BROKEN - Tome 3

U N

Alexie

Dix mois plus tard

« Si l'émotion est une ivresse, la passion est une maladie qui résiste à tous les moyens thérapeutique... C'est un enchantement qui exclut l'amélioration morale. », a dit Kant.

Je n'ai jamais aimé la philosophie, encore moins quand elle m'oblige à passer des heures dans mes livres, pour être certaine de passer mon dernier cours, le seul où il me manque encore des crédits, mais parler de passion me permet de mieux me concentrer. J'ai passé des mois à vivre une passion qui n'était comprise par personne, alors je sais de quoi je parle, pour une fois.

Je lève les yeux pour fixer l'horloge de la bibliothèque. Dix-sept heure cinquante. Dans dix minutes, la bibliothécaire viendrait me voir pour m'informer qu'elle devait fermer la salle. C'est devenu une habitude, chez moi, d'étudier jusqu'à pas d'heure dans des lieux où je me sens bien. Pas de bruit, le silence complet... Seulement moi, et mes pensées. Avant, elles me faisaient peur... Mes pensées. Mais maintenant, je ne les crains plus.

À vingt heures tapante, je quitte la bibliothèque après avoir soigneusement rangé mon portable et mes quelques livres dans mon petit sac à bandoulière. Je m'arrête et souris lorsque je remarque qu'Élie et Tyler sont appuyés contre le mur de l'établissement, et s'embrassent en riant.

— Qu'est-ce que vous faites ici? Les interrompis-je, en m'avançant vers eux.

Ils se retournent vers moi, tout sourire, et Élie se détache de Tyler pour s'approcher de moi et accrocher son bras au mien.

— Nous savions que tu serais là! On voulait savoir si tu voulais nous accompagner au cinéma.

Un rire s'échappe de mes lèvres. Je marche avec Élie, jusqu'à Tyler.

— Tu aurais pu m'envoyer un texto, ça aurait été plus simple.

Elle sourit étrangement. J'ai l'impression qu'elle me cache quelque chose.

— Je savais que tu dirais oui... alors comme ça, on est déjà tous ensemble!

Je souris et jette un œil vers Tyler, qui acquiesce sans ajouter quoi que ce soit. Le vent frais d'avril est bien ressenti... Il faisait plutôt chaud, ce matin, alors je n'ai pris qu'une petite veste... Ce soir, par contre, je meurs de froid.

Je ne relève pas le fait qu'Élie et Tyler n'ont pas l'habitude de m'inviter à leur soirée entre amoureux, et accepte en me disant que je pourrai bien réviser mon exposé d'anglais demain.

Puisque le cinéma n'est qu'à quelques minutes de la bibliothèque, je laisse ma voiture dans le stationnement et marche avec Élie et Tyler. La représentation n'est qu'à vingt-heures trente, ce qui nous laisse une demi-heure à perdre.

— Jace ne t'a pas recontacté?

Je secoue la tête.

— Pas depuis qu'il m'a dit qu'il avait besoin de temps pour réfléchir...

Élie me regarde, l'air désolé. Si Jace a eu envie de s'éloigner de moi, ce n'est pas de sa faute, à elle, mais de la mienne. J'aurais dû être plus claire avec lui dès le début. Il ne m'intéresse plus depuis que j'ai tourné la page, il y a longtemps... Pourtant, c'est moi, qui l'aie laissé m'embrasser, il y a quelques mois, alors que j'étais ivre et qu'il était le seul à être venu vers moi pour me consoler.

— Il te pardonnera. Ce n'est pas comme si tu lui avais sauté dessus, non plus! Il t'a embrassé, tu l'as laissé faire, et c'est tout.

Je hoche la tête. C'est vrai, mais j'aurais au moins pu lui dire directement qu'il n'y aurait rien, entre lui et moi...