Chapitre vingt-trois : Oskar

313 28 0
                                    

Six ans plus tôt.

    C'était presque un rêve éveillé. Elle dormait dans mon appartement, dans mon lit et dans mes draps. Je ne me lasserai jamais de la regarder dormir. Elle à cette manie de dormir sur le côté et en diagonal du lit. Nos jambes finissent souvent enchevêtrées par manque de place et je dors au bord du lit mais j'aime ça. La sentir dans mes draps. L'odeur du shampoing qui remplace celle de la lessive parce qu'elle se lave les cheveux avant de dormir. J'aime la voir s'étirer comme si elle était seule dans le lit puis se blottir contre moi comme un koala.

- Ne me dis pas qu'il est sept heures.

- Trente.


    Elle se réveille d'un bond, saute dans le premier vêtement qu'elle trouve, remonte ses cheveux en une queue de cheval en jurant à chaque seconde. Elle est incapable d'être à l'heure et pourtant elle arrive toujours à ne pas se faire recaler à l'entrée des cours. Elle se dirige dans la cuisine. Je peux la voir courir dans tous les sens, attrapant une pomme qu'elle fourre dans son sac et une banane qu'elle commence à éplucher. Elle s'arrête à quelques mètres de l'encadrement de la porte de la chambre et me regarde. La bouche autour de la banane de manière obscène et provocatrice. Puis elle se met à faire des va-et-vient. Ma queue brandit instantanément. Puis elle croque dedans et sourit.

- Promis, ce soir, c'est toi que je dévore !


    Puis elle claque la porte. La tornade Sonnenstrahl est partie. Cette femme est un rayon de soleil au milieu d'une tempête. Dire qu'on est marié depuis trois ans et que ça fait quatre ans que je l'ai kidnappée. Je ne regrette pas une seule seconde mon choix même si j'ai bien cru que j'allais la laisser sur le bord de la route à plusieurs reprises la première année.

    A Heidelberg, il n'y a quasiment que des étudiants. Certains ont mon âge mais globalement, je me fais chier. Heureusement qu'il y a Franck et Jan. Sinon, je crois bien que je n'aurai pas choisi la meilleure université du pays pour qu'elle fasse ses études. On se serait posé à Munich ou Berlin, les accès sont en plus beaucoup pratiques.

    Je me lève, me prépare un café tout en consultant le journal mondial sur mon téléphone. Je souris en lisant l'article : "Dans río Magadalena, le business des bananes est en hausse. Troisième producteur de bananes du continent sud américain, la Colombie importe pourtant la quasi-totalité de ses ressources. Avec les difficultés d'approvisionnement, et d'exportation, la production artisanale dans le río Magadalena a pénétré le marché officiel mondial. De nombreux jeunes travailleurs trouvent de l'emploi dans ces bananeraies en pleine expansion."

    Je regarde le journaliste qui a rédigé l'article "Par Lisbet Larsen, envoyée spéciale". Ouais, c'est ça. Lisbet est bien au chaud à Copenhague dans son manoir du XVIIIème à ne surtout pas manger de bananes mais des petits plats préparés par ses domestiques.

    Je range mon portable dans ma poche avant de claquer la porte derrière. Tant pis si le café refroidit, de toute façon, j'en prendrai un autre chez Franck mais il ne faut pas que je sois en retard. Je monte dans ma voiture et m'allume une cigarette en suivant. Mila déteste que je fume dans l'appartement. J'ai le droit à une propagande anti-tabac à chaque fois que j'ose sortir une cigarette. Des fois, je fume en cachette sur le balcon mais c'est un véritable radar. Elle sent tout, entend tout, voit tout.

    Un certain Andrew Maguire veut me rencontrer pour une nouvelle mission. J'espère qu'elle est bien payée et en Europe car je rentre tout juste d'une mission d'une semaine au Guatemala. Ces pays où règne la drogue sont les plus faciles et les mieux rémunérées. Les gens sont plus focalisés sur la guerre entre gang ou à prendre le pouvoir qu'à se soucier d'un pauvre mercenaire qui vient faire le boulot à la place des autres.

[L.3] LOVE & POETRYWhere stories live. Discover now