11/ Samouraïs

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     La flèche transperça le ventre du lapin blanc et le sang éclaboussa l'herbe verte de la forêt. Kaya écarquilla les yeux et s'écria :

     - Tu l'as eu Ashitaka !

     Celui-ci sauta par dessus le tronc d'arbre couché derrière lequel il était tapit et prit le corps de l'animal entre ses doigts :

     - Je ne le voyais pas si petit...

     - C'est déjà une très bonne prise Ashitaka.

     Ils n'avaient pas eu la permission d'aller chasser, mais ils avaient tenu à y aller quand même. Si Ashitaka ramenait de la bonne viande fraiche au village, on ne lui reprocherait pas. A part sa mère certainement. Kaya avait insisté pour venir même si Ashitaka le lui avait déconseillé.

     Elle mit leur premier butin dans un sac en toile et le jeta sur son épaule :

     - Pauvre petite bête.

     - Il ne faut pas faire de chasse si on a pitié des petites bêtes, plaisanta Ashitaka.

     Il marchait en tête, l'arc à la main, les flèches dans le dos, et le sabre à la ceinture. Comme un félin, il se mouvait en silence, le dos courbé, les pas feutrés...et l'habit bleu azur repérable sûrement à des kilomètres à la ronde. Kaya sourit dans son dos et se cala au pas de son ami.

     - Pourquoi n'opte tu pas pour des vêtements moins voyants ? demanda-t-elle ?

     - Parce qu'un bon chasseur ne réussit pas grâce à sa tenue, mais à ses aptitudes remarquables.

     Kaya pouffa et Ashitaka se retourna :

     - Bon j'avoue que c'est aussi parce que j'adore ces vêtements.

     Ils passèrent devant une rivière chantante et Kaya s'écria :

     - Faisons une pause !

     - Déjà ? s'étonna le jeune homme.

     Ils n'étaient partis que depuis une heure à peine. Elle rit comme une enfant et enleva ses habits pour sauter dans l'eau munie uniquement d'un petit haut blanc et d'une culotte. Elle émergea en prenant de grandes bouffées d'oxygène et rejeta ses cheveux en arrière, coiffés en une petite queue qui se dressait sur sa tête.

     Ashitaka hésita, regarda aux alentours, puis se résigna et sauta dans l'eau à son tour. Ils nagèrent et s'aspergèrent tous les deux en riant, mais aucun des deux n'arrivait néanmoins à être à l'aise devant le corps révélé de l'autre.

     Kaya s'isola et profita de cette baignade pour se laver le corps. Elle tournait le dos à Ashitaka, mais alors qu'elle se frottait les bras, elle ne pu s'empêcher de jeter un regard au torse de son ami derrière elle. Il s'en aperçu et elle détourna la tête en rougissant si fort que le froid de l'eau ne l'atteignit plus pendant un moment.

     La jeune fille ressentait quelque chose de nouveau lorsqu'elle se trouvait en sa présence. Jamais elle n'aurait pensé qu'un garçon la trouble autant. Elle glissa les deux mèches de cheveux qui lui collaient aux tempes derrière ses oreilles, lorsqu'un craquement se fit entendre dans la forêt, à quelques mètres des deux amis. Kaya leva brusquement la tête et se corps entier se crispa. Elle entendait des voix, ainsi que des hennissements de chevaux.

     - Ashitaka, murmura-t-elle prudemment.

     - Que se passe-t-il ? répondit l'intéressé en se rapprochant doucement d'elle, ralenti par l'eau qui lui arrivait au niveau du torse.

     - Ecoute.

     Les hennissements reprirent. Le jeune guerrier fronça les sourcils et sortit précipitamment de l'eau.

     - Je vais voir, Kaya !

     Il remit précipitamment son habit couleur ciel et s'assura que son sabre était bien accroché à sa ceinture. Sa jeune amie fit de même, et il partit alors qu'elle remettait son kimono.

     Il tendit l'oreille et se faufila à travers les fourrés dans la forêt dense. Des voix fortes et irritées s'élevaient tout près de lui à présent. Il se tapit dans un buisson et observa la scène. Deux hommes à la carrure impressionnante montant des chevaux se tenaient à quelques mètres de lui et semblaient être en pleine conversation très animée. Avec leurs grands casques gris descendant au bas de leur nuque, leur armure rouge autour du buste et protégeant leurs épaules et leurs cuisses, Ashitaka comprit qu'il s'agissait de Samouraïs. Mais que faisaient-ils autant à l'Est ? Ils avaient certainement de sombres projets derrière la tête, sans quoi, ils ne seraient jamais venus aussi loin. Il ne voulait rien faire d'inconscient pour ne pas mettre Kaya en danger, mais il se devait d'arrêter ces deux malfrats.

     Ashitaka bondit hors de sa cachette et dégaina son arme par la même occasion. Les deux intrus se tournèrent pour apercevoir le jeune homme qui leur faisait face avec son sabre rectangulaire à la main.

     - Que venez-vous faire dans cette forêt ? leur demanda-t-il avec froideur.

     Celui de droite prit la parole :

      - Du calme gamin, on a juste perdu notre groupe.

      - Vous mentez, siffla celui qu'on avait qualifié de gamin.

      A cet instant, Kaya fit irruption et le Samouraï de gauche s'éclaffa, faisant trembler sa barbe noire.

      - Ashitaka, qui est ce ?

      - Allez petit, va rejoindre ta copine, on ne vous fera pas de mal.

     Kaya semblait elle aussi piqué à vif. Elle n'aimait pas les manières grotesques de ces deux personnages.

     - Que cherchez-vous ?

     Ashitaka ne semblait pas prêt à abandonner.

     - Vous ne seriez pas des Emishi tous les deux ? demanda celui de gauche en fixant intensément l'habit traditionnel de Kaya qui venait des les trahir.

     Le jeune homme se mit en position de défense devant la concernée et fixa les deux guerriers avec rage.

     - Tu sais que l'Empereur les recherche sans relâche ?

     - Ce n'est pas notre objectif, le coupa l'autre.

     Il regarda Ashitaka qui sentait le danger approcher, mais ces deux Samouraïs ne semblaient pas avoir de mauvaises intentions. Il ne changea pourtant pas de position et attendit leur réponse.

     - Si tu veux tout savoir petit, on cherche les forges de Dame Eboshi. Mais nous avons perdu notre groupe il y a quelques jours lors d'une escale. A mon avis, nous nous sommes trop égarés vers l'Est. Mais tu sais peut être où sont ces forge, toi ?

     Ashitaka répondit du tac au tac :

     - Il n'y a pas de forge ici.

     - C'est bien ce qu'on pensait, marmonna le Samouraï.

     Ils saluèrent en riant les deux adolescents qui les regardèrent s'éloigner dans la direction opposée à celle de leur village. 

Origines (Princesse Mononoké)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant