Chapitre 16 - Dan

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 La nuit est noire, la lune de plus en plus ronde. Je regarde autour de moi. Je suis seul. Seul... Je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression que je ne devrais pas l'être. Comme si il manquait quelque chose.

Sans savoir ce que je cherche, je m'éloigne de la clairière et m'enfonce dans la forêt. Je marche longtemps, je crois, mais ne trouve rien. Mes yeux sondent l'obscurité à la recherche d'une source de lumière, n'importe laquelle.

Lumière, oui, c'est ça ! C'est ce qu'il manquait, une lumière, argentée et... un animal, peut-être ? Je reprends mes recherches, avec ardeur, j'écarte des branches devant moi et j'ai soudain le souffle coupé. Devant mes yeux se dresse un temple qui... brille de noirceur ? C'est possible ça ?

Je me glisse parmi la foule d'ombres qui converge vers l'entrée du temple. Quand je passe les immense colonnades sombres, je remarque aussitôt l'immense statue qui tient place à l'intérieur. Il s'agit d'une femme monstrueuse, aux ailes et aux cornes de démon. Ses orbites blanches semblent me fixer, je retiens ma respiration. Ses lèvres se retroussent en un rictus qui dévoile des dents pointues... et je comprends soudain que ce n'est pas une statue qui est assise sur le trône à l'intérieur du temple.

Je hurle.

Fais volte-face.

Et je me réveille. En tombant de ma couchette, je me suis cogné l'arrière du crâne.

Un coup d'œil à ma montre : 2h57. Je reste un long temps par terre, le cœur battant la chamade. Je n'ai pas la force de remonter sur mon matelas.

Les images de mon rêve restent gravées dans mon esprit. Je me demande si je suis le seul à avoir fait ce cauchemar. Je me souviens maintenant que la clairière dans laquelle je me trouvais au début est celle dans laquelle la biche avait coutume d'apparaître. Son absence n'est pas bon signe.

Je me force à prendre de grandes inspirations pour retrouver mon souffle, et m'efforce à me concentrer sur le plafond au dessus de ma tête, le plancher sous mes doigts, tout sauf cette créature qui m'est apparue.

Quand je commence à sentir une torpeur me gagner, je décide de remonter sur mon lit avant de passer le reste de la nuit à même le sol. Ce brusque mouvement réveille la douleur dans mes côtes – je l'avais presque oubliée, celle-là.

Une fois installé sur ma couchette, je me tourne et me retourne un bon milliard de fois. Je recherche le sommeil autant que je le redoute : dès que je me sens sur le point de m'endormir, j'ouvre brutalement les yeux pour m'empêcher de sombrer, ce que je regrette aussitôt, écrasé de fatigue comme je le suis.

Finalement, je me saisis de mes écouteurs et lance une playlist au hasard. La musique m'aide toujours. Autant Luna peut passer des heures les yeux rivés sur le ciel, autant j'ai besoin d'écouter ou de jouer de la musique tous les jours.

J'ai commencé la guitare en CM1, parce que je trouvais ça stylé. Si j'avais su alors l'univers incroyable qui s'ouvrirait à moi ! Deux ans après, encouragé par mon prof – qui me connaît par cœur – je commençais la guitare électrique.

J'ai bossé cet instrument plus que je n'ai jamais bossé dans aucune matière. La musique est pour moi un monde à part entière, un monde magnifique dans lequel je me réfugie dès que je le peux, que j'explore le plus souvent seul, ce qui ne me dérange pas.

Mon rêve ? Ce serait de remonter le temps pour assister aux concerts de tous ces guitaristes de génie qui ont marqué l'histoire. J'ai parfois l'impression d'être né à la mauvaise époque. La plupart de ces musiciens sont morts, il ne reste d'eux que leurs chansons, comme des traces indélébiles de leur passage sur Terre.

Je finis donc pas m'endormir, bercé par la voix de David Bowie qui chante « Is there life on Mars... ? »

Contrairement à ce que je craignais, le cauchemar n'est pas revenu cette fois. Quand je me réveille à nouveau, la première chose que j'entends est la mélodie de « Here comes the sun », fredonnée par George Harrisson accompagné des trois autres Beatles.

La fille de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant