Chapitre 25 : Itajaí

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Pdv Ricardo

On revient à l'axe principal de l'histoire : Mon cartel.

Comme je l'ai dit à Thaïs précédemment, Ashrab a décidé de faire le fou et de faire exploser un entrepôt non loin de mon territoire, certainement par provocation, mais j'ai l'impression que je devrais creuser le sujet plus en profondeur. Luis est arrivé hier d'Itajaí et j'espère que le billet d'avion que je lui ai payé en vaut la peine, normalement mes hommes ne bougent pas des territoires où ils bossent, leurs terrains, c'est eux qui les surveillent et puis c'est tout.

C'est quelque chose d'exceptionnel, mais apparemment il le faut, ce déplacement est nécessaire.

Je conduis, la route est dégagée, alors je m'amuse, j'accélère, je slalome, et je vois du coin de l'œil que Thaïs apprécie. Ça fait déjà 3 jours qu'elle a appris pour ses parents, et ce n'est pas facile de la voir sourire.

Ce qui me touche bien plus que je ne pensais. Et je sens que j'ai mal quand elle a mal, et je sais que je panique quand je ne sais pas comment gérer, comment la gérer.
Parce que moi, je ne fais pas dans les sentiments, je ne sais pas, je ne veux pas savoir ce que c'est d'avoir mal.

Je suis fort, je suis moi, et personne ne me touche, sauf elle. Et c'est compliqué de comprendre comment elle fait.

Aujourd'hui, elle oublie qu'elle a mal, et je crois avoir trouvé le seul moyen qui me permet de l'aider, la voiture.
La vitesse, c'est son truc, ça la calme, ça l'apaise. Et c'est beau, quand elle va bien, tout est beau.

Elle : tu savais ?

Je sais de quoi elle parle, mais je ne veux pas lui répondre, peut-être que si je me tais, elle aura moins mal ? Je ne sais pas, et ça m'énerve d'être dans le flou. Je dirige, je décide, mais là c'est elle qui fait tout, c'est elle qui mène la danse. C'est comme si on dépendait d'elle, comme si ses humeurs et ses ressentis étaient les nôtres.

Elle : réponds-moi.

Je me suis tourné pour la voir, pour la regarder, et bleu dans marron lui a répondu, je ne dirais rien.
Et c'est fou, comme elle a compris, comme sans un mot, on s'est tout dit.

Et mes yeux sont partis, ils ont quitté les siens pour se poser de nouveau sur la route. Je ne peux pas me déconcentrer, aujourd'hui c'est le cartel, demain ce sera elle.

PDV Luis

Je suis au restaurant, je les attends. Je suis en avance comme toujours, je ne me permettrais jamais d'être en retard, pas avec lui, pas avec le roi.

C'est la première fois que je quitte le Brésil, de toute ma vie je n'ai jamais quitté mon pays, ni ma ville d'ailleurs. La culture du voyage, je ne connais pas, tout ce que je connais, c'est la pauvreté, les billets que j'entasse ne seront jamais les miens, et pour dire vrai, ça me convient, je ne touche que pour donner, pas pour encaisser.

Tout ce que je connais, c'est mon pays, ma ville, mon quartier. Alors quand je vois ces gens rire à l'unisson, au restaurant, en famille, bien vêtus, je dois avouer que je suis jaloux. Ce privilège qu'ils ont, de ne pas devoir tuer pour vivre, de ne pas devoir être sombre comme nous. Je le veux.

Enfaite je ne suis pas jaloux, je suis envieux, ils ont de la chance, eux. J'espère qu'ils s'en rendent compte, que leur bonheur est précieux.

Je me remémore ces moments dans mon quartier, et puis je repense aux morts, toujours eux, ils ne partiront jamais, c'est sûr. Ils resteront là, tapies dans l'obscurité de mon conscient et de mon inconscient. Le seul moyen pour les faire taire, c'est de mourir. Ils finiront par me prendre, moi aussi, et je les rejoindrai, tous ceux que j'ai tués.

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