'obéir à tous ses désirs. Celui-ci, rassuré, laissa retomber lourdement sa tête sur le sol et murmura une dernière fois :

— Ma petite San, tu es si jolie...

Un ultime souffle quitta sa bouche et San plongea alors sa tête dans son pelage blanc. Elle se retint de pousser un long cri de rage et sanglota, la tête enfouie dans la fourrure soyeuse de Sin :

— Je te promets que je l'aiderais, tu as ma parole !

En disant ces mots, San doutait. Comment le reconnaitrait-elle ? Ce qu'elle ne savait pas, c'était que cette personne serait un humain. Elle avait fait une promesse, alors elle l'aiderait, sans douter des paroles de son frère. Et ce qu'elle ne savait pas non plus, c'est que cet humain dirait les mots. Ces mots précieux qu'elle venait d'entendre de la bouche de son frère. Dans son agonie, il chuchoterait à son tour ses paroles, et décidée à ne pas le laisser mourir une nouvelle fois comme son frère, elle le conduirait au Dieu cerf, et il le guérirait.

Avec sa fourrure, San se fit une cape. Avec ses dents, elle se fit un collier. Avec l'aide de son poignard, elle prit ses oreilles, pour les attacher sur son masque. Ces oreilles rouges qui faisaient toute la différence entre lui et ses deux frères. Ces oreilles rouges qu'elle avait toujours adorées car elles rappelaient sans cesse à San qu'elle n'était pas la seule à être différente de sa mère. Sin avait toujours été comme elle. Elle ne voulait pas se détacher de lui. Elle voulait porter définitivement une trace de lui sur elle, pour ne jamais l'oublier.

Pour finir, avec son sang, elle se fit trois promesses. La première prit la forme d'un triangle rouge avec une couleur profonde, sur son front. Elle respecterait les décisions de son frère.

La deuxième, San se la traça sur la joue gauche, toujours en forme de triangle. Elle vengerait son frère en faisant disparaitre les humains de cette forêt.

La troisième se situait sur son autre joue. Elle tuerait de ses propres mains, la femme qui avait provoqué la destruction de la forêt, et la mort de Sin.

Personne ne pourrait lui faire changer d'avis. A part peut être un humain maudit, dévoré par la haine à l'état pur. Qui allait être le premier à se battre. Mais à se battre pour elle. Pas avec, ni contre l'enfant louve. Pour une fois quelqu'un se battrait pour elle.

« Tu es si jolie ».

Origines (Princesse Mononoké)Where stories live. Discover now