Chapitre 15 :

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Je suis bouleversé. Je viens de revoir Eva mais elle est à nouveau partie. Elle m'a paru différente des autres fois, trop différente. Qu'est-ce qui l'a changé ? Notre séparation, le fait qu'elle soit partie vivre dans une autre ville, qu'elle ait arrêté de me parler ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? J'ai trop de questions et peu de réponses. Maintenant que je sais qu'elle est à Paris, je suis prêt à tout faire pour la retrouver même si elle ne le veut pas. Nous pouvons renouer le contact, je le sais. Mais j'ignore comment. J'ai l'impression que ma vie n'a plus aucun sens à présent. Comme je ne sais pas quoi faire, je rentre dans le bar, perdu et gêné face aux regards des clients. Dylan s'approche de moi, en colère,
 
— Quel mouche t'a piqué, Liam ? J'ai des clients, moi et j'ai des recettes à tenir. Il est hors de question qu'ils partent parce que tu ne veux pas jouer.
 
Je secoue la tête.
 
— Excuse-moi, je suis désolé.
 
Dylan soupire, agacé.
 
— Ne les fais pas plus attendre, s'il te plaît.
 
Je me dépêche de récupérer ma guitare mais juste avant de monter sur scène, je m'adresse à mon ami.
 
— Je viens de revoir la femme que j'aime, Dylan. Je viens de revoir Eva.
 
Dylan me regarde, choqué.
 
— Comment ça ?
 
— Elle est de retour, dis-je.
 
Puis, je monte sur la scène et je commence à jouer. J'essaye de tout oublier. Je me concentre sur mon travail en espérant que les clients soient tout de même satisfait malgré le fait que je sois parti depuis plusieurs minutes. Je reçois quand même des applaudissements après avoir joué la dernière mélodie. Dylan lève le pouce et sort du bar, il semble contrarié. Je me dépêche de le rejoindre dehors et je le vois fumer.
 
— Dylan, mais ça fait des années que tu ne fumes plus ! Tu avais arrêté, je m'exclame, perplexe.
 
Dylan hausse les épaules.
 
— Excuse-moi, mais c'est le stress et la pression. Je n'en peux plus.
 
Je lève les yeux au ciel.
 
— Tu crois que moi c'est différent ?
 
Dylan tire une bouffée de sa cigarette et soupire.
 
— Je suis comme toi, Dylan. J'ai peur d'échouer, et que ma vie devienne catastrophique. Je n'en peux plus aussi. Je suis stressé. J'ai peur de ne pas réussir. Mais j'essaye de tenir, de survivre.
 
Des larmes perlent au coin de mes yeux.
 
— J'essaye parce qu'il ne me reste que ça dans la vie. J'ai que la musique dans la vie. Toi, tu as ta femme.
 
Dylan rit doucement.
 
— Elle a été licenciée. C'est pour ça que tu ne dois pas te laisser distraire par Eva ou par je ne sais quoi, je veux obtenir un grand nombre d'argent, je veux que les clients viennent en masse, je veux pouvoir aider ma femme. Elle compte sur moi pour compléter notre salaire. Tu dois juste te contenter de jouer et je pourrais encore t'aider et aider ma femme.
 
— Je ne sais pas si je le veux.
 
Dylan ferme les yeux puis les ouvre.
 
— Liam, ne commence pas. Ne provoque pas ma ruine.
 
Je soupire et je croise les bras.
 
— Tu ne t'es jamais dit que parfois j'en avais assez ? Assez de faire la même chose, assez d'être seul ? Que parfois je ne voudrais pas changer ?
 
Dylan jette sa cigarette sur le sol et l'écrase avec son talon.
 
— La musique, c'est ta passion. Tu ne peux pas changer.
 
Je lève la tête, agacé.
 
— Non, je ne parle pas de ma passion. Je parle du lieu, peut-être que j'aimerais changer...
 
— Et où est-ce que tu irais ? demande Dylan.
 
Je hausse les épaules.
 
— Je ne sais pas, autre part.
 
— Personne ne t'acceptera. Il n'y a plus de musiciens qui sont recherchés, crois-moi.
 
Je baisse la tête. Ça me fait mal de dire ça, mais il a raison. Ce bar est un des derniers qui est resté ouvert et je doute que les autres recherchent des musiciens ; ils les ont sûrement déjà trouvé.
 
— Il faut mieux que tu restes ici, si tu veux encore vivre, ajouta Dylan.
 
Mes mains commencent à trembler. Il a raison. Je n'ai pas d'avenir ailleurs qu'à Paris. Et je souffre. J'aimerais bien bouger. Plus rien ne me retient ici. À part Eva, c'est vrai. Elle est de retour.
 
— Il faut mieux que tu m'écoutes si tu ne veux pas finir à la rue et sans argent. N'oublie pas qu'il faut que tu travailles, que tu joues si tu veux vivre.
 
J'acquiesce silencieusement. Dylan soupire et retourne dans le bar. Les clients commencent à sortir et je suis bousculé par plusieurs d'entre d'eux. Je recule dans l'ombre, bouleversé. Je ne suis même pas capable de prendre ma vie en main. Je voudrais changer mais j'ai trop peur.

L'art dans la peau - [Tome 4] La musique dans l'âmeWhere stories live. Discover now