Chapitre 9

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Le reste de l'été passa comme dans un rêve. Enfin, ce que Sirius imaginait être un rêve. Lui, il faisait plutôt des cauchemars. Il avait sûrement déjà fait des rêves heureux, mais il n'en avait aucun souvenir. Comme si son corps et son esprit essayaient à tout prix de rejeter chaque parcelle de bonheur qu'il pouvait lui rester. Mais heureusement (justement), son corps et son esprit ne pouvaient pas lui enlever James. Son naturel tellement... tellement James, avait rendu chaque jour plus lumineux. C'était idiot dit comme ça, et complètement cul-cul, mais c'était ce qu'il ressentait. James irradiait tant la santé et la joie de vivre que c'en était difficile d'être sombre à ses côtés. Comme s'il vous contaminait positivement. Et en plus quand on s'appelait Sirius Black, que James était votre meilleur ami et qu'il employait toute son ingéniosité pour vous faire sourire, ça devenait quasiment impossible.

Le premier septembre arriva enfin. Ou déjà, Sirius ne savait plus trop. La mère de James les avait accompagnés à la gare même s'ils lui avaient assurée de qu'ils pouvaient se débrouiller tous seuls. Elle avait tenu à leur dire un dernier au revoir sur le quai. Sirius la soupçonnait légèrement de ne pas vouloir le laisser seul, lui surtout, car sa mère serait sûrement là avec son frère. Euphemia voulait prouver à Walburga qu'elle au moins savait prendre soin de Sirius et que sa mère ferait mieux d'en prendre de la graine. Rien que pour cet acte, Sirius aurait été éternellement reconnaissant à la mère de James. Mais il y en avait tellement, tellement d'autres. Le jeune homme prit une grande inspiration et traversa la barrière magique à la suite de James.

La vision du quai bondé, de l'imposante locomotive rouge et de tout ce qu'elle représentait lui arracha un sourire amer, sachant que c'était la dernière fois qu'il les voyait. En tournant la tête, il repéra immédiatement sa mère, accompagnée de Regulus. Merlin, pourquoi n'avait-il pas pu voir Peter, Remus, Lily ou Marlene d'abord ? Non, il avait fallu que ce soit elle. Y voyant un signe, Sirius s'avança vers sa mère. Elle tourna aussitôt la tête, comme si elle avait senti sa présence et le reconnaissant, elle planta ses yeux froids dans les siens. Sirius sentit sa volonté faiblir, alors qu'un souvenir remonta brusquement à la surface de sa mémoire.

Un petit Sirius de onze ans se tient debout contre un mur, perdu entre les écoliers qui courent le long du quai 9 3/4 pour retrouver leurs amis, avec le regard de sa mère pesant sur ses épaules. Il y a aussi Regulus, neuf ans, qui regarde son aîné avec de grands yeux plein d'admiration et de ferveur. À l'époque où ils partageaient plus que simplement du sang. Son père n'est pas venu, bien sûr, il avait autre chose à faire. Le petit Sirius, à la fois excité de ce changement, de cet évènement dont tout le monde lui parle tant, heureux de partir loin de ses parents qui ne lui donnent pas le quart de l'amour qu'il mérite, et effrayé, effrayé par tous ces gens, effrayé de se retrouver seul au milieu de la foule, effrayé par ses cousines qui rient à côté, déjà affublées du blason vert et argent, effrayé par le poids des attentes de sa famille, effrayé par les derniers mots de son père : "Fais nous honneur".

Le petit Sirius, qui a encore tant de choses à vivre, à affronter, à perdre.

Le Sirius du présent revint à la réalité en sentant une pression sur son épaule. Euphemia était là, à ses côtés et ses yeux disaient « Tu n'es pas seul, tu n'es pas obligé. »

Mais en fait, il l'était.

Alors il se dégagea doucement, lui adressa un sourire qu'il espéra rassurant et reprit sa marche forcée. Soutenant le regard de sa mère, il attendit qu'elle parle, les mains fourrées dans les poches pour cacher leur tremblements. Inconscient de toute sa beauté dédaigneuse, et de l'ombre qui le surplombait en permanence.

- Alors c'était là que tu étais tout l'été. C'est bien ce que je pensais. Au moins, ce sont des Sangs-Purs, jeta-t-elle d'une voix posée et désintéressée.

Tout ira bien [une fanfiction maraudeurs]Unde poveștirile trăiesc. Descoperă acum