Chapitre 18

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Amina se jeta sur son lit. Les larmes lui montaient aux yeux depuis tout à l'heure. Ces derniers temps, elle avait l'impression que sa vie lui échappait et d'être complétement impuissante face à ça. Elle ne savait pas quoi faire totalement démunie face à cet amas de sentiments qui lui faisaient perdre le goût à la vie. La peur et l'angoisse, pour son amie disparue qui courait tellement de risque. La tristesse d'avoir perdue Eve, parce qu'elle savait qu'une part de la jeune fille était morte avec son père. Mais aussi une colère naissante. Contre les terroristes. Contre ceux qui accusaient Eve. Contre ses amis qui ne lui disaient rien. Elle en avait assez de tout ça, elle se sentait perdue, chaque jour un peu plus que le précédent. Et elle ne savait plus à quoi se raccrocher. Elle se sentait abandonnée.

Elle ne se releva que quand ses parents l'appelèrent pour manger. Elle jeta un regard à son bureau et à son sac de cours encore fermé. Depuis l'attentat, elle n'avait plus le cœur à bosser. Elle n'y arrivait plus. Alors qu'avant elle pouvait passer des soirées de travail acharné, maintenant, elle ne touchait même plus à son sac. A vrai dire, elle tentait vainement de s'éloigner de tout ce qui était relatif à Eve, trop triste pour son amie, et l'école en faisait partie. Elle alla donc manger, ou plutôt chipoter dans son assiette. Elle avait aussi perdu l'appétit. Ses parents, ne savaient plus quoi faire pour aider leur fille et ils haïssaient Eve pour ce qu'elle avait fait d'Amina. Ils ne la reconnaissaient plus. Elle avait perdu sa joie de vivre. Ils prirent donc l'initiative de l'emmener à la mosquée, espérant que dieu saurait sauver leur fille, là où eux avaient échoué.

C'est ainsi que, le jeudi matin, à la demande de ses parents, elle se retrouva planté devant la mosquée plutôt que d'aller au lycée. Elle n'en comprenait pas vraiment l'intérêt mais devant l'insistance de ses parents, elle n'avait pu que se plier à leur demande. Elle soupira et s'en approcha mais une main se posa sur son épaule.

‒ Excusez- moi, mademoiselle...

Eve ouvrit les yeux en sursaut. Elle était trempée de sueur. Encore un cauchemar. Il faisait grand jour dehors et les oiseaux chantaient. Si elle n'avait pas été dans une chambre d'hôpital, elle aurait presque cru que tout ce qui c'était passé récemment n'était qu'un mauvais rêve. Mais non, elle était bien là couverte de bandage, dans ce lit d'hôpital, son père était bel et bien mort et elle ne s'était jamais sentie aussi seule qu'après sa mort. Des larmes silencieuses coulèrent une fois de plus sur ses joues.

Après quelques minutes de pleurs silencieux, elle décida de se laver. Elle se leva donc et, à pas approximatif et douloureux, elle se rendit dans la salle de bain. Le confort y était très sommaire. Il y avait juste le strict minimum. Des toilettes, un lavabo avec une planche pour y mettre ses affaires. Il n'y avait pas de cabine de douche, juste un pommeau accroché au mur. Eve soupira, elle n'aurait pas dit non à une grande baignoire. Elle alluma l'eau, se déshabilla et retira ses bandages. Elle fut surprise de trouver son corps dans un si piteux état. Elle savait qu'on ne l'avait pas ménagé mais elle ne s'imaginait pas que c'était à ce point-là. Elle comprenait pourquoi on la droguait aux antidouleurs maintenant. Elle se doucha rapidement ‒autant que ses blessures le lui permettaient‒ non sans grimacer chaque fois qu'elle passait sur un bleu ou une égratignure. Elle s'habilla ensuite rapidement et sortit.

Eve sursauta en découvrant Liam assis sur une chaise, qui l'attendait patiemment. Il se leva pour la soutenir.

‒ Tu aurais pu appeler quelqu'un pour t'aider.

Elle haussa les épaules. Liam l'installa sur son lit.

‒ Tu voulais me parler de quelque chose ?

‒ Ouais... Lysa Hermond, tu sais celle qui gère l'hôpital et qui...

‒ Je vois qui c'est, merci. Le coupa Eve en levant les yeux au ciel.

‒ ... Oui, donc Lysa Hermond m'a dit qu'il serait peut-être temps pour nous de quitter l'hôpital. Tu t'es assez remise.

‒ C'est une bonne chose.

‒ on va où après ?

‒ Moi je vais continuer à me venger, et à fuir tous ceux qui me recherchent. Toi, tu vas rentrer chez toi...

‒ Non.

‒ Liam !! Je t'ai déjà fait courir assez de risque comme ça. Sérieusement rentre chez toi...

‒ Non, je ne veux pas te laisser seule, et puis elle a dit que tu devrais encore te reposer trois semaines au minimum, courir les rues de Paris est loin d'être la bonne solution pour te remettre.

‒ Je... Tu n'as pas besoin de me suivre comme ça... Je préfère te savoir en sécurité, je me sens déjà tellement coupable pour ce qu'ils t'ont fait, s'il-te-plaît, Liam...

‒ Bah non, te sens pas coupable, t'y es pour rien, c'est de leur faute. Mais, tu sais, je ne pense pas que ce serait une bonne chose pour moi de rentrer maintenant, enfin je suppose que je dois être fiché chez les terroristes.

‒ Je n'ai pas envie de l'admettre mais tu as sans doute raisons... Soupira Eve.

Elle ferma doucement les yeux. Elle pouvait paraître calme et sereine, mais dans sa tête, ça tournait à toute allure. Elle devait trouver un refuge au plus vite. Vraiment. Une idée s'immisça dans sa tête. Enfant, cela avait été son refuge mais, depuis la mort de sa mère, elle n'y était plus jamais retournée.

La voix étranglée d'émotion, elle murmura :

‒ J'ai peut-être une idée d'où nous pourrions aller...

‒ Où ?

Eve haussa les épaules.

‒ Dans une vieille maison perdue dans Fontainebleau.

‒ Et elle est à qui, cette vieille maison ?

‒ A ma grand-mère.

InsaisissableWhere stories live. Discover now