3 - Psycho likes the swing

302 29 30
                                    

La sonnerie de fin des cours me sauve et je m'échappe le plus rapidement possible de la salle 221. Lemon me rattrape.

« Putain... Ce n'est pas que je n'aime pas les maths, mais ce cours était trop long !...

- Lemon. On était en histoire-géographie.

Il se gratte l'arrière de la tête en riant.

- Tu m'en vois ravi !...

Je ris. Nous marchons vers la salle des casiers.

- Merde !...

- Quoi ?

- J'avais oublié mais j'ai orthodontiste tout à l'heure ! Ma mère va me tuer si je suis en retard !

- Tu n'as pas plus éclaté comme prétexte pour laisser ta meilleure amie en plan ?...

- Désolé Aaron, mais j'ai des choses à faire, moi. Allez, je te laisse.

Il me fait la bise et part en courant.

- À plus Lemon.

- À la prochaine, Germaine ! »

Je souris en levant les yeux au ciel de ses jeux de mots pourris. Je marche dans le couloir déjà désert du bâtiment B, et rejoins Ada aux casiers.

« Lemon n'est pas là ?

- Non. Il a rendez-vous chez le dentiste.

- Ah bah, si c'est pour qu'il soit plus beau, je ne dis pas non. Il en a bien besoin, ce con... »

Nous rions, puis prenons nos affaires avant d'aller attraper le bus qui nous ramène à notre bien-aimé domicile. Je dis au revoir à Ada, et descends à mon arrêt. Je marche dans ces rues que j'ai déjà traversé des millions de fois, distraite, en levant la tête vers le ciel gris d'automne. Je me recouvre un peu mieux de mon manteau kaki, en enfonçant mon menton dans le col de la veste. Il fait si froid !...

J'enfonce ma clé dans la serrure de ma porte d'entrée, la tourne et pénètre dans ma propriété. Mon frère Teiki joue à la console sur le canapé.

« Hoani n'est pas là ?

Il hausse les épaules. C'est vraisemblablement tout ce que je peux obtenir de l'obsédé de jeux vidéos qu'il est.

- Bon... »

Je ferme la porte à clé et monte à l'étage. Je longe le couloir et arrive dans ma modeste et sainte demeure : ma chambre. Je me laisse tomber sur mon lit. Bon sang vieux frère, tu m'as manqué !... Je souris et branche mon téléphone à son chargeur.

Je regarde attentivement le plafond, puis lève mes mains vers lui, paumes vers le sol, pour contempler l'étendue des dégâts. Mes pouces, mes index et mon majeur droit sont les plus touchés. Ils sont irrités sur le côté, près de l'ongle. J'ai tellement fait ça que mon majeur a changé de forme. La dernière phalange est orientée vers l'extérieur. Mes doigts sont rugueux et douloureux... J'aimerais qu'ils soient beaux... J'aimerais ne pas être folle...

Mais qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?...

Les gens normaux n'ont pas besoin de s'arracher la peau pour se sentir bien !... Moi, dès que j'ai une petite imperfection, je suis obligée de la retirer. À la main, avec les dents ou même avec des outils plus singuliers, comme des cures-dents ou des compas. Ça fait mal, mais je me sens tellement mieux après...

Mais je ne fais pas ça par soucis d'esthétique. Non. Je ne suis pas dysmorphophobe. La dysmorphophobie est la peur d'avoir un défaut physique, d'être laid. Moi, c'est juste que les petites peaux qui dépassent me stressent. Mais en en arrachant une, je crée une petite lésion et soulève d'autres peaux qui vont se détacher à leur tour. Alors j'en arrache encore une.

Psycho needs helpWhere stories live. Discover now