Chapitre 16

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Eve ouvrit lentement les yeux, mais la lumière, beaucoup trop douloureuse, lui les fit refermer tout de suite. Elle se sentait bien et en même temps pas. Il lui semblait sortir d'un long sommeil mais le poids de la fatigue lui pesait sur les épaules comme si elle n'avait pas dormi depuis des années. Ces derniers jours lui paraissaient étrangement comateux elle peinait à se rappeler ce qu'il se passait. Et le mal de crâne qui lui flinguait la tête ne l'aidait pas, vraiment. Elle tenta une nouvelle fois d'ouvrir les yeux. Sans plus de succès, elle les referma aussitôt. En fait elle était bien, là. Elle avait l'impression de n'être plus qu'une conscience, un fantôme. Comme si elle n'avait plus de corps. Elle devait avouer que la sensation était loin d'être désagréable.

Elle dut mettre un bon quart d'heure pour pouvoir ouvrir les yeux, mais la lumière était toujours trop vive, et elle lui brûlait les rétines. Elle ne reconnut pas la chambre blanche dans laquelle elle se trouvait mais ne s'en inquiéta pas outre mesure. Elle prenait de petites inspirations comme si son corps savait que moins elle bougerait, mieux ça irait pour elle, mais, trop curieuse, la jeune fille leva les couvertures. Elle ressentait des sensations bizarres dans le corps, comme les vestiges d'une douleur, un léger picotement, une sensation que ça n'allait pas et elle fut étonnée en voyant son corps recouvert de bandage. Des éclairs de mémoire lui traversèrent l'esprit. L'attentat. Le commissariat. Le grenier. Elle se souvenait plus ou moins de tout, même si certains passages étaient flous. Et aucun souvenir de l'interrogatoire des terroristes. D'un autre côté, elle n'était pas vraiment sûre de vouloir savoir vraiment ce qu'elle avait subi. Sa porte se ferma doucement et la jeune fille sursauta.

‒ Bonjour mademoiselle, je suis Lysa Hermond, la propriétaire de cet hôpital.

‒ Je...

C'était une grande femme blonde. Elle portait, tout comme sa sœur des lunettes et avait les mêmes yeux bleus.

‒ Je suis la sœur d'Ariane, votre psychologue, qui a d'ailleurs usé de tous les arguments possibles pour me convaincre de vous prendre sans en avertir les autorités. Dit-elle en soupirant. Je dois dire que vous n'êtes pas en bon état, vous avez trois côtes cassées, une quinzaine de points de suture et une commotion cérébrale qui risque de vous laisser des séquelles.

Lysa Hermond avait adopté un ton très professionnel. De toute évidence, c'était elle qui avait ausculté la jeune fille. Cette dernière hocha doucement la tête. Visiblement elle revenait de loin. La doctoresse continua :

‒ Je vous prescris un bon mois de repos, le temps que vous vous remettiez, voire plus. Vous devriez prendre des antidouleurs à chaque fois que vous avez mal, mais à deux heures d'intervalle minimum entre chaque cachet. Le garçon... Liam, je crois, attends devant la chambre et Ariane passera tout à l'heure.

‒ Merci beaucoup.

‒ Soyez plus prudente à l'avenir.

Elle quitta la salle. Un instant plus tard, alors qu'Eve poussait un profond soupir de soulagement, on toqua à la porte.

‒ Entrez !

Liam pointa sa tête au travers de la porte et s'approcha doucement.

‒ Ça va ?

‒ Dans la mesure du possible. Et toi ? Ajouta-t-elle quand son regard se posa sur le gros pansement qui recouvrait ses points de suture sur son front.

‒ Ouais.

Il s'assit sur le rebord du lit.

‒ Tu ne peux pas savoir à quel point j'étais mort d'inquiétude, surtout quand tu t'es évanouie dans la voiture, hier. Heureusement qu'Ariane était là. Tu es tombée sur une bonne psy...

‒ J'imagine... A vrai dire je n'ai pas trop de souvenirs de ce qui s'est passé après qu'on m'ait emmenée pour l'interrogatoire, ça reste très flou. Même notre fuite... Je ne me rappelle pas trop.

‒ C'est normal, la sœur d'Ariane nous a dit que tu avais une commotion cérébrale, ça peut altérer un peu la mémoire...

‒ Elle a dit que j'en aurais des séquelles. Tu penses qu'elle parlait de ça ?

Il haussa les épaules n'en savant pas plus qu'elle.

‒ Pour le moment nous sommes en sécurité, d'accord ? De toute façon, il est absolument hors de question qu'on sorte d'ici avant que tu sois un minimum guérie. D'accord ?

La jeune fille hocha la tête. Elle n'avait pas le cœur à disputer le dernier mot. Même si elle savait que ce n'était pas raisonnable de rester ici trop longtemps. Elle savait aussi qu'elle n'avait pas la tête à être raisonnable. Liam était soulagé de ne pas avoir à se prendre la tête sur le temps qu'ils resteraient. En temps normal, elle aurait sans doute contesté sa décision. Il espérait juste que ce qui s'était passé ne l'ai pas brisée pour de bon. Néanmoins, il préférait rester positif.

‒ Si tu as le moindre souci, appelle-moi.

Eve ne répondit pas. Elle avait entendu mais, comment dire, elle n'était pas vraiment sûre qu'il puisse l'aider depuis toujours, elle s'était toujours tirée d'affaire seule et les habitudes ont la vie dure. Sur ces paroles, il laissa la jeune fille, sentant son besoin de solitude.

Elle referma donc les yeux, laissant une larme dégringoler sur sa joue. Puis d'autres suivirent le sillon tracé par la première. Toute la peur, la colère, la douleur qu'elle avait coulé dans les méandres de son esprit refaisaient surface. 

InsaisissableHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin