Chapitre 21

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La soirée battait son plein, et il fallait bien avouer que tout le monde prenait son pied. Même les serpentards qui avaient fait des moues blasées au début avaient fini par prendre des verres comme tout le monde, et à bouger de droite à gauche en rythme. On entendait même à présent de grands rires s'échapper de leur groupe, même s'ils restaient fermés et ne se mélangeaient pas aux autres. 

Regulus, de son côté, s'ennuyait un peu. Il n'avait jamais trouvé ses camarades de maison très intéressants. Il n'avait jamais trouvé personne très intéressant, en vérité. Ou peut-être était-ce ce qu'il se disait pour ne pas avoir trop mal quand les gens le quittaient. Parce que ça finissait toujours par arriver. C'était comme sa malédiction. Mais Regulus s'en foutait. Parce que les gens n'étaient pas intéressants, alors qu'est-ce que ça pouvait bien lui foutre qu'ils le laissent. C'était même tant mieux. Parce qu'au final, il était mieux tout seul.

Il avait eu un moment où il s'était demandé si ce n'était pas lui qui était inintéressant. Parce que le seul thème récurrent dans toutes les relations qu'il avait gâché, eh bien, c'était lui. Ça lui avait fait un peu mal, sur le coup. Un peu. Comme un petit picotement, qui revenait les nuits d'insomnie, ou quand il était seul. Ce qui était devenu vrai la plupart du temps. Il s'était habitué au picotement, et il avait arrêté de croire que c'était de sa faute. C'était un Black, évidemment qu'il était intéressant, si les gens ne voyaient pas ce qu'ils rataient, c'était tant pis pour eux. Et s'il était le seul à voir sa véritable valeur, ça n'avait pas d'importance. Il serait seul.

C'était ce qu'il se disait, la plupart du temps. Sauf quand les souvenirs remontaient et s'enroulaient autour de lui, plus étouffants que les serpents qu'il voyait fleurir sur les bras de ses camarades. Il se réveillait parfois en sursaut la nuit, les yeux grand ouverts sur le noir du dortoir, mais son regard tourné vers ses terreurs nocturnes. C'était peut-être encore pire quand il faisait des rêves appréciables.

Mais Regulus se détestait pour ça, parce que c'était de la faiblesse. Et que s'il y avait une chose qu'il avait retenue au cours de sa vie, c'est qu'il n'avait pas le droit d'être faible. Alors il avait appris à ne plus se crier en se réveillant, il avait appris à respirer pour contenir l'angoisse, il avait appris à faire passer les longues heures sans sommeil en silence, l'esprit et le regard vide. Il avait appris à oublier chaque nuit, et à apprivoiser sa propre peur pour la faire taire.

Regulus n'était plus faible ; il ne l'avait jamais été, en fait. Il avait toujours été un Black, fort et pur. Que pourrait-il bien désirer de plus ?

Mais pour l'instant, Regulus s'ennuyait. Il regardait ses camarades rire et danser, sur leur trente et un. Tellement loin d'eux. Il s'était bien habillé, lui aussi, il voulait faire honneur à l'élégance naturelle des Black. Son port de tête aurait suffi à le rendre élégant, même dans des robes déchirées. Mais il avait tout de même passé un costume couteux et bien ajusté, parce qu'il pouvait.

Il en était déjà à son quatrième verre, mais il ressentait à peine les effets de l'alcool. Parfois, il se demandait si toute sa vie se résumerait à ça. S'ennuyer dans des soirées mondaines, faire semblant d'être ami avec des gens inintéressants, montrer à tout le monde qu'il était riche, pur, puissant. Des fois, il pensait que oui, qu'il n'y aurait jamais rien d'autre. Mais ça ne le dérangeait pas plus que ça. Au moins, on le laissait tranquille. Il prit un cinquième verre, histoire d'avoir quelque chose à faire de ses mains, lorsque la porte s'ouvrit avec fracas.

Comme tous les élèves, il assista à l'entrée dramatique des maraudeurs. Il secoua la tête avec dégout quand il vit son frère et James entrer. Les idiots. Ils étaient ridicules, et en plus ils se croyaient drôles et spéciaux. C'était minable. Il se demanda pourquoi il avait accepté de venir, et se souvint de James criant dans les couloirs vides qu'ils étaient amis. Quelles conneries. Il était vraiment stupide d'avoir pu y croire ne serait-ce qu'un instant, et Regulus était tout aussi stupide pour l'avoir laissé faire.

Tout ira bien [une fanfiction maraudeurs]Where stories live. Discover now