Chapitre 2

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I'm digging the dirt for a sign,
and I'll pray to let my little light shine and set my heart on the line




- Notre père, qui es aux cieux... Que ton nom soit sanctifié, que ta volonté... non. Que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous notre pain quotidien... aujourd'hui... Oh et merde.

Il regarda un moment ses mains larges, pas trop sûr de savoir quoi en faire.

- Devlin, t'es rouillé, murmura-t-il finalement dans le silence de la chambre.

Il se sentait vraiment idiot, agenouillé comme ça au pied de son lit. Lorsqu'il se redressa, il sentit sa cheville ankylosée le gêner. Si raide de bon matin, ça devenait énervant. Il tituba un moment avant d'arriver à la prendre en compte dans son équilibre, et se dirigea jusqu'au placard, dans lequel il fouina jusqu'à trouver une chemise. Elle n'était pas parfaitement repassée, mais il allait bien falloir que ça fasse l'affaire. Il regarda sa montre : il avait oublié de la vérifier ce matin, trop absorbé par sa piètre tentative de ranimer sa partie spirituelle. Les aiguilles étaient bloquées sur trois heures et dix-sept minutes. Il jeta un coup d'œil à son téléphone - 7h35 - et fit les arrangements, puis tapota obstinément le cadran jusqu'à ce que la trotteuse se remette chaotiquement en marche.

Encore un truc qu'il allait devoir régler un jour. Un autre jour.



*



- Marshals du Mississippi, bureau de Tupelo. Affaires internes, dossier n°564. Nous sommes réunis pour la dernière audition dans le cas du marshal adjoint Devlin Padgett - présent ici, en compagnie de son supérieur le marshal William Westworth. Après l'audition des différents témoins et collègues du concerné, la commission d'enquête est réunie afin d'établir une fois pour toutes les évènements qui se sont déroulés la nuit du 23 avril 2016 à Tupelo, rue Forrest. La responsabilité de l'adjoint Padgett est mise en cause dans l'échange de coups de feu qui a abouti à la mort de son coéquipier, l'adjoint Keener, ainsi qu'à celle d'un civil, monsieur Elijah Roberts.

Le chef de la commission des affaires internes s'interrompit ici et glissa un regard vers l'assistant du procureur à côté de lui. Ce dernier, le coude appuyé nonchalamment sur la table pour soutenir sa tête d'une main, lui renvoya une moue peu intéressée. Ces deux-là et le reste de la commission s'étaient alignés d'un côté de la grande table, la salle de réunion du bureau des marshals de Tupelo ayant été mobilisée pour l'occasion. En face d'eux, Devlin, encadré de son avocat et de son supérieur, attendait la suite.

- Adjoint Padgett, reprit le chef après s'être raclé la gorge à l'aide d'un bref toussotement. Selon les témoins que cette commission a auditionnée, l'adjoint Keener et vous aviez été envoyés au 403 rue Forrest, afin d'appréhender un fugitif fédéral, Randall Wallace, que des renseignements vous avaient permis de localiser. Vous êtes arrivés sur les lieux autour de vingt-deux heures trente, c'est exact ?

- Oui, monsieur.

C'était la première fois qu'il parlait depuis son arrivée dans cette pièce, et il se rendit soudain compte qu'il avait la gorge serrée. Ou sèche, peut-être. Un peu des deux, sûrement.

- Le fugitif s'était retranché avec une arme et ce que vous avez interprété comme des otages.

- A cause du jeune âge évident de deux d'entre eux, oui, intervint le chef de Devlin.

- Le dossier du criminel ne faisait pas mention d'un gang qu'il aurait créé dans la localité de Tupelo ?

- On a déjà établi ça, oui, trépigna le marshal Westworth, tandis que son subordonné restait silencieux. Les marshals Padgett et Keener n'avaient aucun moyen de savoir qu'il n'était pas isolé. Ce gang ne lui appartenait d'ailleurs pas, il se trouvait que l'un des membres était son neveu. Mes marshals ont fait au mieux avec les informations dont ils disposaient.

Les Échos du bayouWhere stories live. Discover now