Atralean II - L'enfant Des Marais Perdus

VIII. Mise à feu.

Le jour se levait tout juste sur Atralean lorsque Lucius Marekala rejoignit Ignea dans le hall principale, ses bottes claquant contre le marbre froid du sol. Elle ajustait sur ses épaules une longue cape sombre brodée de fils d'argent qui dessinaient d'étranges motifs, principalement des spirales. Il l'observa quelques instant avant de s'approcher d'elle et, d'une voix basse et rauque, il interrogea :

« Est-ce vrai cette histoire d'éveil du Marécage ?

La Dame eut une légère hésitation face à l'interrogation de Lucius mais elle laissa un rictus étirer ses lèvres et caressant du bout de ses doigts la lame du sabre attaché à sa ceinture, elle ricana :

- Je suppose que c'est Alouan qui vous en a parlé.

- Oui.

- Tout ce qu'a pu vous dire Alouan est réel. S'il omet parfois, jamais il ne ment. C'est parfois un problème.

L'homme se figea un instant, avant de demander avec méfiance :

- Était-ce une chose qu'il n'avait point le droit de révéler ?

- Non, pas du tout. Si ça n'avait pas été lui, quelqu'un d'autre l'aurait fait. Ce n'est pas un secret.

- Alors pourquoi cet air froid ?

Ignea se tourna vers le sieur Marekala dont la capuche était abaissée. Il l'observait suspicieux de ses yeux clairs. La sublime femme souffla, mi-moqueuse, mi-hautaine et, penchant la tête sur le côté, elle lâcha :

- Je ne vous connais pas Lucius. Et je ne vous fais pas confiance. Ne vous étonnez pas de mon manque d'entrain à vouloir mettre au courant tous les nouveaux venus qui viennent toquer à ma porte d'événements qui m'ont touchée particulièrement.

Ses phrases claquaient, glaciales, dans l'air. Mais il ne se laissa pas impressionné pour autant, et tout en mesurant ses paroles, il rétorqua :

- Je ne suis certes, qu'un nouveau venu, pourtant ma puissance est incontestée. Et je n'ai pas pour projet de me dresser contre vous. Vous gagneriez beaucoup à m'avoir comme allié.

- C'est ce que nous verrons !

Ignea fit volte face, ses cheveux virevoltant dans l'air avec grâce en suivant le mouvement, et elle prit la tête du duo pour se rendre dans les marais de l'Est. Ils s'enfoncèrent alors dans le brouillard, guidés par leur connaissance du marécage. L'ex-dame du marécage faisait du mieux qu'elle pouvait pour dissimuler son dégoût à l'idée de devoir se rendre dans un lieu fourmillant de créatures dont la moitié l'exécrait. Mais elle devait mener son enquête sur l'héritier Faes et peut-être qu'avec un peu de chance, pourrait-elle mettre la main sur lui. Et alors, elle n'aurait plus à organiser ce foutu bal. Au moins, les habitants de Keirbourg lui étaient-ils moitié moins hostiles que ceux du marais brûlant, l'ancien domaine de la lignée du feu. Ces derniers avaient une réelle aversion envers la Dame, non pas qu'ils appréciaient leurs anciens maîtres, mais peu étaient ceux qui ne haïssaient pas Ignea et ce n'était très certainement pas dans cette zone du marais qui avaient abrité les êtres qui l'aimaient le moins au monde que les choses allaient s'arranger. Cela, Ignea n'en avait rien faire. Elle n'était pas là pour être aimée mais pour régner. À quoi bon l'amour ? Cependant mieux valait contrôler cette haine. Une idée germa soudain dans son esprit. S'adressant à son compagnon, sortit de sa ceinture une dague gravée de flammes et ornée d'un rubis :

- Depuis la mort d'Orion et de Loena, le marais brûlant n'a plus de chef. Puisqu'il semble que vous haïssiez cette famille... Je vous confie leur terre et ses habitants. Maîtrisez les.

Ravalant sa soudaine surprise, Lucius plongea dans une révérence avant de se lever. La satisfaction le gagnait lorsqu'Ignea lui tendit l'arme. Il reconnu le couteau d'Orion, celui qui se transmettait dans la lignée de feu depuis le commencement. En prenant possession de leur dague, il prenait officiellement le contrôle de leur domaine. La Dame d'Atralean, qui gardait sur elle cette arme seulement pour se remémorer sa victoire sur ces ennemis, plongea son regard intransigeant dans celui du nouveau seigneur des marais brûlants et expliqua tout de même :