Chapitre 13

1.3K 105 65
                                    

Une semaine s'est écoulée depuis cet après-midi troublant.
Celui de mon premier baiser.
Finn et moi n'en n'avons pas reparlé. Les mots qu'ils m'avaient adressés m'avaient semblés clairs, bien que blessants, et je n'ai pas souhaité insister. J'aimerais pourtant revivre cette scène, encore et encore, pour tenter de comprendre ce qu'il s'est exactement passé. Oui, nous nous sommes embrassés.
Mais comment ? Comment cela a t'il pu se produire sans que je ne m'y attendes, sans que je n'ai la moindre suspicion. Je doute que l'instant était planifié pour Finn mais, tout de même, j'aurais du le comprendre lorsqu'il a parlé de s'entraîner.
Et j'aurais du refuser.

J'aurais du refuser car,  même si depuis des années je me suis entêtée à ne pas tomber amoureuse ou à ne pas ressentir le moindre sentiment pour quiconque, je me suis toujours plus ou moins surprise à imaginer de quelle manière mon premier baiser se déroulerait.
Et, au final, je ne pense pas en être satisfaite. La personne qui me l'a donné ne me dérange pas, au contraire, à cet instant je n'aurais pas pu imaginer quelqu'un d'autre à sa place mais, la manière et le contexte dans lequel cela s'est passé me gênent.
Je ne voulais pas que mon premier baiser soit un entraînement. Qu'il ne serve qu'à s'assurer de ne pas paraître ridicule sur scène, devant tout le monde. J'aurais souhaité qu'il soit plus que ça. Mais, les mots de Finn m'ont bien prouvés qu'il ne l'était pas. Une simple formalité pour lui.
Et j'ai mal.

J'ai mal parce que, pour la première fois depuis deux ans, je me sens heureuse. Je n'ai plus cette idée préconçue d'aller en cours pour échapper à mon père, en sachant que cela me soulagera. Non. Aujourd'hui, et depuis bientôt deux mois, je vais en cours en ayant pertinemment conscience que je vais le voir. Que nous allons passer du temps ensemble. Et cela me rend heureuse. Passer mes mercredis après midis chez lui pour répéter me rend heureuse. Rester une heure de plus à la bibliothèque le lundi soir pour l'aider à réviser me rend heureuse. Marcher à ses côtés pour aller au lycée me rend heureuse. M'asseoir avec lui près de mon coin de grillage, celui que je tenais tant à garder pour moi toute seule. Et pourtant, je l'ai laissé venir. Je l'ai laissé chambouler mon quotidien. Je l'ai accepté, je l'ai fait entrer dans mon esprit et dans mon cœur. 

Et cela m'effraie également. Savoir qu'une personne décide de mon bonheur, qu'elle le tient entre ses doigts, si fragile qu'il suffirait d'un claquement de ceux ci pour le briser.
Mon bonheur.
Comment accepter le fait que mon bonheur dépende d'une personne ?
C'est effrayant. Et cela l'est encore plus lorsque nous savons pertinemment que cette personne n'a pas besoin de vous dans sa vie pour être heureuse, qu'elle l'était déjà avant que vous n'entriez dans son quotidien. A tout moment, cette personne peut vous laisser tomber, ou simplement vous faire du mal, peut être même intentionnellement. Et c'est exactement ce que j'ai ressenti lorsque Finn a prononcé ces mots il y a une semaine. Ces mots, ces simples mots qui se sont échappés de ses lèvres, peut être trop rapidement, peut être sans y réfléchir.
Ces mots. Ces mots m'ont blessé.

Une porte de casier claque à mes côtés. Je tourne la tête.

"-Je ne vais pas pouvoir répéter cet après midi. Ou en tout cas pas aussi longtemps que d'habitude, déclare Finn en fermant son casier à clé.

-Pourquoi ? je demande, marchant à ses côtés.

-Tu te rappelles de ce bal d'hiver, celui auquel tu ne peux pas venir ?

-Oui ?

-J'ai invité quelqu'un. Alors il faut que j'aille m'acheter un costume. Ma mère m'a donné un peu d'argent, je devrais pouvoir trouver quelque chose de pas mal, dit il en souriant.

-Qui est l'heureuse élue ? je demande en feignant l'enthousiasme alors qu'à ce moment précis, j'ai simplement envie de le planter là et de rentrer chez moi.

Heal me • Finn WolfhardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant