Chapitre 10 : Tate, le joyeux

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Adossé à la porte de la chambre de Nate, je mange un sandwich en lisant les pages et les pages qu'April a écrit ses deux derniers jours. Elle a écrit l'histoire d'un couple adolescent de cannibale dans un royaume sans princesse. Sa rancœur envers les hommes transparaît à travers son œuvre, elle pourrait être publiée avec ses histoires. Une telle critique du patriarcat reversera la monarchie, sans aucun doute. Elle a du talent mais elle ne l'exploite jamais à bon escient.  
— Alors qu'en penses-tu ?
— C'est gore, porteur de message, c'est prometteur. Tu devrais continuer à écrire, je veux voir le moment où Salomé reprend le dessus sur son mec.
— Elle ne le reprendra pas, elle mourra à cause de la peur.
Elle m'a gâché de bonnes heures de lecture pour me donner une nouvelle si peu réjouissante.
— April, tu as déjà eu une dispute avec le roi ?
— Oui mais il reproche toujours à ma mère de m'avoir légué contre lui alors que je suis juste une version féminine de lui. Tout ce qu'il déteste chez les femmes, je m'en suis imprégnée. Je le détruirai un jour, il remarquera le monstre qu'il a créé. J'ai du sang sur les mains, il manque juste le sien.
— Tu as tué quelqu'un ?
— J'ai fait tuer des gens, c'est approximativement la même chose.
J'ai vu une femme se vider de son sang sans réagir, pourtant je ne l'ai pas tué.
— Ça n'a rien à voir. C'est comme vouloir coucher avec quelqu'un et le faire. Faire assassiner quelqu'un c'est du stade trois et le meurtre du stade cinq, ton texte c'est du stade sept ou huit.
— Le sexe et le meurtre n'ont rien en commun.
— Si, y'en a toujours un qui supplie l'autre de finir.
Elle rit.
— Tu supplies les hommes de te faire jouir, toi ?
— Si je dois le demander c'est qu'il n'est pas assez doué donc je me fais jouir toute seule.
Indépendante, elle va même jusqu'à contrôler ses orgasmes. Elle suppliera bien un homme un jour, j'en suis sûre.
— Devant lui ?
— Le palais est ma maison, j'y fais ce que je veux. J'en ai déjà attaché certains pour leur montrer comment faire et vérifier qu'ils regardent.
— Tu les tortures en te masturbant devant eux.
— Ils retiennent la leçon et ils n'osent rien dire.
— Tu es malicieuse.
— Je suis joueuse et le spectacle n'a pas l'air de déranger. Toi aussi, ça t'aurait plu.
Sans aucun doute, je l'ai vue nue et en sous-vêtements, je peux lui promettre qu'un spectacle aussi stimulant ne me laisserait pas indifférent.
—Tu n'étais pas là cette après-midi.
— Tu me surveilles ?
De sa chambre, ça doit être compliqué.
— Nate a passé la journée à grogner et Kane a mentionné que tu es allé voir Vale. Il bosse dans quoi ?
— Vale ? Il est travailleur du sexe.
— Tu es allé ouf une pute ? Je ne pensais pas que tu étais ce genre de gars.
— Je n'ai pas couché avec elle, on a juste discuté. Ce n'est pas qu'elle ne m'attire pas mais j'ai vu une princesse toute nue.
— On ne couchera pas ensemble, baisse tes standards. S'esclaffe-t-elle de l'autre côté de la porte.
Je sens la chaleur de sa présence et elle glisse une nouvelle feuille que je récupère. Un crayon roule jusqu'à ma main quand je lis : « Papier confidentiel à brûler ».
— Que veux-tu qu'on écrive là-dessus ?
— Raconte-moi comment tu as rencontré Harper et je te dirai ce que je pense de chacun de vous. Il risque d'y avoir du croustillant.
— Reprends le papier, je vais te le dire à voix haute. Tu écris, je parle. As-tu un stylo ?
— Oui, envoie le papier. Vas-y, tu peux me raconter.
Je prends une grande inspiration et croque dans mon sandwich. J'essuie ma bouche puis me remémore l'orphelinat.
— Elle est orpheline, on vivait dans le même orphelinat, au même étage. Quand je me suis enfuie, on s'est éloigné et à dix-huit ans, elle a été mise à la porte. Elle a su pour notre condamnation et elle est venue, on s'est quitté à nouveau puis après l'école militaire. On a commencé à coucher ensemble, on ne s'est pas quittés les deux premières semaines puis on se voyait le soir puis deux fois par semaine. Un jour, elle a voulu me voir donc elle est passée ici mais est tombée sur Nate. Ensuite, on se voyait qu'une fois par semaine.
— Nate lui a fait quoi, ce jour-là ?
— Aucune idée, il a cet effet là sur la plupart des femmes, toi y-compris. La façon dont tu l'as regardé, elle le regarde de la même manière.
— Il a tenté de me tuer, tu crois qu'il a essayé de la tuer ?
— C'est du désir dans tes yeux, pas de la peur.
— Je ne possède aucune peur.
— C'est un mensonge ridicule, tu as des peurs mais Nate ne t'effraie pas.
— Nate est un enfoiré qui t'a défoncé le visage et qui m'a éclaté le crâne sur son armoire. Y'a une odeur de sang dans la pièce, tu n'as pas idée d'à quel point c'est désagréable.
L'odeur du sang peut engendrer une folie passagère, Kane a connu une phase de folie provoquée par sa présence constante avec du sang. 
— Nate te plaît ?
— Physiquement ou mentalement ?
— Physiquement.
— Oui mais vous m'attirez tous si on parle de physique, même avec ta gueule de bossue.
— Super compliment. Je ris et vois Pade sortir de sa chambre en pyjama. Salut, bien dormi ?
— Tu parles à une porte ?
— SALUT PADE !
— Nate va te tuer s'il apprend que tu parles avec elle.
— On s'en fou, il est parti. L'informe April, assieds-toi avec nous. J'ai bientôt fini d'écrire, ça pourrait t'intéresser.
— Elle fait quoi ? Baille-t-il en allant chercher une canette de soda dans le réfrigérateur.
— Elle rédige un récit très intéressant sur ce qu'elle pense de nous. Oh et elle a dit qu'on était beau-gosse.
— Tu nous trouves sexy, April?
— Oui sauf que tu dors beaucoup trop. Rétorque-t-elle sincèrement, j'ai fini !
J'attrape le bout de papier et débute ma lecture.
Vale, discret, beaucoup intelligent qu'on ne le pense, il se cache derrière son silence pour ne pas laisser les gens entrer dans sa tête, probablement victime d'abus de la part de personnes à qui il faisait confiance. Mignon mais trop usé par la vie. Catégorie 3 !
Elle a étudié la psychologie humaine, elle sait tant de choses en une semaine avec nous, elle a presque tout bon.
Dave, timide et malade, croit aux histoires d'amour sincère, il se montre toujours agréable pour cacher la crainte qu'il ressent. La mort l'entoure, la faucheuse son ami l'empêche de se créer une relation avec les autres. Sa bouche est pulpeuse et rose mais je ne le range pas dans la catégorie de personnes attirantes mais trop effrayées. Catégorie 4 !
Elle a des catégories pour trier les gens, Dave est dans la catégorie la plus basse. Il y en a d'autres en dessous mais aucun de nous ne s'y situe.
Pade, gros dormeur, gros dragueur, impuissant face à Kane et Nate. Il est très sexy, il partage ses médicaments mais en veut à Tate d'être venue me voir quand je faisais un cauchemar. Je ne lui en veux pas d'avoir ris de ma réputation. Catégorie 1 !
— C'est quoi les catégories?
— Tu en es à qui ?
— Pade.
Elle ricane, Pade intrigué s'installe contre le mur.
— Haut potentiel au lit et forte chance de finir dans mon lit.
— Quand tu veux mais pas avant que Black te récupère. Laisse-moi voir ça.
Lane, gay refoulé, amoureux de Pade, me déteste, je le déteste aussi. Pas d'émotion pour lui et pas de lien.
Simple et efficace!
Tate... j'espère que ça va être interessant, encore amoureux d'une femme qui la repoussait, cherche une relation de sauveur/victime, très sexy, tatouage dans le dos très impressionnant qui mérite d'être agrandi. Très bon ami, catégorie 3 !
— Sérieux, Pade passe avant moi ?
— Harper, chéri.
— Ma jolie, tu abuses.
— L'amitié est plus importante que le sexe, notre relation durera plus longtemps que celle que je pourrais avoir avec Pade. Ce n'est pas contre toi, Dormeur.
— Coucher avec une princesse est bien plus gratifiant.
Kane, prof, sombre, gigantesque, voix qui me fait trembler, main douce et veineuse qu'il enroule autour de ma gorge avec retrait et passion. Toutes ses menaces sont des promesses, il sait garder les secrets et se faire entendre. Il a un cœur, il a une âme et des doigts de fée. Catégorie 1 !
— Tu pourrais coucher avec Kane ?
— Tate, regarde la suite. C'est hilarant.
Nate, psychopathe, brisé, violent, corps de rêve, grognon, sensible et tatoué. Il agit comme un abruti, il ne contrôle ni sa force ni sa consommation d'alcool. Des yeux perçants, il est provocateur, autoritaire et strict. Parce qu'il me considère comme autre chose qu'une princesse, catégorie 2 !
— Nate est plus haut que toi alors qu'il lui a ouvert le crâne. Explique tes catégories, chérie. Je veux savoir quelle est la distance entre Nate et moi.
— Ça dépend, combien mesure sa bite ?
— Ça tu le découvriras s'il ne te tue pas. Il y a des options : soit il te tue pour ne pas te toucher, soit il va te déchirer la chatte avant de te tuer.
— Écoutez les gars, les catégories sont temporaires. Tate, tu es derrière uniquement parce que je préfère rester ami avec toi. J'ai envie d'une putain de clope. Faut que j'aille faire pipi, l'un de vous peut m'ouvrir. J'en ai pour cinq minutes, s'ilvous-plaît !
— Je vais lui ouvrir.
— Moi d'abord.
On court et on lui ouvre la porte. Elle porte un des t-shirts de Nate, il va la détester s'il l'apprend. Elle va aux toilettes alors que je lui tends une cigarette et Pade le briquet. Elle attend qu'on sorte pour uriner, on entend tout mais elle a plus d'intimité comme ça.
— J'ai fini. Dit-elle séchant ses mains propres sur la  serviette de Pade. Vous ne voulez pas discuter un peu dans ma chambre ou vous restez dehors ?
— À minuit les gars rentrent.
—Tate, non. On va rester à la porte, retourne dans la chambre qu'on t'enferme.
Rabat-joie !
Il solidifie les barreaux de la prison de la princesse, je me claque contre la porte et m'installe en tailleur devant celle-ci. April est ma seule amie féminine, Harper m'a trahi et je n'ai jamais eu d'autres amies sauf les six autres Sept.
— Ne fais pas ça.
— De quoi parles-tu ?
— Il te défend de tomber amoureux de moi. Pour lui, l'amitié homme-fille n'existe pas.
— Il veut te sauter donc il ne peut pas être ton ami. Analyse mon frère, vodka ?
— Non, je préfère rester sobre.
— Pourquoi ? As-tu peur de ne plus contrôler tes bas instincts en la présence de la jante dame ? Viens chercher ton shot.
Je lève les yeux au ciel, avale mon shot et brûle le papier avec le classement avant d'en avoir un nouveau sous la porte. Pade l'intercepte puis me le tend, le papier m'est destiné. « Parlez-moi de Black, de Nate et de  Kane, s'il-vous-plaît. » Rien de ce que l'on pourrait lui dire ne la confortera. Tout ce que peut lui apprendre la détruira.
— C'est une mauvaise idée, ma jolie.
— Pourquoi ? J'ai le droit de savoir des choses sur l'homme qui m'a drogué et qui a probablement tué ma meilleure-amie, sur l'homme qui a menacé de me paralyser et sur celui qui a failli m'assassiner alors qu'il n'avait qu'une serviette sur ses hanches.
— Ils ont un point commun, ils sont tous les trois des tueurs. Je dévoile en brûlant ce papier. Ne le demande jamais et arrête de te rebeller, ça va les inciter à frapper plus fort.
— Développe.
— Ne me donne pas d'ordres et ne me parle pas sur ce ton. Tu n'es pas au palais et tu n'as pas de couronne ici. C'est déjà un miracle que tu aies encore tes bijoux. Grondai-je avant de remplir une demi-douzaine de fois mon shot. Pour une fois, j'essaie d'aider donc écoute-moi.
— Pourquoi me protèges-tu? Je n'ai pas besoin de toi.
— Bien sûr que si, tu as besoin de moi. Si je n'étais pas là, Nate t'aurait fait exploser le crâne l'autre soir. Ils n'ont pas de pitié. Pour eux, c'est un boulot. Tu n'es qu'une monnaie d'échange, soit ils te vendent entière, soit ils te vendent pièce par pièce.
Quand ils décident de faire pièce par pièce, on entend les hurlements à travers toute la maison. Des cris déchirants qui brisent nos cœurs, sans parler des supplications, des pleurs. Elles sont si jeunes à chaque fois, le pire moment est celui où elles ne se battent plus. Elles se laissent faire espérant la clémence. Elles ne pleurent plus, elles croient en Dieu alors qu'il les a abandonnées à une situation pareille.
Je les entends encore hurler, j'entends encore leurs cris et leurs pleurs. Ça doit sortir de ma tête, tout se mélange, j'ai tué quelqu'un, elles sont toutes mortes, il est allongé sur le sol, elles reposent loin de leurs familles et de leurs amis, les morceaux sont éparpillés partout sous mes pieds.
Une profonde brûlure me ramène au moment présent, April me serre dans ses bras et éloigne mes mains de mes oreilles, mes yeux remplis de larmes sont identiques à la falaise. Mon cœur tambourine dans ma poitrine si fort qu'il me fait mal. Pade l'a fait sortir pour qu'elle soit avec moi et ça m'aide. Je lui présente mes excuses alors qu'il boit directement à la bouteille.
— Raconte-moi, tu as besoin de parler, Tate.
— Il pense à son frère, il n'en parlera pas. Console-le et retourne dans ta chambre, j'ai besoin de prendre l'air.
Pade n'était qu'un gamin, comment peut-il s'en souvenir. April grimpe sur moi pour bloquer mes jambes, la simple odeur de son parfum me fait du bien.
— Je suis désolée d'avoir autant insisté.
— Ce n'est rien, ça arrive de temps en temps, j'ai des coups de mou mais ça passe toujours.
— Regarde-moi, Tate.
Je plante mes yeux dans les siens alors qu'elle passe ses mains dans mes cheveux.
— Tu es monté d'un catégorie, ne te mets pas dans un état pareil pour le passé ou l'avenir. Ne t'inquiète pas pour les autres, faut être égoïste pour s'en sortir dans la vie.
— Ça fait huit ans que je suis égoïste, je veux t'aider. On a laissé beaucoup trop de cadavres sur notre chemin. On ne tuera pas la future reine de ce royaume.
— Juste April. Je ne suis pas une putain de princesse et encore moins une reine. Ça fait trois ans que je montre à tout le monde que je serai une reine pitoyable. Comment peux-tu croire que j'ai une chance d'accéder au trône ? Je ne suis qu'une salope qui rêve de liberté que sa naissance n'offre pas. Je veux être institutrice, pas porter une couronne. Je me sens bien et je me battrai pour ma vie s'il le faut, je suis coriace.
Ça, c'est vrai. Je ris et essuie la perle d'eau salée qui coule du coin de son œil.
— J'ai perdu toute chance de coucher avec toi en pleurant ? Je demande pour détendre l'atmosphère.
— Pour l'avoir perdu, il faudrait déjà l'avoir eu mais ce n'est pas le cas. Allez viens, on va dans la chambre.
Je prends toute la place sur le lit alors qu'elle attrape un bouquin dans le tiroir.
— J'ai écris sous le livre sous le nom de CCCoven quand j'avais quinze ans, quelqu'un l'a annoté.
— Nate annote ses bouquins favoris, il doit aimer ton écriture.
— Je ne dirais pas ça, c'est le cul qu'il a surligné. Remarque-t-elle en tournant rapidement les pages. Je croyais aux anges gardiens et en mon père à l'époque, ce n'est qu'un tas de conneries sur une fille qui pensait que l'amour et la magie étaient réels. Tu n'es pas le seul à avoir le cœur brisé sauf que j'avais seize ans et pas vingt-quatre. Nate n'est pas un monstre, les monstres ne veulent pas faire ressortir l'espoir et la redemption dans un bouquin de merde. Tu crois qu'il me tuera vraiment ?
— C'est simple, il est tiraillé entre deux mondes, le désir et le devoir. Tu représentes le désir et le devoir en même temps. C'est comme être au milieu d'un désert, de devoir choisir entre la nourriture et l'eau chacun que notre estomac crie famine et que notre bouche est aussi sèche que le sable à nos pieds. L'un ou l'autre, il faut choisir et il ne peut pas choisir. Il se laisse tiraillé jusqu'à faire disparaître le dilemme ou jusqu'à perdre la tête.
— Pourquoi commencer une phrase par « c'est simple » alors que tu fais un développement derrière ?
— Pour faire parler les princesses, ça fonctionne. En gros, soit il se détruit, soit il te démolit.
Elle roule ses cheveux dans ses doigts puis jette un coup d'œil sur le balcon.
— Il est au téléphone, qui peut-il appeler à ...
— Vingt-et-une heures, la totalité de ses amis. Il ne dérangerait pas Lane pendant son rencard.
— Tête de cul à un rencard ?
— Avec Vale, ils ont probablement commencé les préliminaires sous la douche. C'était gênant de les voir se préparer.
— Je trouve ça très beau, deux hommes qui se préparent l'un pour l'autre alors qu'ils se sont déjà vu dans des états pas possibles. Ton visage a dégonflé, c'est mieux que sur le moment.
— Toi, tu as blanchi par rapport à l'autre jour.
— Disons que je n'ai pas beaucoup vu l'extérieur depuis.
— Il va alléger les règles, il lui faut juste du temps pour comprendre qu'il fait les choses mal.
Il fallait la même chose avec Soléne, chaque punition et chaque mots, sans erreur, tous identique.
— Je devrais y aller, tu sortiras vivante des griffes de Nate, promis.
— Promesse du petit doigt ?
— Si tu veux. Ça fait plaisir d'avoir une pote comme toi.
— Cent pour-cent sur que tu finiras ta vie avec ta main droite.
Oh la salope, je me marre et lui fais remarquer qu'une des pages de son livre a été déchirée par son propriétaire. Si elle s'ennuie, elle n'aura qu'à chercher ce que Nate a arraché, ça l'aidera peut-être à cerner le plus vieux d'entre nous. J'embrasse sa joue et sors.

Ni cœur, Ni âme (1)Where stories live. Discover now