28 - Psycho's calling Raphaël

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« Allô ?...

- Allô, Anata ?...

- Oui... Ça va ?...

- Hum... Ça va et toi ?... Enfin... J'imagine...

- D'accord heu... Est-ce que tu as du temps, ou je te dérange ?...

- Tu ne me déranges pas le moins du monde. C'est toujours un plaisir de parler à cette fille géniale qu'est Miri. Que me vaut l'honneur ?...

- J'ai besoin... De tes conseils...

- Mes conseils en quoi ?...

- En garçon... Et en maladie...

- Ça a l'air sérieux. Dis-moi tout...

- Tu te souviens de ce garçon, à la fête d'Océane, ce Sasha ?...

- Évidemment.

- Et bien... Après que tu lui aies dit de s'éloigner de moi, il a suivi tes conseils, et ne m'a plus parlé. Mais, hier, il a fini par craquer et est venu s'excuser en me disant que je lui plais. Et puis... On est allés jouer à FIFA chez lui... Et il m'a pris la main. Mais j'avais peur ! À cause de... Tu sais, la dermatillomanie... Alors je l'ai repoussé, même si dans les faits, ça ne me dérangeait pas... C'était la deuxième fois que je le repoussais en disant que « ce n'était pas de sa faute » et je voyais bien qu'il commençait à se poser des questions... Alors je lui ai avoué. Et après, il a fait des recherches sur le sujet, puis le lendemain, aujourd'hui, il m'a dit que ce n'était pas grave. Enfin, que ça ne changeait rien. Il m'a félicitée de mon courage et m'a dit que je lui plaisais toujours... Il a même regardé mes mains, sans fuir !... Alors je... Je ne comprends pas comment c'est possible.

- Et bien... Ce Sasha est un garçon bien plus responsable, mature et affectueux que je ne l'aurais pensé...

- Tu ne m'aides pas là, Anata... Je veux juste comprendre... Qu'est-ce qu'il a ?...

- Il t'aime vraiment, c'est tout. Pour lui tu représentes bien plus qu'un jeu dans un cagibi, ou qu'une simple amie. Pour lui tu es spéciale, et il ne veut pas te perdre pour rien.

- Mais il n'a pas l'air de se rendre compte que je suis complètement demeurée !...

- Peut-être qu'il ne s'en rend pas compte, c'est vrai. Mais si il s'en rendait compte, justement. S'il comprenait parfaitement tout ce que ça implique, et que ça ne lui faisait pas peur ?...

- Et je ferais quoi, le jour où ça lui fera peur ?...

- Tu te poses trop de questions, Anata... Cours lui dans les bras et embrasse-le fougueusement sans te demander si oui ou non il a compris que tu es folle. S'il a cherché sur Internet, il a forcément compris, de toute façon. Fais-toi plus confiance... Je suis sûr que c'est un gars bien, Miri.

- C'est bien ça, le problème... Si un jour, je tombais amoureuse de lui, et qu'on sortait ensemble... Je serais incapable de l'embrasser. Même si au fond de moi, ça me ferait plaisir, ou un truc comme ça, je n'y arriverais pas. Et... Sérieusement, imagine-toi sortir avec une fille qui refuse de t'embrasser. Ça doit faire mal à l'égo, on doit se demander si elle nous aime vraiment, si elle ne fait pas semblant, etcétéra. Et je ne veux pas que quelqu'un vive ça, si cette personne sort avec moi... Ce serait une relation toxique, malsaine... Chacun de son côté s'en voudrait ou en voudrait à l'autre à cause de la maladie...

- Mais avant, tu ne voulais pas embrasser de gars parce que tu avais peur qu'il découvre ta maladie, n'est-ce pas ?... Mais maintenant que Sasha le sait, qu'est-ce qui t'en empêche ?...

- Je n'ai pas envie... De tout gâcher. Qu'il se rende finalement compte que c'est trop dur de sortir avec une psychopathe. Et qu'il parte...

- Mais tu veux quand même qu'il s'en rende compte...

- Oui, mais avant que je ne sois vraiment attachée à lui. Pour que ça ne me fasse pas de mal.

- Tu dois prendre des risques, Anata. Si j'ai bien compris, ta seule peur est d'être laissée tomber. Mais si tu ne fais que parler du fait qu'il va te laisser tomber, il finira par le faire. Car une fille qui se plaint tout le temps, c'est chiant. Alors vas-y à ton rythme. Ne l'embrasse pas, pour l'instant, tu as tout ton temps. De toute façon, vous ne sortez pas encore ensemble, si ?...

- Non...

- Alors attends un peu avant de te poser toutes ces questions. Le jour où tu seras confrontée au fait de l'embrasser, tu pourras paniquer. Mais pour l'instant, c'est mieux de ne pas le faire. Fais lui confiance, Anata. S'il y a bien un garçon à qui tu peux faire confiance, c'est lui, je t'assure.

- Comment tu peux savoir ça ?

Il éclate de rire et je me mors la lèvre.

- Pauvre de toi, Miri... Tu es aveugle... Le jour de la soirée d'Achy, rien que ses yeux trahissaient ses sentiments. Il ne pouvait pas s'empêcher de te regarder amoureusement, et moi, il me regardait méchamment, comme s'il était en colère contre moi. Même si le mot exact serait plutôt « jaloux ». Ça me faisait rire, alors j'ai continué à te serrer dans mes bras le plus de fois possible, en lui jetant un coup d'œil, à chaque fois. Il essayait d'agir normalement mais il crevait de jalousie !...

Il rit.

- C'était à mourir de rire !...

- Ça m'énerve...

- Quoi donc, Anata ?

- Je n'ai plus du tout confiance en moi, et donc... Je ne comprends pas que les gens puissent m'aimer... Toi c'est différent, toi tu connais ça. Tu sais que ce n'est pas de ma faute... Mais...

- Tu savais que ma sœur a un copain, actuellement ?

- Qu...

- Elle l'a rencontré en prépa, pour la médecine, il y a deux ans. Ils s'entendaient super bien, mais tu sais ce qu'on dit... « Prépa maquée, prépa ratée ». Alors ils sont sortis ensemble après. Puis Lily lui a avoué. Elle lui a dit qu'elle était malade. Il a rit, ce qu'elle a pris très mal sur le moment, puis il a dit : « Sérieusement Lily ? Tu croyais que je ne le savais pas ? ». Et finalement, ils s'aiment vraiment beaucoup, malgré tout. La preuve, elle l'a même présenté à nos parents.

Mes mains tremblotent en tenant mon téléphone.

- Alors tu vois ? Il existe des gens assez biens dans ce monde pour sortir avec une malade mentale. Et elle a la même maladie que toi, Anata. Alors toi aussi, je suis sûr que tu pourras trouver un super copain.

- Est-ce qu'elle... Le laisse l'embrasser, ou lui prendre la main ?...

- Je ne devrais peut-être pas te le dire, car elle ne l'a pas dit quand elle l'a présenté à mes parents, ce qui est logique, mais ils ont même couché ensemble. Alors il a vu son corps. Mais des fois, l'amour passe au dessus de l'apparence physique. C'est ce qu'ils m'ont appris, tous les deux.

Je reste bouche bée. Vraiment ?... C'est possible ça ?... D'une main, je passe l'ongle de mon pouce sur les irritations de mon index. Ça fait mal, mais c'est la vie... Enfin, ma vie. Tout le monde n'est pas aussi fou que moi.

- Anata...

- Si tu n'as plus rien à me dire, je vais te laisser...

- Merci beaucoup, Raphaël. Merci infiniment.

- Il n'y a pas de quoi, chérie. À plus !

- À plus... »

Il raccroche, et j'entends les quelques sonneries me le signaler, puis j'éteins mon téléphone. Je m'allonge sur mon lit et regarde le plafond.

Je suis en vacances... La meilleure période de l'année, où l'on peut dormir autant qu'on veut, sortir avec ses amis et surtout, ne rien faire. Et « ne rien faire » a parfois du bon. Je pousse la peau de mon doigt le plus possible, pour la retirer, et ferme les yeux, soulagée.

Merci Raph'... C'est cool d'avoir des amis comme toi...

Psycho needs helpWhere stories live. Discover now