JOUR 1 - Le nuage noir de la vérité

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  • Dedicated to Joumana Zeghaib
                                    

Une voiture de police se dirige vers le nord, tous les gyrophares allumés, actionnant la sirène comme s'il n'y avait pas assez de drame dans l'atmosphère.

Malvé se demande s'il n'y a pas eu une autre bombe qui a éclaté quelque part ailleurs. Peut-être est-ce une série d'attentats planifiés pour semer la panique.

Il se souvient du 11 septembre 2001. L'annonce du premier écrasement dans l'une des tours jumelles du World Trade Center avait intéressé le monde, mais sans plus. Lorsque le deuxième avion a foncé sur la colonne de métal et de béton sous les yeux ébahis des téléspectateurs rivés à leur écran, une terrible sensation de déséquilibre s'est installée. Mais, ce fut l'annonce des autres appareils qui venaient de s'écraser au Pentagone et dans un champ à quelques kilomètres de Pittsburgh, en direction de Washington, qui glaça le sang de tout le monde. La seule question qui trottait dans la tête de Marc-Alain à cette époque, c'était : quand se produira la prochaine attaque ? Dans cinq minutes, une demi-heure, demain ?

Tandis qu'on passait en boucle l'effondrement des tours jumelles et qu'on voyait l'immense nuage de poussière recouvrir Manhattan, l'angoisse fit place à un engourdissement. C'était comme si on s'attendait, à tout moment, d'être tué nous aussi par l'un de ces fous qui contrôlaient maintenant le monde. Il n'en fut rien, évidemment. Mais il aura fallu des semaines sinon des mois pour le commun de mortels à s'en remettre, même si une blessure comme celle-là laissait de profondes cicatrices qui ne guériront probablement jamais.

Et cette fois-ci, c'est à Montréal que la terreur vient de s'installer. Qui peut dire s'il n'y a pas une ou plusieurs autres cibles alors que les forces policières et les secours se concentrent vers le centre-ville ? Marc-Alain frissonne. Il étouffe et doit sortir de l'autobus. Heureusement, il arrive au coin de la rue Legendre. Encore quelques pas et il serait chez lui, dans la sécurité relative de son appartement sur le boulevard Henri-Julien. Il habite au sous-sol et cela le rassure un peu.

« Si une bombe éclate, au moins je serai protégé par le béton et la terre tout autour » se dit-il en hâtant le pas. Deux voitures de police passent en trombe et se dirigent vers l'est. Leurs sirènes sont irritantes. Il a maintenant un mal de tête qui lui donne des nausées. Il se demande s'il y a des analgésiques à l'appartement. Sa dernière vague de migraines l'avait littéralement scié en deux. Il avait cru mourir tellement la douleur le réduisait à la souffrance.

Encore quelque pas et il arrive au coin de Legendre et Henri-Julien. Ce qui l'attend n'est pas pour le rassurer. Une trentaine de voitures de police occupent la rue. L'une d'entre elles barre l'accès au boulevard. Un policier déroule un ruban jaune sur lequel il est inscrit « scène de crime ». Un autre agent lui fait signe de circuler. Malvé tremble de tous ses os.

« Mais qu'est-ce qui se passe ici ? » pense-t-il en cherchant à détecter où se trouve le centre de l'enquête. Des policiers se promènent, d'autres discutent au téléphone. Une voiture banalisée fait crisser ses pneus tout près de lui. Un gyrophare est placé sur le tableau de bord.

Des hommes habillés en costume noir ajustent leur oreillette et l'un d'entre eux montre un badge. Le policier soulève le ruban alors qu'un autre recule la voiture du SPVM. Un hélicoptère passe au-dessus de la tête du jeune homme qui ne sait plus quoi penser. Deux camionnettes identifiées aux couleurs de chaînes de télévision tentent de s'approcher du coin de la rue. Le policier de faction leur fait signe de poursuivre leur route. Des voitures se stationnent dans le parc adjacent. Les badauds commencent former des grappes et discutent à voix basse.

Marc-Alain se rapproche tout en se faisant discret.

« Il paraît que le terroriste vivait par là. Sur Henri-Julien, juste là. »

Le déclencheurWhere stories live. Discover now