Chapitre 15

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Le CPE n'est pas vraiment surpris de me voir arriver dans son bureau. Je fais partie des habitués. Je suis déçu de ne pas réussir à lui soutirer une ébauche de sourire avec le petit mot que je lui tends...

— J'ai de sérieux problèmes avec vous Tonio ! Vous en êtes conscient ?

Pour une fois, j'essaie de réfléchir avant de sortir une énormité qui ne va faire qu'aggraver ma situation. Dans son costume noir tout propre, assis confortablement dans son fauteuil, mon proviseur m'affronte. Je reste debout face à lui, le dominant. Nous nous testons mutuellement depuis que je suis entré en Seconde. Lui, avec sa formation de psychologue, il cherche à m'analyser pour me manipuler alors que moi, je le pousse à bout petit à petit pour connaître ses limites.

Il recoiffe ses cheveux bruns sur le côté et remonte ses lunettes, avant de reprendre la conversation :

— D'abord les vols... Mais bien sûr, je n'ai aucune preuve ! Puis votre comportement : un mélange de "je-m'en-foutisme" et d'ego surdimensionné. Certes, vos capacités dépassent la moyenne, mais ce n'est pas une raison pour envoyer des messages de la sorte à vos camarades. Je me charge personnellement de vous accompagner samedi matin pour quatre heures de retenue. Nous travaillerons sur les limites à ne pas dépasser et le respect d'autrui.

— Il n'y a pas de bus le samedi matin et mon père n'a pas de permis, je ne pourrai pas venir, je le contrarie avec un petit sourire ironique.

Mes arguments sont valables. Je l'oblige à baisser la sanction. Il soupire et se gratte la tête. Puis, il saisit son stylo pour tapoter nerveusement sur son bureau réfléchissant avant de négocier :

— Dans ce cas-là, disons mercredi après-midi, jusqu'à l'arrivée des bus !

— C'est vous le chef, je lui lance en récupérant mon carnet de liaison pour retourner en classe.

Je repars en cours abattu pour le reste de la journée, tellement déçu qu'Agathe ne veuille pas de moi. Je rumine son béguin pour mon frère et cela me fout carrément les boules.

Le soir avant de prendre le bus, je me confie à Marion.

— Tu l'appelles ta crush, mais en fait, t'en pinces grave pour elle.

— N'importe quoi. C'est juste que dans ma tête de taré, il faut que je revois tous mes plans et ça fout le bordel !

— Moi, je crois que t'es amoureux !

Nous n'avons pas fini tard et le ramassage scolaire ne passe que dans une heure. Marion m'indique le banc en fer forgé dans la cour de récréation. Nous nous asseyons côte à côte. Je pose mon sac entre mes pieds alors que Marion garde le sien sur ses genoux.

— Putain, Marion, arrête de me casser les couilles avec ça ! je m'énerve, en refusant d'admettre que je suis tout bêtement jaloux. Je ne suis pas amoureux ! Je n'ai jamais été amoureux et je ne compte pas l'être avant mes trente-cinq ans au moins.

— Non, mais comme si on pouvait contrôler ses sentiments !

Plus Marion me contredit et se moque de moi, plus la situation me désespère. Je joue avec l'anse de mon sac que je fais tourner entre mes jambes.

— Moi, oui ! je lui avance, absolument convaincu par mes propos.

— Ouais, et bien le jour où ça va t'arriver, tu vas tomber des nues !

Marion refait son chignon. Elle coince l'élastique entre ses dents pendant qu'elle reprend les petites mèches qui lui tombaient sur les yeux.

— Jamais, je ne veux pas me mettre en couple ! je lui explique pour la énième fois en prenant mon frère en exemple. T'as vu la gueule que tire Paulo à ta sœur ?

SPEED (Terminé) Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant