Chapitre 65 : Olympe [corrigé]

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Je galope à en perdre haleine dans le long corridor. Les portes défilent, mais je n'en atteins jamais le bout ! J'enrage et redouble d'efforts. Je dois me dépêcher ! Je crains que Marius et ses alliés n'usent d'une technique sournoise pour faire tomber Vladimir... Ce dernier combat en respectant les règles et codes des duels. Marius et compagnie, non. Je ne l'ai vu se battre à l'épée qu'un court instant, mais mon instinct me le hurle comme si c'était une évidence. Qu'un face-à-face sans coup bas n'est pas un véritable affrontement aux yeux du frère de Vladimir. Après tout, il est prêt à tout pour le détrôner et sortir de l'ombre que mon vampire lui fait depuis qu'ils sont gosses.

Enfin, l'escalier se présente à moi. Il est en bois usé. Les mites ont commencé à en dévorer la structure et je crains de me rompre le cou si je l'emprunte. Mais je n'ai pas le choix ! Si jamais je n'y vais pas, Vladimir risque d'y laisser sa peau. J'inspire un grand coup et m'engage dans les marches bringuebalantes. Je m'accroche à la main courante, car une chute serait malvenue. Le bois craque à chacun de mes pas et je prie de toutes mes forces Tharros pour que j'arrive au rez-de-chaussée en un seul morceau.

Une planche se dérobe sous mon poids. Un cri se coince dans ma gorge. Mais je me suis agrippée avec tant de forces à la rambarde que je reste en place. Mon pied pend dans le vide et la marche tient encore. Elle est brisée au centre, mais les vis la maintiennent toujours. Lorsque toute cette histoire sera terminée, je jure que je ne laisserai aux garçons d'autre choix que de réparer cet escalier en piteux état.

Ma descente s'achève sans plus de problème et, quand je pose pied à terre, je tremble de tous mes membres à cause de la peur qui a pris racine en moi tout au long de cette épreuve. Après quelques grandes respirations pour me calmer, je recouvre mon sang-froid et observe les alentours. Je ne connais pas du tout cet endroit du manoir et me maudis d'avoir refusé l'aide d'Andreas. Je secoue la tête et me raisonne. Je dois me débrouiller et arrêter de compter sur les autres pour m'en sortir. Je cesse de me poser mille et une questions et, la main sur l'une de mes dagues, fais confiance à mon instinct. Comme me l'avait un jour assuré ma mère, il ne m'a jamais trompée.

Mes pas me mènent vers la gauche et je progresse sans un bruit à travers le grand corridor aux sombres tableaux et aux toiles d'araignées si épaisses que le mur derrière n'est plus visible. Je déglutis et détourne les yeux pour éviter que mon imagination fertile ne me montre quelques arachnides immenses et effroyables. Et aussi pour ne pas sursauter et hurler à la moindre ombre dansante.

Je finis par reconnaître ce couloir après plusieurs minutes de marche silencieuse. La serre n'est pas loin. Un sourire radieux se dessine sur mon visage et j'accélère un peu pour arriver plus vite dans la pièce vitrée. Lorsque je pousse la lourde porte de bois ouvragée, je m'assure que la salle est vide avant d'y pénétrer. Je ne referme pas derrière moi, de peur de faire trop de bruit. Me précipitant vers les bacs à fleurs, je vérifie que la plante de la dernière fois va bien et pioche dans la terre pour en prendre une poignée. Je contrôle qu'aucun être vivant n'y est piégé, puis me détourne vers les rangements. J'y farfouille en silence et y trouve une petite bourse de cuir nouée par une ficelle de chanvre tressée. Je l'ouvre, m'empresse de la remplir quand je constate qu'elle est vide et l'accroche à ma ceinture.

— Je reviendrai pour m'occuper de vous, dis-je balayant la serre du regard. Soyez patientes. J'ai juste un combat à mener et je serai entièrement à votre disposition.

Puis je tourne les talons et disparais dans l'embrasure de la grande porte. Je marche à pas de loup dans le couloir. Je sais très bien où j'atterrirai une fois que j'en sortirai. Je vais devoir me trouver une planque pour éviter que les vampires ou les mercenaires ne me voient. Je me doute qu'ils n'hésiteront pas à me prendre comme otage pour que Vladimir tombe. Le regard de Marius lors du dernier affrontement entre les deux frères me l'a prouvé.

La lumière de l'astre nocturne commence à apparaître au bout du corridor et je me fais encore plus discrète qu'auparavant. Dans le hall se trouvent les six combattants. Ils manient des lames plus tranchantes les unes que les autres. Je ne suis pas assez stupide pour penser qu'un métal commun a été utilisé pour forger les épées qui valsent dans la grande pièce d'entrée.

L'ouverture qui accueille les rayons de la lune grossit au fur et à mesure que j'avance pour aller retrouver mon vampire. Un cri muet m'échappe au moment où une douleur fracassante affole mon système. Je dois me retenir au mur le plus proche pour ne pas me vautrer dans un tintamarre. Ma prise est bien plus forte que je le croyais, car je reste sur mes pieds, la respiration hachée et des étoiles dansants devant mes yeux. Je soulève le pan droit de mon pantalon pour voir quelle blessure m'a stoppée en plein milieu de ce couloir désormais lugubre.

Rien.

Pas même la trace d'une ancienne plaie. Je suis en parfaite santé et aucune arme ne m'a brisé le genou. Je relève vers la lumière céleste au bout du corridor et comprends instantanément que le combat a mal tourné. Je me précipite dans la grande salle sans penser aux conséquences que cela pourrait avoir. Je me cache derrière les statues, dans les renfoncements qui constituent l'entrée du manoir, et peux ainsi épier sans être vue.

Je suis une ombre parmi les ombres.



Blood & Flowers 1 - Olympe & VladimirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant