Chapitre 9 - Vic

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- Camille tu m'écrases !

- Crois bien que j'en suis désolée, me répond-elle d'un ton narquois et, oui, un poil méprisant.

- Dégage de là ! haleté-je.

- Dégagez tous de là ! fait une voix étouffée sous moi.

Oh-oh. Marion...

- Et si Dan pouvait au passage enlever ses chaussettes de sous mon nez, ajoute ma sœur.

Nous nous relevons tant bien que mal. La violente secousse, suivie de l'inclinaison pas très naturelle du bateau nous a fait tomber dans cette position incongrue. A peine réveillée, Luna a aussitôt glissé de sa couchette, entraînant ses couvertures, et s'est étalée sur ses livres et croquis.

Quand à nous, nous nous sommes retrouvés empilés les uns sur les autres, plus ou moins dans l'ordre suivant : Marion, Dan, moi, Camille. Plus ou moins, c'est-à-dire que si j'écrase à la fois Marion et l'une des jambes de Dan, tandis que son autre pied s'est apparemment perdu près des délicates narines de ma jumelle.

Cette ridicule pyramide, nous n'en prenons véritablement conscience que lorsque nous nous redressons.

- C'était quoi, ça ? demande rageusement Marion en reprenant son souffle.

- Probablement une grosse vague, dis-je. Tu sais, ces grands trucs qui ondulent à la surface de la mer !

- Ha. Ha. Ha.

- Euh, les gars ? fait Dan après avoir jeté un œil au hublot.

Je me retiens de lui préciser que, jusqu'à nouvel ordre, je suis le seul de ses interlocuteurs à pouvoir me sentir concerné par l'appellation de « gars ».

- Vous ne pensez pas que ces vagues sont quand même un peu trop grosses ?

On se dirige à notre tour vers la minuscule fenêtre. Et ce que j'y vois ne me donne pas franchement envie de rire. Dehors, le ciel est noir, on n'y voit pas très bien à cause des trombes d'eau qui tombent et la mer... Dire qu'elle est déchaînée serait un euphémisme. Nous n'avons pas le temps de faire d'autres remarques qu'une nouvelle inclinaison de notre plancher nous déséquilibre.

La joue écrasée contre la vitre suite à la secousse, Luna écarquille soudain les yeux de terreur et glapit. Puis elle se laisse glisser à terre, la tête dans les mains.

- Non, non, non, non... répète-t-elle comme un mantra.

- Hé, Luna ! s'exclame Camille.

- Qu'est-ce qui se passe ? m'inquiété-je. Luna, ça va ?

Elle se bouche les oreilles et ferme ses paupières le plus fort possible. Elle donne l'impression de vouloir se trouver partout sauf ici, sur ce bateau. Quoi qu'elle ait vu, ce n'est pas bon du tout.

Une nouvelle embardée me précipite au sol. Je sens le bateau tanguer dangereusement sous moi et mon estomac se serre.

Que les choses soient claires : quoi qu'ai pu en dire ma sœur, je n'ai pas le mal de mer. J'ai simplement eu la mauvaise idée de manger des moules à Rome hier midi, et elles ne devaient pas être très fraîches.

En principe, donc, je vais maintenant mieux.

La porte de la cabine s'ouvre soudainement, et la tête de Paul apparaît dans l'encadrement.

- Les enfants, vous êtes tous là ?

- Oui !

- Tout va bien ? Ecoutez, le capitaine nous a averti, nous risquons de mettre plus de temps que prévu à arriver à Messine.

La fille de la LuneWhere stories live. Discover now