Partie 5

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Hugo me lâche le poignet. Je me masse l'articulation rouge écarlate. Il me tourne le dos et sort de la pièce. Je l'entends discuter et décide de sortir également. Je le vois avec Matt. Celui-ci tourne la tête vers moi, visiblement inquiet. Je ne le comprends pas. La seule question qui me vient dans tout ce bazar est si cette fille est sa copine ou pas. Je m'en vais dans la direction opposée à la leur. Je sens leurs regards lourds dans mon dos mais ne me retourne pas. Je n'arrive pas vraiment à cerner mes sentiments autour de Matt : certains jours, je suis sûre de l'aimer, je ne peux pas nier, tandis que d'autres je ne sais pas et des détails anodins me poussent à penser cela. Je prends la tête entre les mains. Dans quelle merde je me suis mise ? Je me réfugie dans une chambre et m'assieds sur le lit. J'aime l'odeur de cette pièce.

— Mady ?

— Quoi ?

— Tu... ça va ?

— Oui.

— Pourquoi es-tu ici ?

— Je ne sais pas. J'avais besoin de m'isoler.

— Mady, c'est ma chambre.

Je deviens rouge, rouge cerise. Pourquoi dois-je forcément tomber sur une chambre occupée ? Je me lève et sors de la pièce tout en murmurant mille excuses à Matt, trop gênée pour me sentir énervée. Je parcours le couloir d'un pas rapide et trouve rapidement une autre chambre. Cette fois je suis sûre qu'elle n'est pas occupée : les meubles sont recouverts de draps, seul le lit n'en possède pas. Tout est couvert de poussière et pourtant je m'y sens bien. Je secoue l'un des oreillers présents dans une armoire quand la porte s'ouvre. La dame aux draps s'approche de moi.

— Je n'ai pas préparé de chambre ne sachant pas laquelle vous plairait mais si celle-ci vous convient...

— Je vous remercie mais je vais préparer ma ch...

— Hors de question ! VOUS êtes l'invité, JE prépare !

— D'accord merci beaucoup alors c'est très gentil.

— Non c'est de la simple politesse, maintenant je ne pense pas que vous vouliez me voir mettre vos draps donc si vous voulez vous pouvez descendre. Matt, Hugo et Jess sauront t'occuper.

— Merci beaucoup.

— Reste pas là descend.. s'il te plaît.

Je souris à ce demi-ordre. Avant de partir, je demande :

— Je suis ici pour combien de temps ?

La femme hausse les épaules, désolée. Je descends les escaliers, trouvés avec quelques difficultés. Lorsque j'arrive dans ce que je devine être un salon, la fille, Jess, me lance un sourire.

— Hey ! Alors je te fais visiter ? Les garçons sont partis, tu verras parfois on part comme ça sans vraiment de raisons et ça dure plus ou moins longtemps, tout dépend de... Bon on commence par quoi ? La cuisine tiens. Tu as l'air de bien aimer.

Je ne sais pas trop quoi penser de cette petite remarquer glissée dans ses paroles. Suis-je grosse ? D'accord j'ai quelques rondeurs mais pas à ce point... si ? Elle file devant moi et je la suis comme je peux. Bien que sa remarque n'arrête pas de tourner en boucle dans ma tête. En à peine trente secondes, elle m'est déjà antipathique.

On parcourt toute la maison ainsi et rapidement j'ai mes repères. Jess a continué à m'envoyer des réflexions un peu blessantes mais je fais comme de rien. On arrive au point de départ et Jess s'allonge sur le canapé. Je reste donc debout à côté d'elle à regarder la télé.

— Pourquoi tu t'assieds pas ?

Je ne réponds pas.

— T'as pas de place ? Désolée... T'as qu'à aller dans la cuisine, fais de longs pas, c'est bien pour tes cuisses et prends un tabouret.

Je commence à en avoir un peu marre de ses remarques. Si elle continue je sais où je vais les lui mettre. Je ne vais pas dans la cuisine et monte rejoindre la dame qui prépare ma chambre. Je frappe à la porte.

— Entrez ! Oh... Mady c'est toi ! J'ai fait un peu de ménage tu en penses quoi ?

L'ambiance dans la pièce est tout à fait différente : je m'y sens mieux et respire mieux. Les meubles sous les draps n'en possèdent plus, ils sont brillants et anciens. La pièce a un style rétro que j'adore. La dame a ajouté un pouf vert pomme qui est complètement décalé avec le style de la chambre. Je m'y sens presque chez moi. Je remercie la femme qui ne m'a toujours pas dit son nom. Elle sort de la pièce en refermant la porte derrière elle. Je m'allonge sur le lit. Comment puis-je me retrouver ici ? Je vais épouser un garçon que je ne connais pas, que je n'aime pas et pourtant je me sens bien... Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Quelqu'un frappe à la porte. Je me lève pour ouvrir, comme si j'avais toujours logé ici. Hugo.

— Tu ne m'aimes toujours pas ?

Je ne réponds rien et referme la porte. Je me couche à nouveau sur le lit. J'entends Hugo ouvrir la porte.

— Mady, je sais que j'ai été un peu gauche avec toi mais pardonne-moi je ne sais pas m'y prendre avec les filles...

— Bien sûr... Tu veux vraiment me faire gober ça ? Sois plus crédible la prochaine fois.

Je ne sais pas d'où sort cette langue acérée, mais parfois ça fait du bien.

— Mady, tu as raison enfin, en un sens, je ne t'aime pas. Mais je sens qu'il y a quelque chose entre nous...

— Une porte ?

— Fais pas l'idiote. Non je parle d'amour ou d'amitié... Mady, est-ce que tu ressens quelque chose pour moi qui n'est pas de l'amour ?

— Du dégoût.

— C'est pas cool. Tu..

— Jess, elle l'est avec moi ? rétorqué-je.

Il fait un pas dans la chambre.

— Je ne suis pas Jess que je sache.

— Tu m'as broyé le poignet.

— Tu m'as énervé, j'étais stressé...

— Ce n'est pas une raison on ne frappe pas les femmes même avec des fleurs.

— Parce que t'es une femme maintenant ? "

Je me mets debout et sors de la pièce en ignorant royalement Hugo lorsque je lui passe devant. Pour qui se prend-il ? Il me bloque le passage.

— Mady, je suis un pauvre type mais laisse-moi tenter ma chance. S'il te plaît ? Je serais très mignon avec toi..

— Non, même avec tes yeux de cocker, tu ne me ferais pas changer d'avis.

— Laisse-moi au moins t'épouser, je ne veux pas me marier avec Jess...

— Pourquoi ?

Cette fois, c'est lui qui m'ignore. Il fixe ses pieds et s'en va. Je me demande si je ne l'ai pas poussé un peu loin... Super Madame Culpabilité vient de débarquer. Je me mords la lèvre.

— À quoi tu penses ?

Je sursaute, Matt me regarde de ses yeux pétillants. Il est tellement... À mon goût.

— Alors ?

— Au mariage... On n'est pas un peu jeunes ?

— Ça t'inquiète ? Je suis sûr qu'Hugo fera un bon mari. Même si vous êtes jeunes.

Merci Matt mais je m'en fiche, c'est toi que je crois aimer. J'évite son regard et ne dis rien.

— Ça va ?

— Oui, oui.

— Tu es sûre ? Qu'est-ce que t'as dit Hugo ?

— Rien de spécial...

— Mady, tu mens.

Tu ne peux pas savoir que je t'aime aussi ? Je rougis à cette pensée. Matt me sourit. Je l'embrasse du regard. Une question revient soudain perturber mon esprit. Combien de temps vais-je rester ?

SingulièreWhere stories live. Discover now