1ère partie - Chapitre 1

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Il est 10 heures lorsque je suis réveillé par des chants d'oiseaux dans mon nouvel appartement en plein cœur de Paris. Sortir du lit a toujours été le plus difficile pour moi, même à trente-trois ans. Et le fait que ce soit la dernière matinée où je peux me permettre de me lever quand je l'entends ne m'aide pas beaucoup.

Comme chaque matin, la première chose que je fais c'est de regarder sur mon téléphone portable pour voir si Emma, mon ex femme m'a laissé un message et comme chaque matin je suis déçu car elle ne l'a pas fait. Elle me manque terriblement, même si elle m'a quitté pour l'un de mes amis je ne lui en veux pas. Je lui pardonnerai tout, quoi qu'elle fasse, puisque je l'aime.

Ayant assez profité de ma grasse-mat passée devant la télévision accrochée au mur en face de mon lit, je daigne enfin me lever une bonne heure plus tard. Comme à mon habitude depuis maintenant douze jours, je prends ma douche chaude, déjeune au balcon et passe le début d'après midi devant la télévision à boire de la bière tout en grignotant. Cette routine commençait à devenir pesante, la seule fois où je suis sorti depuis que j'ai emménagé dans cet appartement, j'ai été accosté par ma jolie voisine du quatrième qui a prétexté qu'elle avait besoin de mon aide pour monter des courses alors qu'elle était munie d'un cadi — avec lequel elle semblait bien se débrouiller.  Et, pour couronner le tout, il y a un ascenseur dans mon immeuble. Coquine...Je l'ai tout de même aidé, et au plus profond de moi, je sais que je l'ai fait dans l'unique but d'oublier Emma. Je perçois chaque rencontre avec une femme comme une opportunité de passer à autre chose. Je pensais d'ailleurs que ça allait être moins complexe que ça de l'oublier - les femmes me tournent souvent autour et il m'arrive quelques fois de satisfaire mes envies avec quelques unes, mais personne, aucune d'elles n'a jamais retenu mon esprit prisonnier comme le fait si bien Emma. Après quatre années de mariage je pensais que c'était la bonne, mais il faut dire que j'avais tort. Je me dois toute fois de reconnaître que je n'étais pas le mari idéal, je lui en ai fait voir de toutes les couleurs.

Impatient de vivre ma journée du lendemain, je commence à soigneusement ranger mes affaires. Je mets dans mon sac une bonne dizaine de craies de plusieurs couleurs différentes ainsi que de feutres effaçables, dans le cas où le lycée Molière n'en fournit pas. Je prépare ensuite un discours à faire à mes futurs élèves, leur expliquant rapidement qui je suis, d'où je viens mais surtout quelles seront mes méthodes au cour de cette année scolaire. Je finis par opter pour une tenue soft qui me ressemble: t-shirt gris uni, pantalon long noir en jean et des chaussures noires.

Paniqué, je sursaute après un horrible cauchemar dont je ne me souviens déjà plus et lorsque je regarde l'heure, je suis davantage angoissé; il est sept-heures trente et j'aurais dû être debout trente minutes plus tôt. Je ne suis pas en retard mais j'aime tout de même prendre tout mon temps pour me préparer et encore plus pour ma première journée de travail. Putain !
Ma toilette, je la fais à la hâte. Mon déjeuner, je le saute. Ma douzaine d'oranges pressées de la veille me servira d'apport de vitamines. Je la verse dans mes deux gourdes roses aux initiales "E.M." et "T.M". La minute d'après, me voilà le cul posé sur le siège de ma Peugeot 308 noire. Le Sébastien Loeb surexcité en moi est vite agacé par les bouchons du neuvième arrondissement. Je soupire.
Heureusement que j'y avais été plusieurs fois pendant les vacances pour mémoriser la route.

Je soupire à nouveau et manque de donner un violent coup à mon volant. Et pour cause, le parking privé du lycée est bondé. Pu-tain ! Combien il y a-t-il d'enseignants dans ce bahut ? Le stress me gagne et se manifeste par mes jambes qui se mettent à gesticuler et mes oreilles qui se réchauffent. Je patiente. Là, je vais être en retard. Enfin, si je ne renonce pas à ce parking. Aussitôt pensé, me revoilà dans la rue du lycée, en train de faire un créneau sur une place libre.
J'entends une voiture démarrer. Je fronce les sourcils et jette un coup d'œil au rétro. La voiture vient du parking. Ma tête se baisse et j'esquisse un sourire en soufflant d'exaspération. Et la minute qui suit, me voilà à nouveau dans le parking du lycée. Garé dans la place qui vient d'être libérée. C'est gagné !
La sonnerie du début des cours retentit, redescente immédiate sur terre. Je tire un trait sur ma première rencontre furtive avec certains collègues dans la salle des professeurs, n'ayant pas pu assister à la rentrée des enseignants. Coup d'œil à l'emploie du temps qui m'a été envoyé par fax. Salle 303, donc troisième étage. Je ne suis franchement pas ravi.
Tout en essayant de me rassurer, me disant que tout va bien se passer, je monte deux par deux les marches des escaliers de ce spacieux et moderne lycée. Tout ce que j'ai pu distinguer —tant je suis pressé — c'est que les couleurs varient en fonction des étages: vert pour le premier, bleu pour le second et ma couleur préférée, le noir pour le troisième que je suis soulagé d'enfin rejoindre.

Aussitôt, mon attention est portée sur un groupe d'élèves bruyants et mal rangés devant moi. Ce sont sans doute les miens puisque ce sont les seuls à attendre leur professeur en retard dès le premier jour. Sans plus tarder, je me dirige rapidement vers eux et accède à la grande salle dont la porte était déjà ouverte, est-ce normal ? Tout de suite après que le dernier élève soit entré, je les invite à tous s'installer. Et lorsqu'une fois peinard, je pose mes yeux sur ces adolescents, je remarque dès lors plusieurs jeunes filles placées aux premiers rangs qui me contemplent comme si j'étais Brad Pitt. Je souris intérieurement, mon ego flatté par ces yeux brillants qui me reluquent, avant de me présenter:

- Je suis monsieur Muller, Tom, euh...non Thomas, mais appelez-moi monsieur Muller.

- Détends-toi Tommy, me lance une voix masculine que je ne peux localiser.

- Je viens de Londres. J'ai enseigné le français là bas mais à vous ça sera l'anglais que je vais enseigner, continué-je stressé.

- On s'en fout Tommy, ajoute une autre voix masculine que je suis toujours incapable de localiser.

- Je vais commencer par faire l'appel. Adolf Sarah ?

- Présente, énonce la jeune fille blonde devant moi en me faisant les yeux doux, ce qui me flatte à nouveau.

Je poursuis l'appel sous les bruits et le chahut des élèves au fond de la classe que je compte déjà changer de place une fois ma besogne finie.

- Lambert Martin ?

- Là mec ! s'exclame impoliment un blond aux yeux sombres au fond de la classe, entouré de plusieurs garçons.

- Je ne suis pas votre camarade, je préférerais qu'on soit respectueux l'un envers l'autre Lambert.

- Si tu veux mec, rétorque-t-il.

- Je ne suis pas là pour faire de la discipline mons...

Je suis interrompu par une demoiselle qui essaie tant bien que mal de rentrer en douce dans la classe. Ses longs cheveux bruns et lisses ressortent ses yeux très clairs que je ne peux distinguer de loin. Environ 60 kilos répartis dans un bon mètre soixante-dix. Elle me regarde une fois qu'elle réalise que je l'ai prise la main dans le sac et à cet instant, j'oublie que je suis un professeur et la contemple comme une déesse.

- Plutôt mignon le prof, lâche-t-elle en s'asseyant près de Martin au fond de la classe.

Je te retourne le compliment ma belle.

- Et vous êtes ? l'interrogé-je en essayant de rester impassible.

- Amber Lias, juste en dessous de Lambert, répond-elle en me désignant ma liste d'appel, tout en mâchant un chewing-gum.

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J'espère que ce chapitre vous aura plu, c'est ma toute première histoire.

Broken I Where stories live. Discover now