XVIII. Fées.

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Alouan avait repris les "Légendes noires et autres mystères" dans le but de poursuivre ses recherches. Les mots du marais tournaient dans son esprit et ne le lâchaient plus. Trouve les fées.
Si il s'agissait d'un futur ennemi, connaître sa nature permettrait peut être à Ignea de mieux l'appréhender. Peut être cela la soulagerait elle et peut être en sera-t-elle ravie... Si une menace de profilait, ils devaient le savoir.

Toujours aussi confortablement installé, l'enfant tournait les pages. Depuis sa discussion avec la Dame, la veille, il ne l'avait pas recroisée. Tout comme il n'avait pas revu Lucius Marekala. Il savait cependant que son amie et le nouveau dirigeant des marais brûlants n'avaient pas été ensembles. Ce dernier était resté sur ses nouvelles terres. Lorsqu'Alouan avait demandé à Ignea si elle savait quand il reviendrait, elle lui avait répondu qu'elle n'en avait aucune idée et absolument rien à faire.
Après cela elle s'était engouffrée dans un couloir et avait disparu une journée entière. Journée durant laquelle Alouan s'était ennuyé comme un beau diable.

La lune s'élevait à nouveau à nouveau dans le ciel. La pénombre dans laquelle était plongée la salle du trône ne l'avait pas empêché d'y retourner pour poursuivre sa lecture du grimoire trouvé dans le mystérieux caveau. Éclairées par une simple chandelle, les pages du livre continuaient de livrer leurs secrets.

Le petit garçon était captivé par cette pluie d'informations qui lui tombaient dessus comme du pain béni.

C'est alors son regard affûté et attentif se posa sur une page donc le bord écorné semblait se dédoubler. Il leva la feuille de papier et du bout des ongles se mit à gratter le bord. Celui ci se décolla, se séparant en deux, révélant que deux pages avaient été collées entre elle. Surpris de sa trouvaille et fort intrigué, Alouan tenta de les décoller entièrement avec précision et attention. Il devait prendre garde à ne pas les déchirer. Lorsqu'enfin ce fut fait, et que les écritures jusque là dissimulées furent révélées, l'enfant se figea. Toujours dans une calligraphie fine et raffinée, un F se dessinait. Puis un é et un e. Un petit s serpentait enfin. Fées.

Il avait trouvé.

Le bout de ses doigts effleurait le papier tandis que son regard se portait à l'illustration accompagnant le texte. Une forme noire indistincte était dessinée. Il ne saurait la décrire. Elle possédait un petit quelque chose d'humain et pourtant le petit garçon en était certain, la chose nommée fée se trouvait loin de n'être qu'un être humain. Dans l'amas sombre représentant la créature, Alouan cru distinguer deux ailes immenses et disloquées, comme détruites et maléfiques. Il frémit. Était-ce cela une fée ? Il devait y avoir erreur.

Il reporta son attention sur les écritures et son plongea dans la lecture. Son cœur battait la chamade tandis qu'il dechiffrait le texte.

Une fée est une créature hybride née d'une union proscrite. Une union si rare que seuls deux cas ont été recensé. Une union entre une créature d'Atralean... Et une humaine.

Alouan en resta ébahi. Jamais il n'avait entendu parlé d'un membre du marais passant une nuit en compagnie d'une humaine. Comment cela pourrait il être possible ?
Décidant qu'il devait en savoir plus, il poursuivit sa lecture même si la chandelle qui l'accompagnait venait de brûler définitivement. Il n'en avait que faire, ses yeux voyaient suffisamment bien dans le noir.

Il faut absolument que la mère porteuse soit humaine car la fée, qui peut être mâle comme femelle, vivra sur Terre, parmi ces êtres sans pouvoirs, durant toute son enfance jusqu'à sa maturité. Mais cela ne fait pas d'elle une des leurs.

La fée posséde de légers pouvoirs qui se declanchent à l'adolescence. Des pouvoirs presque sans conséquences. Déplacer des objets, créer un léger vent, guérir d'un toucher... Et si à sa maturité, la fée poursuivait sa vie parmi les humains... Alors celle si se déroulerait comme la leur. Mortelle mais paisible. La fée pourrait enfanter et ses pouvoirs disparaitraient à sa mort.

Même si cela semblait bien trop fou au petit garçon aux yeux blancs, il se demanda soudain combien de fées avaient vécu cachées parmi les humains sans jamais ne rien savoir de leur véritable nature. Seul deux cas avaient été recensé certes, mais il connaissaît l'esprit tordu des habitants d'Atralean. Si l'un d'eux avait eu connaissance de ces infos peut être avait il tenté l'expérience... Frissonnant à cette idée, Alouan, serra la mâchoire. Une appréhension tenace s'était emparée de lui. La gorge nouée, il continua.
Les choses se corsaient.

Si la fée vient à retourner à Atralean, terre d'origine de celui qui lui a transmis ses pouvoirs, alors elle se métamorphose en ce qu'elle a toujours été au plus profond d'elle. Sa nature profonde ressort alors. C'est là qu'apparaît une bête féroce, furieuse, qui perd toute humanité. Une créature instable, un monstre loin de l'humain qu'il avait été. Une apparence héritée du parent originaire d'Atralean. Ses pouvoirs se développent alors de façon presque illimitée. Une fée possède n'importe quel pouvoir. Elle est la magie. Seulement les pouvoirs d'origine psychique ne peuvent être utilisés que si la créature possède une conscience. Or, la fée n'est des lors plus que Mort et bestialité, guidée par un instinct meurtrier qui la poussera à tuer, à détruire ce qui se trouvera sur sa route. Telle est sa nature profonde. Tel est ce qui la guide.

Mais...

Il y avait un mais. Un "mais" qui glaça l'enfant. Car l'écriture de ce mais semblait différé de celles des autres informations. Il ne savait pas qui avait écrit ce fichu bouquin mais il était informé. Très informé.

Mais l'observation des deux cas recensé, qui résident aujourd'hui dans les marais perdus, oubliés de tous, et qui sont principalement endormies, en hibernation constante, a révélé d'étonnantes capacités.

S'en suivait une série d'annotations.

Tempête déclenchée ayant ravagé les marais perdus lorsque l'ancienne a pousser un rugissement.

Dons d'apparaître et de disparaître.

Incendie déclenché lors d'un combat.

Conclusion : Les émotions violentes de ses créatures les rares fois où elles se réveillent provoquent l'éveil bref de leurs dons.

Ces fées restent inoffensives, là où elles sont. Dénuées d'une véritable conscience, elles ne peuvent user de leurs dons et restent donc sous le contrôle du marais perdu, en exil.

Cependant, si une fée venait à éveiller sa véritable nature tout en conservant sa conscience, le mélange d'intelligence et de puissance mortelle ferait d'elle une des plus puissantes créatures de tous les temps.
Plus puissante que le seigneur d'Atralean lui même et que tout ceux qui pourraient lui succéder.

Moyen d'échapper à ces créatures :

aucun.

Alouan referma le livre en déglutissant. Pour la première fois depuis des siècles il avait l'air malade. On était bien loin des petites créatures adorables et ailées qui distillaient le bonheur à coup de rires cristallins et de baguette magique. Bien trop loin.

Il ne savait pas ce qui se préparait mais si Atralean lui avait ordonné de s'informer sur ces créatures c'est qu'ils allaient bientôt y être confrontés.

Atralean II - L'enfant Des Marais Perdus Where stories live. Discover now