Chapitre 12 : In the heat of the moment - 1/3 {Bennett}

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"They tell me you'd never give it up

Like the song that was soul singing in your head

So honey please, don't let go

Or you'll fall into the dead of night"

Bennett

Danny se trouvait au beau milieu d'une conversation téléphonique agitée. Dénué de son tablier et de sa bonne humeur habituelle, quoiqu'il les accueillît tout de même avec un grand sourire. Bennett savait reconnaître tous les signes. En pleine dispute, Danny haussait rarement la voix – au contraire, il la laissait traîner sur les syllabes avec une nonchalance qui en agaçait plus d'un, Ted en tête de liste, Joan quelque part sur le podium – mais bandait toujours ses muscles, probablement de façon inconsciente, comme s'il se tenait prêt à user de sa force à n'importe quel moment. Comme ça, sans prévenir. Bennett ne l'avait pourtant jamais vu frapper qui que ce soit ; Danny, c'était une star de cinéma.

Joey entraîna Bennett jusqu'au comptoir tandis qu'elle continuait d'observer son oncle. Les tics nerveux de ses doigts. La ride sur son front - depuis quand avait-il sur le front un canyon similaire à celui qui se creusait de plus en plus chaque jour sur celui de Ted ? Et ses biceps qui se contractaient, encore et encore, bien que la personne à l'origine de sa colère, au bout du fil, se situait sans doute à des dizaines de kilomètres de lui. Peut-être plus. Pressentait-elle, de là où elle était, que Graham Bell l'avait peut-être sauvée d'un coup de poing ravageur à la Bruce Wayne en pleine mâchoire ? Danny recommença à sourire et passa la main dans ses cheveux blonds gominés. Geste qu'il regretta aussitôt ; grimace.

« Il est distrait, commenta Bennett à voix basse.

— Parce que tu penses sincèrement que ça lui arrive, d'être concentré ? railla Joey. Dis, il montre vachement ses dents, là, non ? Regarde, on dirait qu'il est bloqué. Je te jure, il s'est figé. Je crois bien qu'il est cassé.

— Pas cassé, non. Juste sacrément énervé. » La fillette commença presque à douter de ses intentions, son plan, ses bonnes idées. « Mais attends, observe ses bras. Tiens, tu vois, il est en train de se détendre. Tant mieux pour nous. »

Son oncle finit par raccrocher quelques minutes plus tard. Vint à leur rencontre le regard empli de sa malice habituelle. Son agacement, en effet, semblait bel et bien dissipé.

« Les enfants, qu'est-ce que je vous sers ? Milk-shake vanille ?

— Tout ce que tu sais sur le meurtre de Marco Rodriguez. »

Danny resta un moment sans rien dire, un rictus indéchiffrable en travers du visage.

« Pour moi, intervint Joey, le milk-shake vanille, ça ira très bien. »

Bennett installa ses deux coudes sur la table, joignit les mains sous son menton et y posa la tête. Fixa son oncle d'un regard appuyé, refusant de baisser les yeux la première. Au bout de quelques secondes, il se détourna, les pupilles toujours aussi pétillantes, et se saisit d'un verre à Martini et d'une bouteille de vodka. Bennett fronça le nez dès lors que le bouchon fut dévissé.

« Qu'est-ce que tu fabriques ?

— Si tu es sérieuse, et mon petit doigt me dit que tu es sérieuse, pauvre folle que tu es, j'ai besoin de quelque chose de fort.

— S'il te plaît, non », implora Bennett d'une voix transformée par la pression de ses doigts sur ses narines.

Elle ne supportait pas l'odeur piquante de l'alcool. N'importe quel alcool. Elle ne manquait jamais de lui monter à la tête, ou de lui provoquer des haut-le-cœur, parfois les deux en même temps. Danny soupira, mais acquiesça d'un mouvement du menton en plaçant son verre à cocktail sous sa machine à café. Bennett l'observa se remplir doucement d'un breuvage plus sombre que les ténèbres elles-mêmes. Le patron du Goodfellas en avala une petite gorgée puis le posa sur le comptoir, disparut, revint quelques minutes plus tard avec deux milk-shake vanille.

CyrielleWhere stories live. Discover now