CHAPITRE 23.

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Le brouhaha infernal du marché meurtrissait mes tympans. Je détestais ce genre d'endroit, bien trop bruyant, bien trop surpeuplé pour ma personne, très peu gourmande du contact avec les autres. J'avais été contrainte d'y aller à la place de Rudy, en retard sur ses préparations pour le service de ce soir. Certains légumes lui étaient manquant et je m'étais dévouée, alors que j'étais assise sur le plan de travail de sa cuisine à contempler la façon dont il dressait les desserts.

Je m'étais faite bousculée à plusieurs reprises, manquant presque de tomber dans cette épaisse couche de neige qui recouvrait Trost, désormais plongée dans l'hiver. Mes bottes en daim étaient officiellement fichues, imbibées de l'humidité qui infiltrait chaque parcelles du tissus noble qui les recouvrait. Je les avais payées bien trop chères. Mon maigre salaire de serveuse ne me permettait normalement pas de me payer ce genre de choses, mais je m'étais privée sur un mois pour pouvoir me les offrir. Et voilà que je venais de les détruire, en ayant la bonne idée de sortir avec alors qu'il était clair que l'eau et le daim ne faisaient pas bon ménage.

Dans un long soupir, je m'extirpais enfin des différentes étales qui constituaient le marché de Trost, respirant à pleins poumons l'air frais qui s'était réchauffé au sein de la foule. Mon panier était lourd, et mes mains, bien que recouvertes de gants en laine, avaient du mal à le porter. J'étais gelée, de la tête aux pieds, malgré l'épais manteau qui me recouvrait, tombant sur mes chevilles. Lorsque je vivais encore au château, je ne sortais presque pas durant l'hiver, m'accommodant simplement d'une petite balade de quelques minutes dans les différents jardins qui entourait ma demeure. Aujourd'hui, j'avais passée la matinée dehors, sous une température affreusement négative. Mon corps tout entier me suppliait de vite rentrer, et j'aurais été folle d'y répondre par la négativité.

Les rues pavées, recouverte d'une épaisse couverture blanche et brillante sous le soleil timide, étaient plutôt animées. Nous étions un jour de week end, et les habitants en profitaient pour préparer les fêtes. Même si j'étais fortement agacée par mes bottes qui ne cessaient de s'enfoncer toujours un peu plus dans la neige, je ne pouvais réprimer le sourire qui se dessinait sur mes lèvres. Les enfants étaient heureux, là, courant partout, s'envoyant des boules de neige pour certains, choisissant leur tenues de Noël pour d'autres. Les adultes aussi, avaient l'air heureux, malgré l'environnement dans lequel nous vivions. Notre quotidien était souvent entaché par la peur que des titans puissent encore pénétrer entre les murs, et tout ravager sur leur passage. La mort avait été omniprésente ces dernières années, démultipliée par la famine, et les mauvaises conditions de vie des pauvres habitant d'entre les murs depuis la chute de ces derniers. Alors voir que ces gens étaient heureux, à l'approche de Noël, me rendait heureuse également. Leur vie à tous avait, un jour, été ma priorité, lorsque j'apprenais à être Reine. J'étais sincèrement soucieuse de chacun de mes sujets, n'espérant que le meilleur pour eux. Et même si mon existence ne servait plus à tenter de changer leur futur, leurs sourires suffisaient à réchauffer mon cœur.

Le vingt-cinq décembre ne signifiait pas simplement Noël pour moi. C'était bien plus que ça. Livaï n'avait jamais fêté son anniversaire, et n'en connaissait même pas la réelle date. Le jour de Noël lui avait été attribué par ses camarades, lors de son arrivée au bataillon d'exploration et, je devais l'avouer, cela lui allait plutôt bien. Il était une petit chose précieuse, fragile et d'une douceur infinie lorsqu'on creusait assez pour s'en apercevoir. Il était ma petite étoile, qui méritait qu'un si beau jour lui appartienne.

Et je devais une veste, à cette petit chose.

Alors j'avais décidé que je lui offrirait un nouveau costume pour l'occasion. Le noir qu'il possédait déjà était très bien, mais j'avais du le recoudre après l'avoir percé d'une de mes flèches et du renouveau ne faisait de mal à personne. J'économisais depuis mon premier salaire pour ça, ne voulant lui offrir que la meilleure qualité possible.

La Princesse déchue. (LivaïxReader)Where stories live. Discover now