Chapitre 9

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When I look over my shoulder, what do you think I see?




— J'en peux plus, de cette canicule. Ce n'était pas censé se calmer ?


Gary assortit ces légitimes protestations d'un gros soupir, sans cesser de s'éventer avec un dépliant touristique piqué au motel. Kay ne répondit rien, car il lui semblait vain de lister ses griefs contre la météo, mais elle devait bien reconnaître que cette chaleur inhabituelle devenait pesante. Ils n'étaient même pas encore au milieu de la journée et elle se sentait déjà fondre sur place, ses poumons obstrués par la moiteur suffocante de leur environnement.


Le laboratoire avait appelé son collègue tôt le matin, afin de leur donner les premiers résultats des tests sur leurs échantillons. Validant l'hypothèse privilégiée par la jeune femme, ces derniers leur apprirent qu'une toxine inconnue était présente en forte concentration dans leurs prélèvements, en particulier ceux pris en amont du bayou. L'identification de cette toxine, en revanche, devait faire l'objet de tests plus poussés. Mais au moins, ils savaient à quel type de problème ils avaient affaire. Ils décidèrent de ne pas perdre de temps et appelèrent Louis ; par chance, ce dernier était disponible pour les emmener de nouveau sur le bayou le jour-même.

Kay jeta un coup d'œil à leur guide en s'essuyant le front pour la énième fois de la matinée. Ce dernier semblait beaucoup moins souffrir de la chaleur qu'eux ; il portait même une chemise, là où elle avait opté pour un simple débardeur et son collègue pour un t-shirt dont il ne cessait de rouler désespérément les courtes manches. La jeune femme avait légèrement appréhendé les retrouvailles avec lui, considérant leur dernière conversation. Pourtant, il s'avéra qu'elle avait eu tort : il adopta le comportement qu'il avait toujours eu avec elle. Elle en ressentit un certain soulagement.


Alors qu'ils dépassaient l'une des maisons sur pilotis qui ponctuaient le bayou, ils aperçurent pour la première fois un habitant. Ce dernier était planté sur la terrasse approximative de sa demeure et Kay craignit un instant que sa lourde carcasse ne traversât le bois vermoulu sous ses pieds, mais ce ne fut pas le cas. Il suivit leur bateau des yeux et répondit au salut de la main de Louis, sans toutefois que cela ne change son expression patibulaire.


— Je n'aimerais pas vivre ici, fit remarquer Gary. Même si on me payait.

— Au moins, c'est tranquille.

— Oui, sauf si on préfère les autres êtres humains aux moustiques.


Cette réflexion arracha un léger sourire à Kay.


— Je n'étais pas sûre que ces maisons étaient habitées jusqu'ici.

— Certaines ne le sont pas, lui répondit la voix de Louis, même si ce dernier gardait les yeux rivés sur le fleuve. Mais celles qui ne sont pas encore en ruines, si.

— Je suppose que ce ne sont pas des gens qui ont beaucoup de moyens...

— Non, c'est les pauvres d'ici. Sauf Black Bear qu'on vient de voir, lui c'est un ermite.

— Alors il a vraiment choisi d'habiter ici ? releva Gary, incrédule.

— Lui, il préfère les moustiques, ironisa leur guide avec un haussement d'épaules.

Les Échos du bayouDove le storie prendono vita. Scoprilo ora