Partie 2

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J'ouvre les yeux et regarde en face de moi. Plus personne. Mon cœur fait un bond. Mes doigts sont pourtant toujours couverts de sang, je n'ai pas rêvé. Où est-il passé ? Je me lève précipitamment et ouvre en grand la porte d'entrée sur la rue. Personne.

Un fracas métallique me parvient depuis la cuisine. Je cours en direction de celle-ci. Je ne peux m'empêcher de soupirer de soulagement. L'homme est là, de dos, en train de se confectionner de quoi manger. Je souris. Il est plutôt grand et athlétique. Il se retourne. J'écarquille les yeux. Le garçon devant moi est un canon de beauté : brun aux yeux verts, les lèvres fines et pleines sur une mâchoire carrée. Sa chemise encore tachée de sang séché est grande ouverte et son torse musclé est couvert de cicatrices rosées.

— Désolé, je me suis servi j'avais faim.

Je détourne la tête, mal à l'aise à la vue de sa peau.

— Ce.. ce n'est pas grave.

— Je te remercie de m'avoir soigné. Ça aurait pu s'infecter... Merci.

— De rien.

— Tu n'es pas très causante.

Je voudrais lui poser des questions : que lui est-il arrivé ? Comment a-t-il déjà guéri ? Que faisait-il ? Mais je me retiens.

— Ça va ? Au fait, je ne dérange pas ? Je n'ai vu personne à part toi et la maison est plutôt grande... du coup j'me suis dit que t'habitais pas seule mais...

— Mes parents sont absents pour le moment.

J'ignore pourquoi je lui dis la vérité. Si c'est un tueur, il peut faire ce qu'il veut de moi, personne n'en saurait quoi que ce soit.

— Oh... Je devrais sans doute partir alors. Avant qu'ils reviennent.

Un sourire taquin jaillit sur son visage.

— Mais je dois te remercier avant.

Il s'approche tranquillement d'un pas souple puis se penche vers moi. Je recule un peu mais il me retient à l'aide de son bras et dépose un baiser sur mes lèvres avant que j'ai le temps de faire quoi que ce soit.

— Tu fous quoi là ?

Je me retourne et aperçois Matt qui nous regarde depuis la porte d'entrée, je ne sais pas à qu'il parle. La seule pensée qui me vient est que j'ai fermé cette porte à clef hier.

— Je remerciais ma gentille hôtesse.

Matt a l'air d'être sur le point de sortir de ses gonds.

— Tu n'as pas le droit de...

— L'embrasser ? Décoince-toi un peu Matt. Vis avec ton temps.

— Je ne suis pas coincé.

Il se met à ignorer l'homme qui me tient toujours par la taille et s'avance vers moi.

— Mady ? finit-il par dire.

Je lève les yeux vers lui.

— Que fait Hugo chez toi ?

— Il est arrivé hier soir.

Ma réponse semble à la fois le rassurer et l'inquiéter.

— C'est vrai ?

— Oui, il était sur le point de partir.

— Je lui disais au revoir par politesse, soupire Hugo, en appuyant plus fermement sur ma hanche.

— Il m'a appelé pour que je vienne le chercher.

Le ton pinçant de Matt me fait réagir et me pousse à me défaire de l'étreinte d'Hugo.

— À plus, bébé, susurre Hugo à mon oreille.

— Ne m'appelle pas comme ça.

J'ai à moitié grogné cette phrase. Le dénommé Hugo me regarde étrangement et s'en va vers Matt, qui ne paraît pas plus surpris que ça. Il le dépasse et sort de la maison. Presque soulagé, Matt s'en va aussi. Arrivé au niveau du canapé, il se retourne.

— Au fait, félicitations, Mady. Pour ton bac. Bravo.

Je murmure un remerciement et Matt referme la porte derrière lui. Aussi paradoxal que ça puisse paraître, je me sens beaucoup plus proche de lui maintenant. Comme si nous partagions un secret. Je ferme la maison à clef et vais changer de tenue dans ma chambre.

La scène du baiser se rejoue dans ma tête, il n'avait pas à faire ça. Pourtant je ne l'ai pas empêché peut-être que si Matt n'était pas intervenu nous serions allés plus loin, voire beaucoup plus loin. Ce n'était qu'un baiser, je n'ai rien ressenti mais je me sens coupable. Je ferme les yeux et me surprends à imaginer Matt à la place d'Hugo. Je ne peux pas être amoureuse de Matt... Je ne le connais pas. Et je ne le reverrais plus. Je ne cherche qu'à souffrir en me raccrochant à son image. En m'imaginant avec lui, qui me serre dans ses bras... Je secoue ma tête.

— Il est sorti de ma vie.

Prononcer cette phrase à voix haute me brise le cœur mais je ne peux pas être amoureuse de lui... Je ne peux pas.

SingulièreWhere stories live. Discover now