Chapitre 43

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Désespérés par le temps qu'il a fait lors de notre dernière virée camping, nous avons remis ça ! Nous sommes maintenant mi-juillet et je me dis qu'il faudrait que ça avance un peu, du côté de Dakota, parce qu'hormis les galoches endiablées que nous échangeons régulièrement, nous n'avons guère fait beaucoup plus. La raison principale est que nous avons Jimmy constamment sur le dos, et quand ce n'est pas lui, c'est Marion. Justement, cette dernière a proposé de faire une tente pour les filles et une pour les garçons, ce qui foire totalement mes plans du week-end.

Pendant que quelques gars surfent à la tombée de la nuit, moi je préfère profiter de la soirée sur le sable à chicaner les deux filles. Elles sont en train d'installer le pique-nique sur des serviettes et je les regarde faire.

— J'ai la dalle, c'est bientôt prêt ?

J'adore les provoquer en ne faisant aucun effort pour les aider...

— Si ça va pas assez vite, t'as qu'à te bouger le cul et nous aider ! me lance Marion, habituée à ce genre de réflexions de ma part.

— Chacun son boulot ! je continue, allongé sur ma serviette, les bras croisés derrière la tête. Faire à bouffer, c'est celui des femmes !

— Tu te crois encore au Moyen Age ! T'as qu'à tout faire, pour la peine ! Je touche plus un truc du week-end !

Marion me jette tout ce qu'elle portait sur ma serviette : les baguettes de pain, les poches de chips et de gâteaux apéritifs, puis elle enfile un sweat et s'assoit en tailleur sur le sable pour m'affronter.

— Moi, j'ai monté les tentes, chacun son job ! C'est comme le ménage !

— Mais t'es con ou tu le fais exprès ? s'énerve soudain Dakota, restée jusqu'à présent silencieuse.

— Non, je le pense ! j'affirme sans bouger. Le ménage, la bouffe et les gosses, c'est pour les femmes !

— Et toi, merdeux, tu fais quoi alors ?

En prononçant ces mots, Marion s'est agenouillée pour se préparer à me sauter dessus. Je sens qu'elle va m'étrangler, mais ce n'est pas pour autant que je vais ravaler l'énormité que je prévois de leur sortir depuis le début :

— Moi ? Je vous fais des gosses...

— Déjà, faudrait que tu saches les faire, connard !

Marion rage. Elle me frappe sur le ventre. Ça m'oblige à m'assoir pour me protéger des coups qu'elle commence à me mettre. D'abord avec ses poing sur mon torse, mais je les évite en me pliant. Elle ne me fait aucun mal... Je rigole même de la voir s'énerver. Puis elle tente alors une gifle que je maîtrise aussitôt en écartant ses mains. Je les maintiens fermement dans les miennes pour attirer Marion contre moi. Ensuite, je plonge mon menton dans sa chevelure blonde qui sent l'eau de mer. Nous nous retrouvons enlacés et j'en profite pour lui proposer :

— Tu veux que je te montre !

— Jamais un mec comme toi m'en fera un ! lâche-t-elle en se dégageant de mon emprise pour partir bouder.

— Pas grave, je vais en faire un à Dakota... je déclare sûr de moi, histoire de l'achever.

Bon, ok, ce que je viens de dire est complètement con, mais c'est tellement marrant et facile de foutre en rogne les filles avec ce sujet ! Et puis je dois avouer que faire la bouffe, le ménage ou m'occuper d'un gosse, ce n'est pas pour moi, donc c'est forcément pour les meufs.

— T'es plus que lourd, Tonio, me reproche gentiment Dakota qui cache parfaitement son exaspération.

C'est ce moment que choisissent les gars pour sortir de l'eau et nous rejoindre. En arrivant, décontractés et totalement ignorants des propos ridicules que je viens de tenir, Jimmy met direct les pieds dans le plat :

— Alors, on bouffe quoi, les meufs ?

J'explose de rire à sa réflexion, d'abord parce qu'il m'associe à Marion et Dakota en utilisant le mot meufs, et surtout parce que c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase trop plein de Marion.

— Oh, toi ! Ta gueule, t'es aussi con que ton pote.

Je n'avais pas vu Marion aussi énervée depuis longtemps, probablement depuis le baiser avec Whitney au vieux château...

Après avoir passé une bonne partie de la soirée sur la plage et être rentrés se rincer au tuyau d'arrosage du jardin du curé, nous finissons dans la boîte de nuit de la petite station balnéaire. Je suis très surpris que les videurs me laissent passer la porte d'entrée aussi facilement, malgré mes presque quatorze ans. Je dois avouer que l'un des deux vigiles est l'oncle de Dylan, ce qui facilite pas mal les choses. Dans la discothèque, nous nous éparpillons chacun de notre côté. Marion retrouve deux filles de son groupe de hip-hop et elles se déhanchent sur la piste de danse. Quant à Dylan, Jimmy et moi, nous avons repéré deux Allemandes bien plus âgées que nous et nous nous disputons sur qui de nous trois arrivera à choper l'une d'entre elles.

Je me lance le premier pour leur faire la conversation, mes deux potes étant bien plus timides que moi et surtout limités sur la façon de les aborder. Ces deux connards me poussent vers elles et me collent aux basques, prêts à récupérer mes miettes. Les deux blondes aux robes moulantes regardent la piste de danse en se parlant à l'oreille. Il est clair qu'étant donné mon âge, je ne suis pas en mesure de leur offrir un coup à boire, il ne me reste donc que mon imagination pour les séduire. Elles ne parlent probablement pas français et je choisis donc de les aborder en anglais.

— Hi ! Do you want to have a blast with me ? je prononce avec un accent plus que pourri mais suffisamment fort pour qu'elles puissent m'entendre malgré la musique.

Ok, j'y vais direct et un peu à la loose, sous-estimant le très bon anglais des deux étrangères qui comprennent aussitôt mon sous-entendu. Elles ne se démontent pas pour autant et me répondent ensemble dans un éclat de rire :

— Sorry ?

— Ok, welcome in France ! je poursuis (après tout, le plus dur est fait !). I am Tonio !

— Tu peux parler français, tu sais ! me casse la plus grande et la plus mignonne des deux en posant sa main sur mon avant-bras pour se retenir de rire.

Clairement, elles se foutent de ma gueule. "Fille qui rit à moitié dans ton lit" me répète souvent Paulo, et vu le fou-rire qu'elles partagent, c'est plutôt bien parti pour moi.

— Ah, vous êtes françaises, en fait ? je reprends de plus belle alors que Jimmy et Dylan, qui n'entendent rien de ce que nous disons, s'approchent pour taper l'incruste.

— Bonne déduction ! me rétorque la plus petite.

— T'es un rapide, toi ! ajoute l'autre.

— Justement, vous n'allez pas me croire mon surnom, c'est Speed !

Jimmy et Dylan s'avancent chacun à mon côté pour se présenter quand je lève la tête pour croiser le regard de Dakota qui n'est pas seule. Merde ! Un inconnu est en train de lui parler à l'oreille et c'est peut-être le moment pour moi de m'intéresser à elle...

SPEED (Terminé) Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant