Chapitre 8 : April, la princesse

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Un grognement et la vibration du mur me réveillent. Je frotte mes paupières puis me redresse dans le lit quand je vois Tate suspendu au-dessus du sol, un filet de sang sur le menton, Nate le tient fermement par la gorge et n'a pas l'air de vouloir le lâcher. Les deux hommes ont un regard noir l'un envers l'autre.
Je n'ai pas beaucoup communiquer avec Nate, à chaque fois que j'engageais la conversation il partait faire je ne sais quoi.
Le plus mystérieux des deux envoie mon partenaire de sieste dans le mur à côté de moi. Tate vole et percute violemment la table de chevet. La lampe se brise en suivant le bras du militaire. Mon cœur bat à toute vitesse alors que je fusille du regard l'homme qui ne porte qu'une serviette devant son lit.
Je n'avais jamais vu un regard aussi démoniaque auparavant, on dirait qu'il vient de quitter les enfers pour posséder quelqu'un. Ses phalanges blanchies contrastent avec le sang qui se répartit sur sa main. La vue me paraissait si belle avant de voir le sang, des abdominaux marqués, une serviette basse sur ses hanches, une fine ligne de poil qui remonte jusqu'à son nombril.
Je détache mon regard de lui et me décale dans le lit pour voir Tate, son visage saigne bien plus que je ne l'imaginais. Son œil à double de volume, sa lèvre, son nez et sa joue saignent. Son dos a été réduit en charpie par le verre brisé des cadres derrière lui. Il va avoir besoin de points de suture et de beaucoup de glace. Je descends du lit lorsque j'entends un rictus derrière moi.
Je lance un regard assassin à Nate qui fait les cent pas derrière moi, les poings sur les jambes alors que les autres observent la scène sans agir. Se croient-ils au cinéma, devant une projection?
— Tu n'avais qu'un boulot, Tate ! Ne pas coucher avec la prisonnière. Même ça tu en as été incapable, tu m'étonnes qu'Harper est venue ramper et me supplier de la baiser.
Il a couché avec la copine de Joyeux et il ose lui faire la morale pour ce qu'il croit qu'on a fait. J'attrape un bout de verre au sol lorsque le blessé empoigne mon bras pour me convaincre de ne pas tenter une rébellion stupide contre Grincheux.
— Il te tuera. Me prévient-il
— Alors il risque plus que moi dans cette histoire. Je relève en faisant face à l'homme qui sent dangereusement bon.
Il garde la tête haute, évite mon regard mais parvient à saisir mon poignet avant que le verre entaille sa peau. Il tord mon poignet, je serre les dents et lâche le bout de verre qui m'a beaucoup plus blessé que lui. Il baisse finalement les yeux et il agrippe ma gorge avec sa large main pour me plaquer sur l'armoire derrière moi.
Il appuie sur ma gorge, j'ai mal, des perles de sueur coulent sur mon front. Je ne pleurerais pas à cause d'un homme, hors de question de lui donner cette victoire. Il penche mon visage avec son pouce, je sens son souffle aromatisé à la tequila sur ma peau. La chair de poule s'empare de ma peau alors que ma vision se réduit.
— Il va falloir que tu retiennes un truc, ma reine. Ici, tu n'es rien d'autre qu'une détenue. Tu n'as aucun droit et on n'est pas à tes ordres. Tu peux corrompre les plus faibles d'entre nous mais je ne céderai pas à tes caprices. Fini la bouffe à volonté, fini la visite des pièces de la maison, fini le contact avec ton nouveau gigolo. Il y a des règles ici.
— Pas d'alcool et de sexe. Je pouffe, il faut montrer l'exemple, on ne te l'a jamais dit.
Il va me tuer, il me hisse à cinq centimètres du sol et me tire vers lui puis me cogne brusquement contre le meuble. Le feu se répand dans mes veines alors que l'odeur de sang titille mes narines.
— Provoque-moi autant que tu veux, tout ce que tu gagneras c'est une humiliation. Je vais te faire pleurer, sangloter, souffrir à en devenir folle.
Je lui crache au visage et il réitère son geste en me faisant percuter la porte du meuble encore plus fort. Ma tête bascule d'avant en arrière et l'odeur de sang s'intensifie.
— Tu viens de signer ton arrêt de mort, Kleine klootzak.
— Tu as dit quoi?
— Tu seras le premier exécuté quand je retournerai au château.
— Je crois que tu n'as pas compris un truc, tu ne retourneras jamais vivante au château. Black te tuera si je ne le fais pas avant. Tu avais une chance de survivre mais tu as préféré être une salope ingrate.
Il relâche sa prise, je me trouve au sol et je tousse alors qu'il quitte la pièce en claquant la porte. J'ai toujours la sensation de sa main autour de mon cou, une partie de lui est toujours présente dans la pièce. Cet homme est un putain de fou et cela le rend si effrayant.
Je m'allonge au sol sur le dos malgré le verre, je ricane nerveusement pour ne pas pleurer. Tate se décale jusqu'à moi, il tend ses jambes et pose ma tête sur ses cuisses en essuyant les restes d'une lutte que j'ai perdue, les larmes incendient mes yeux.
— Tu saignes, ma jolie.
— Hmm.
— Il n'est pas aussi méchant d'habitude, il doit avoir une dent contre ta famille ou Soléne lui manque, je ne sais pas. Il ne recommencera plus, il va aller se détendre et demain il devrait avoir oublié.
— Ça m'étonnerait.
— Tu devrais prendre un café pour ne pas t'endormir tout de suite. Tu risques d'avoir une commotion, étant donné la force qu'il a utilisé, ça ne serait pas choquant.
— Tu devrais plutôt t'inquiéter pour toi.
Ce n'est pas la première fois qu'on me menace en un mois, ça doit être la troisième ou quatrième fois. Je malaxe sa cuisse jusqu'à obtenir la texture parfaite pour pouvoir y caler sa tête sans poser la partie qui me fait le plus souffrir. Il sourit alors que j'enlace mes doigts avec les siens, ce simple contact me fait oublier un petit pourcentage de mon affliction.
—Ma jolie ?
— Oui ?
— Merci pour cette nuit, ça faisait des années que je n'avais pas aussi bien dormi.
— Ne me remercie pas, tu as une gueule de cadavre.
— Ah ! Ah ! Ah ! Très drôle.
— Je suis toujours très drôle.
— Drôle ou non, vous avez besoin de soin. L'un à gauche et l'autre à droite, maintenant ! Exige le faux blond de la salle de bain.
Je prends mon temps pour me poser sur mes fesses, je gratte ma tête et du sang se glisse sous mes ongles. Mes cheveux sont poisseux à cause de la coagulation. Tate va taper dans la main de son frère et s'adosse au bureau. Kane trempe une compresse de désinfectant puis tapote sur le visage du militaire qui fronce les sourcils.
— Que tu es douillet, c'est juste du désinfectant.
— Juste en dessous de mon œil, occupe-toi d'elle d'abord.
— J'aimerai bien mais Nate a été très clair, elle passe après nous.
Au ton qu'il aborde et à la réaction de Tate, j'imagine qu'aucun des deux n'est d'accord avec la nouvelle règle qui a été instaurée.
— Depuis quand obéis-tu à Nate ?
— Depuis que je sais qu'il la voit comme un poison. Il n'a jamais agi de la sorte avant son arrivée.
— Parlez de moi comme si je n'étais pas là. Je chuchote puis m'allonge sur le lit. Je suis fatiguée.
— Ne t'endors pas! hurlent-ils à l'unisson.
Je ne compte pas dormir, juste me reposer quelques secondes. Il fait chaud dans cette chambre depuis que je suis réveillée.
— April ne t'endors pas.
— Je ne vais pas m'endormir. Prends soin de mon militaire préféré.
Kane désinfecte le reste du visage de Tate puis lui fait un pansement sur le front avant de fermer la plaie sur sa joue. Mon nouvel ami vient déposer un baiser sur mon épaule en glissant un paquet de cigarettes dans mes mains en cas d'urgence. Je le remercie et il s'en va.
Kane me somme de m'agenouiller au sol pour qu'il soigne mon crâne. J'obtempère et il vient s'installer sur le lit. Bien placée entre ses jambes, je regarde ma tête dans le miroir de l'armoire, Tate a de bon goût en matière de sous-vêtements en dentelle, le bleu et le jaune me vont bien.
Le puissant faux blond divise mes cheveux en deux et applique le coton imbibé d'alcool sur mon crâne. Je retenue mes larmes, tandis que le sang coagulé de ma peau se détache. En douceur, il y va, se pinçant les lèvres lorsqu'il se concentre.
— Tu as besoin d'un point de suture, je devrais avoir ce qu'il faut pour le faire dans ma chambre.
— Nettoie juste, ça devrait aller.
Je préfère rester en sa compagnie avant que Nate remette les pieds dans sa chambre. Il m'a l'air particulièrement grognon et j'aimerai éviter qu'il m'assassine.
— Dis-moi, tu n'as pas couché avec Tate ?
— On a partagé un lit mais c'est tout. J'avais envie de compagnie, je dois avouer que j'ai très envie de baiser mais pas avec Tate.
Mon corps réclame juste du sexe mais s'abstenir ne me ferait aucun mal. Kane m'impressionne énormément, ça le met dans la catégorie a tenté si l'espèce humaine s'éteint. Si on était les deux derniers humains sur terre, je ferais des enfants avec lui. Sauf, si je teste la marchandise avant.
— Tu es assise sur ton talon, ça doit être désagréable.
C'est nécessaire pour me toucher sans montrer que je ne touche. Quand je repense à ses doigts autour de ma gorge et à sa menace, ma chatte devient aussi glissante que les vagues en Australie.
— Ça ne l'est pas, au contraire.
— Pourquoi fais-tu ça?
— Ne demande pas.
— Je te le demande. P'tit coeur, pourquoi?
Je vois ses yeux pétiller comme des bulles dans le champagne, je me mets debout, attrape sa main et faufile ses doigts entre la culotte et mon clitoris. Il dessine des ronds autour de mon bouton qui grossit à son contact. Il vérifie les portes et m'attire vers lui. À califourchon sur ses jambes, il n'arrête pas les mouvements de ses doigts mais dégrade le soutien-gorge en vitesse. Mes seins au niveau de son menton, il respire de plus en plus vite pendant que j'ouvre sa braguette.
Il enveloppe mon téton de ses lèvres et suçote. Je tremble, gémis en silence et me cambre sur lui. Il me terrifie, ce qui le rend cent fois plus attirant, il a juré de me retirer ma capacité à marcher, je veux qu'il me montre ce dont il est capable. Il n'a pas le droit de me toucher mais il introduit deux doigts en moi. Je lui mords l'épaule pour ne pas crier, mon corps suit le rythme de ses doigts.
— Je croyais que j'étais une prisonnière.
— C'est ce que tu es, tu es si ...
Il m'embrasse, je lui rend son baiser avec force, je veux sentir ses lèvres sur les miennes encore et encore.
— Nate va te tuer.
— Possible.
Je me relève et lui montre la porte.
— Il faut que tu partes.
— Quoi ?
Les larmes aux yeux, les mains tremblantes, je lui répète de sortir. Il remet ses vêtements et caresse mon visage pour effacer ma larme.
— Pourquoi pleures-tu ? Je te dégoûte tant que ça ?
Je secoue la tête, je n'ai aucune idée de la cause de mes larmes, il m'attire, il m'excite. Pourquoi je pleure ? Pourquoi l'ai-je arrêté?
— Ce n'est rien, de toute façon je n'ai pas le droit de te toucher.
— Kane, pourquoi est-il si ...?
— Il a bu, ce n'est rien. Ça va lui passer. On va t'enfermer à double tour à sa demande donc si tu veux faire pipi, je te conseille d'y aller dès maintenant.
— Je n'ai pas envie d'aller aux toilettes, je veux courir.
— Je te sortirai de là, si tu promets de ne pas faire décapiter mes frères pour leurs comportements
— Je ne décapite que les gens qui veulent s'en prendre à ma famille. Ton frère peut me frapper, m'humilier, me défigurer, du moment qu'il ne s'approche pas de mon père et de ma mère.
Je ne fais pas partie de la famille royale, personne ne me considère comme une princesse et encore moins moi. Je ne veux pas diriger un royaume ou apparaître parfaite comme eux. Je veux pouvoir coucher avec Kane sans me limiter puisqu'il le veut et pas parce qu'il s'y sent obligé.
— Tu es la princesse April.
— Juste April, votre prisonnière sexy.
— Qui a un piercing autour du clitoris. Complète-t-il
Il y a beaucoup de rumeurs au sujet des bijoux qui ornent mon corps, je ne le cache pas, j'ai quatre piercings, fais par trois perceurs différents.
— Kane, Nate a besoin de capote. Je peux ...débute Vale en poussant la porte de la chambre. J'interromps quelque chose?
— Non, j'ai vérifié qu'elle n'avait pas trop de blessure sur le dos. Tu peux remettre ça, j'ai fini. Les préservatifs sont dans le premier tiroir de la salle de bain, s'il n'en a plus dans sa boîte, il n'a qu'à moins se taper de pute.
Kane s'en va, il me laisse le soutien-gorge puis sort en verrouillant les portes à double tour. On m'enfermait souvent dans ma chambre quand j'étais petite, mes caprices rendaient ma mère folle et mon père absent a demandé à Rosie de me canaliser en me bloquant dans une pièce et en me privant de mes jouets.
J'en faisais des cauchemars, je me cachais sous le lit pour ne pas voir les peintures bouger. Ma grand-mère adorait les fresques et il y en avait une dans ma chambre. J'étais en sécurité sous mon lit, jusqu'à ce que le monstre dans mon placard m'y extirpe. On me punit toujours de la même manière depuis mes quatre ans, je supporterai quelques semaines dans une chambre sans rien.
Un simple crayon pourrait me distraire plusieurs jours, je ne suis pas compliquée et j'ai l'habitude de subir des punitions exagérées pour des choses que j'ai faites ou non. Un livre compte minimum quatre heures de lecture, le plus fin fait trois cent pages et le plus gros sept cent pages, je dois avoir cinq ou six jours de lecture donc ça ne me pose aucun problème. J'ai des clopes et du feu, ce n'est pas une réflexion mais une pause pour méditer.
Ils ne me briseront jamais !

Ni cœur, Ni âme (1)Where stories live. Discover now