Nek...Quoi ?

37. Messes basses

Dans le studio d'enregistrement c'est une autre ambiance. L'équipe s'est vite remise de ses émotions et accompagne le brun dans ses couplets. C'est un autre Ken que je perçois. Ce n'est plus le Ken nonchalant que j'ai l'habitude d'aborder. Il est à l'écoute, il est vivant. Il est animé par ce je-ne-sais-quoi qui le transforme totalement. Ce soir, j'ai affaire à un Ken passionné.

Framal me cache ensuite la vue du beau brun pour échanger deux trois mots avec l'ingénieur son. Ce n'est pas plus mal après tout. Je commençais à faire une fixette sur le rappeur.

- Tout va bien ? J'entends à ma droite.

Hakim se pose à côté de moi et m'offre un léger sourire auquel je réponds timidement. J'hoche la tête positivement et il reprend.

- Faut pas rester dans ton coin.

- J'observe, c'est tout.

- En tous cas nous, on mord pas.

Je souris à nouveau et je porte mon attention sur Ken lorsque je l'entends chantonner. Un doux frisson me parcourt l'échine. Je ne sais pas ce qui me prend.

- Il se passe quoi avec mon frère ? Demande-t-il, soudainement.

Je suis frappée par sa franchise. Quand on voit Hakim, on est loin de se douter que derrière ses airs de nounours grand format se cache en fait une commère. Mais c'est normal finalement, c'est son frère. Je me racle la gorge.

- Rien de plus que ce que tu as vu avant hier.

- Donc il se passe un truc.

Je réprime un nouveau sourire mais cette fois-ci c'est nerveux.

- Je suppose que oui.

Je regrette mes mots à peine sortis. Mais je suis prise de court. Entre son frère et moi c'est ambigu, certes, mais à part quelques baignades et échanges linguistiques, j'ignore désormais si je veux vraiment aller plus loin.

Avant, la réponse était évidente. Mais depuis que Ken est revenu c'est comme si j'avais changé d'avis. Et je le sais, au fond, que je fais une grossière erreur. Parce que je me prive d'une relation que lui-même ne se priverait pas s'il était à ma place.

Et pourtant c'est pas faute d'avoir envie. Je veux d'aller plus loin avec Idriss parce que je découvre une facette que je n'avais jamais encore perçue chez un homme et ça me plait. Mais dès que les choses commencent à être un peu plus sérieuses, je repense tout de suite au brun à la voix mélodieuse et notre dernière étreinte. Je sais que ce n'est que passager.

- Fram' il fait le bad boy mais c'est une guimauve, façon.

Je fronce les sourcils et lui demande de m'expliquer, il s'exécute.

- C'est bon lui il croit qu'on n'a pas capté son jeu. Il fait crari il s'en fout des meufs mais en vrai quand il s'intéresse à quelqu'un c'est déjà sérieux dans sa tête, il s'imagine des trucs...

Ses mots me mettent mal à l'aise mais je l'incite à continuer, tout en espérant que je me fasse des films et que ce qu'il va me dire est bien loin que ce que je redoute.

- J'vais pas vendre mon reuf, t'es fou. Juste... je pense qu'il est piqué et que toi, non. Donc si c'est le cas, éloignes-toi en douceur parce que c'est bibi qui va ramasser les pots cassés. Et bibi c'est moi, il précise lorsqu'il discerne mon incompréhension.

Mon cœur rate un battement et je déglutis. Je ne m'attendais pas à ce genre de discours. Mon premier reflexe est d'abord de regarder en direction de Framal pour m'assurer qu'il n'ait rien remarqué. Fort heureusement, il nous tourne encore le dos.