Chapitre 2 : Black, le chasseur

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Elle aurait pu nous tuer tous les deux, son arme est tombée sur le meuble et une balle a traversé un de ses oreillers. Son corps s'écroule dans mes bras, elle ne pèse rien, je la porte sur mon épaule en tirant sur sa robe pour couvrir ses fesses rebondis. Je la fourrerai plus tard, j'ai d'autres choses à faire pour le moment. Je l'emmène chez les Sept et je retourne travailler.
Je n'utilise pas les portes pour sortir du château, avec le nombre de gardes et le nombre d'invités, je serai rapidement repéré et arrêté. Un soupçon de magie et je me retrouve à l'entrée de la Forêt Merveilleuse. Je pose la princesse contre un arbre pour étirer mon dos. J'en profite pour admirer ses traits et vider une canette de soda.
Il n'y a aucun doute sur le fait qu'elle soit la petite fille de Blanche Neige, elles se ressemblent comme deux gouttes d'eaux : brune, de belles boucles naturelles cachées sous les artificielles, des sourcils fins, des yeux noisettes, des pommettes rosées et des abdominaux marqués mais discrets. Ça n'a rien de choquant qu'on l'appelle la salope du Palais Royal, elle possède un corps d'athlète et sait s'en servir.
Je téléphone à l'un des Sept et l'informe de ma venue, s'il n'y a pas d'écueil sur mon chemin, il me faudra environ une heure pour y aller. Il me répond avec un grognement, je raccroche et décale une mèche de cheveux de devant les yeux de la princesse lorsqu'une petite fille vêtue de rouges avec de beaux cheveux dorés me salue.
— Salut, je m'appelle Paris. Ton amie n'a pas l'air bien.
— Elle n'a pas bien mangé ce soir et elle est un peu malade. Je la laisse faire dodo, un peu. N'est-il pas tard pour que tu sortes seule ?
Ce n'est pas la première petite fille que je vois à l'entrée de la forêt, j'y ai déjà croisé des jumeaux, une belle petite blonde sans adulte et un petit garçon qui voulait donner du miel à son ami. Ils ne sont jamais ressortis, des morceaux ont déjà été retrouvés mais jamais les enfants en entier.
— Je vais voir ma grand-mère, elle m'attend, tu m'accompagnes ?
— Je ne peux pas, je dois veiller sur elle. Fais attention aux loups, ils traînent dans le coin en ce moment. Tu n'as pas peur du grand méchant loup ?
— Je n'ai peur de rien.
Toutes les gentilles filles disent qu'elles n'ont peur de rien et finissent par devenir la peur de quelqu'un. April n'a jamais été une gentille fille, elle ne fait peur à personne mais ses peurs restent bien gardées. Je la surveille depuis longtemps, je connais sa peur pour les seringues comme sa peur des mers et océans.
— Alors tu devrais te dépêcher, ils ont prévu de la pluie vers une heure du matin. Je souris en tapant mon poing dans le sien pour lui dire au revoir. Tiens, tu donneras cette pomme à ta grand-mère.
Je frotte la pomme verte sur ma chemise et lui trouve une place dans son petit panier en osier puis reprend son chemin. Elle se fond dans la forêt la plus dangereuse du royaume comme si elle était immortelle. Son courage m'impressionne, dommage pour elle, je siffle attirant les loups de la forêt. Crow et Sky par l'odeur alléchée de chair fraîche ne tardent pas à se joindre à moi.
Sous forme humaine, ils sont bien plus terrifiants que sous leurs formes animales. Ils mesurent l'un comme l'autre deux mètres, ils sont bâtis comme des gladiateurs avec leur peaux sombres et leur crâne rasé à blanc, ils feraient tourner la tête d'April si elle n'était pas dans un autre monde pour les douze prochaines heures. Ils reniflent autour d'eux et posent leurs yeux noirs sur la princesse.
— Tu nous as apporté un cadeau, Chasseur ?
Crow s'accroupît devant la princesse, il frôle son collier du bout des doigts et recule, brûlé par le bijoux en argent. Il porte sa pulpe de ses doigts à ses lèvres alors je le rappelle à l'ordre.
— Pas elle. Elle m'appartient, il y a une gamine de huit ans maximum qui va voir sa grand-mère, je lui ai donné une pomme. Vous ne mangerez pas de biche ce soir.
— Je la préfère elle. Avec un corps pareil, je prendrai du plaisir avant de dîner.
Je sors ma dague et la pointe dans sa direction alors que je me cale entre lui et April.
— Le sang royal est à moi, je vous apporte le souper, soyez content.
— La dernière fois, tu nous a amené trois gros porcs bien gras. Aujourd'hui, tu nous amènes des gamines et demain, à quoi aurons-nous le droit ? Demande Crow saisissant ma lame malgré la brûlure qu'elle cause sur sa peau. Je me ferai un plaisir de te dévorer si on me le demande, Chasseur.
— Il n'y a que toi pour oser kidnapper et droguer la princesse. Appelle-moi quand le palais aura fait exiger ta mise à mort. J'espère qu'elle sera publique. Ajoute Sky avant de faire craquer tous ses os pour se transformer en un beau et gigantesque loup noir.
Il court dans la forêt alors que Crow s'adosse contre une pierre toujours nu. Les loups n'ont aucun intérêt à porter des vêtements donc ils ne le font pas et errent nus entre les arbres.
— Tu vas faire quoi d'elle ?
— Je l'emmène chez les Sept le temps de régler des affaires en cours. Pourquoi t'intéresses-tu à elle ?
Crown ne réfléchit qu'avec son ventre et sa bite.
— Je me demande bien ce que tu ferais d'elle, aux dernières nouvelles, tu préfères ce qui est froid et elle a l'air bouillante.
Je ne bronche pas, il faut qu'il s'en aille, j'ai rendez-vous dans cinquante minutes et j'aimerais bien arriver à l'heure, sinon il sera encore grincheux et je hais particulièrement quand il râle.
— Pourquoi ne vas-tu pas chasser avec Sky ?
— Je n'ai pas très faim ce soir et une princesse passera toujours devant un bon dîner.
Il se contentera des restes de son frère juste pour pouvoir contempler April quelques minutes. Je jette ma canette dans la poubelle et reprends la princesse sur mon épaule pour traverser sur la forêt.
Je zigzague pour éviter les branches ou les morceaux de nourriture. Une odeur nauséabonde de chair en décomposition envahit les lieux depuis ma dernière visite. Un cadavre pourri quelque part et une odeur de peau brûlée qui en réalité s'apparente à de la viande au barbecue.
On dirait que tout va bien ici !
Le loup me suit de près, il est pire qu'un chien de garde. Crow me dirige, son ventre réclame de la nourriture. Il serait capable de tout pour déguster de la viande en ce moment, néanmoins il reste avec moi sans prononcer un mot.
— Tu me stresses, passe devant moi et ouvre moi le chemin si tu veux te rendre utile.
Le loup me double et me guide vers la maison des orphelins, en me faisant passer par d'étroits chemins et des routes bloquées par la nature sauvage. Je gagne dix minutes quand j'arrive à la porte.
L'avantage d'avoir fait la route avec un homme qui passe sa vie dans la nature est qu'il connaît tous les raccourcis par cœur. Les Sept vivent à la sortie de la forêt, suffisamment près pour chasser et se nourrir mais assez loin du château pour pouvoir vivre loin de la société.
Je toque à la porte qui s'ouvre sur le plus grincheux des orphelins. À en croire les perles sur son torse et le sang sur ses mains, j'interromps quelque chose. Il lève les yeux au ciel, ouvre la porte d'un léger coup de pied et va se laver les mains avant de pointer du doigt une chambre. Je dépose la princesse dans le lot et quitte la pièce avec un cadre de grincheux et ses amis.
Je le balance sur la cuisine en remarquant le morceau de bœuf qu'il était en train de couper. Avec un morceau pareil, c'est tout l'orphelinat qu'il pourrait nourrir. Au lieu de ça, il donne un morceau à Crow et met les autres morceaux dans le frigidaire. Son bras droit, Kane, s'immisce dans notre conversation une cigarette entre les lèvres.
— Crow, que nous vaut l'honneur de ta présence ici ?
— Je voulais te souhaiter un bon anniversaire donc quand j'ai su que le chasseur venait ici, je l'ai accompagné.
Aucun des orphelins ne connaît la date précise de sa naissance, ils savent l'année et le mois mais ils le fêtent le quinze du mois. Il serre le loup dans ses bras, ses cheveux décolorés blanc le font paraître plus vieux que ce qu'il est en réalité.
— Black, quoi de neuf ?
— Il en a apporté une autre donc j'attends qu'il donne la liste complète de règles avant de le mettre à la porte. Réplique le brun en rinçant son couteau. Prénom ?
Grincheux est d'une humeur massacrante ce soir, je l'ai connu en meilleure forme et plus respectueux.
— Elle s'appelle April.
Kane pivote lentement vers le boucher alors que je décapsule une bière.
— Mais encore ?
— Vous devez la garder deux mois, j'ai des affaires importantes, je voudrais la retrouver vivante et avec tous ses membres de préférences.
Ils n'ont pas gardé, la dernière fille que je leur ai confiée, très longtemps. En deux semaines, elle avait été tuée parce qu'elle ne plaisait pas à grincheux. Ça devrait aller cette fois.
— Pourquoi ?
— Parce qu'on ne torture pas une princesse. Rétorque Kane à son ami. J'ai tort ?
Celui-ci sait tout sur tout, je l'apprécie autant que le feu aime l'eau.
— Effectivement. Où sont les autres ? Autant répéter les règles qu'une seule fois.
— Ils dorment, laisse-les dormir. J'ai passé des heures à les mettre au lit tellement ils étaient énervés donc balance les règles. Je me ferais un plaisir de les répéter demain matin. Aboie le brun d'un ton sec.
— D'accord, papa. Je soupire, les règles restent classiques, on ne la tue pas, on ne lui coupe rien, on ne la laisse pas partir, on ne lui fournit pas de clopes, on ne lui sert pas d'alcool, on ne lui donne pas d'armes et surtout on ne la touche pas. Aucun de vous ne posera ses mains sur elle, aucun de vous ne l'embrassera, aucun de vous ne la baisera. Ai-je été clair ?
Ces deux-là respecteront les règles, je n'en doute pas. J'ai moins confiance en celui qui s'amuse de tout, le simplet et celui qui est malade en permanence. Grincheux demande à Monsieur Je-sais-tout d'aller changer April. Kane obéit aux autres, il ferme la porte et ajoute des vêtements à la princesse. Il ressort vingt minutes plus tard avec la robe transparente.
— Je te la laisse ou on la garde ? Elle est jolie mais ne couvre pas grand chose.
— Donne-la moi, je l'emmène avec moi au royaume du milieu.
Je mets la robe dans mon sac à dos, bois une gorgée de bière et toise les deux orphelins. Crow sourit, il lave son assiette puis se dirige dans la salle de bain.
— Il a libre accès à votre maison, maintenant?
— Il va prendre une douche et terminer sa nuit dans la chambre de Lane, ça arrive toutes les semaines. Si Lane l'autorise à venir alors pourquoi pas l'autoriser à prendre une douche. Il sent le chien mouillé.
— Je vous entends. Grogne le loup de la salle de bain.
Il claque la porte, je finis ma bière et la mets dans le bac à bouteille. Je fais craquer ma nuque puis mon dos.
— Je reviens dans deux mois, je la veux en un seul morceau. Si l'un de vous la touche, je l'émascule et fais bouffer ses couilles à Sky et Crow.
— On a compris, maintenant dehors. On n'a pas très envie de te voir ici et on commence à fatiguer donc si tu peux te dépêcher ce serait cool.
Il me met à la porte comme un malpropre. Je sors et disparais.

Ni cœur, Ni âme (1)Donde viven las historias. Descúbrelo ahora