Chapitre I : La Vallée d'Iya

116 9 30
                                    

En la vallée verdoyante et solitaire d'Iya, à l'orient de l'île de Shikoku, se tapissait un hameau enchâssé entre des pics escarpés et des forêts profondes. Tel un havre de paix, ce lieu paisible ne pouvait être atteint qu'en suivant un tortueux sentier de terre, serpentant avec agilité parmi les montagnes majestueuses.

Au sein du hameau, il n'y avait qu'une poignée de familles, qui vivaient dans des maisons en bois, érigées avec les anciennes traditions et reliées par des sentiers de terre battue, agrémentés de lanternes et de fleurs. Les villageois, artisans et paysans, subsistaient grâce à la terre et à leur savoir-faire. Ils labouraient les rizières, les potagers et les champs de légumes, tandis que leurs ateliers débordaient d'objets en bois et en bambou, tels que des paniers, des nattes et des ustensiles de cuisine, qu'ils vendaient aux environs. Les sources d'eau chaude, célèbres à travers les régions, surgissaient naturellement des montagnes et se prêtaient aux bains publics et à la pisciculture.

Le hameau était doté d'une école et d'un temple shintoïste, deux piliers de la vie communautaire et spirituelle. Les villageois, fidèles à leurs ancêtres, se rassemblaient régulièrement pour célébrer les festivités et les rituels, exaltant la nature et les divinités. Les autochtones étaient fiers de leur mode de vie humble et respectueux de l'environnement, et prenaient plaisir à partager leur culture et leur hospitalité avec les voyageurs et les visiteurs.

C'est la famille Fukuda qui s'installa la première sur cette terre fertile, où elle cultivait le riz depuis plus de deux cents ans. Vénérée pour sa longévité, sa fidélité aux coutumes et son dévouement envers le village, la famille était un symbole de fierté pour la communauté.

La cadette de la famille Fukuda, Yoko, malgré son jeune âge de dix-sept printemps, attirait déjà l'attention de tous. Elle se distinguait des autres femmes du village, non seulement par sa tenue vestimentaire, mais également par son comportement. Elle avait une silhouette élancée et gracieuse, le visage en forme de cœur et les joues creuses. Sa peau, tannée par le travail de la terre, était lisse et radieuse. Ses yeux, d'un bleu profond comme des saphirs, étaient petits et vifs, surmontés de sourcils élégamment dessinés. Son regard distrait et brillant la rendait unique. Son nez, fin et délicat, s'harmonisait parfaitement avec ses lèvres pulpeuses qui laissaient voir de fines fossettes quand elle souriait. Sa voix était douce et mélodieuse, comme sa personnalité, et ses voisins la considéraient comme bienveillante, généreuse et honnête. Elle avait une chevelure flamboyante d'un roux auburn qu'elle coiffait en un chignon shimada, semblable à celui des jeunes filles célibataires de son âge et des geisha. Elle aimait y ajouter des kanzashi, des épingles à cheveux ornées de fleurs de prunier ume, symboles de santé, de force et d'élégance, que son grand-père considérait comme une protection contre les esprits maléfiques. Elle préférait les kimono sobres aux vêtements fantaisistes.

En ces instants où elle n'aidait pas ses parents aux travaux des champs ou dans les tâches ménagères, Yoko était une rêveuse qui s'évadait dans les nuages. Elle connaissait les convenances et les usages, mais elle manquait d'élégance et d'habileté. Contrairement aux autres jeunes filles du village, qui nourrissaient des rêves de vie citadine et devenir geisha, Yoko ne s'intéressait guère à de telles futilités. Elle était plutôt réservée, peu sociable et son grand-père Tamotsu était la seule personne à qui elle se confiait vraiment.

Tamotsu était un vieil homme au visage buriné par les âges et les aléas de la vie. Sa chevelure d'un gris argenté était nouée en un chignon serré et soigneusement tressé, et retenue par une épingle en bois finement sculpté. Sa barbe blanche était abondante, tandis que ses sourcils broussailleux accentuaient son regard perspicace. Ses lèvres minces et fermées semblaient chercher les mots avec prudence. Habillé d'un kimono en soie bleu nuit orné de fleurs, et portant un haori court décoré de dragons et d'oiseaux, hō-ō, Tamotsu avait une prestance naturelle malgré sa petite taille et son pas hésitant. Il était un sage, écoutant avant de parler ou d'agir, et était réfléchi et pacifique. Malgré son grand âge, Tamotsu était plein d'énergie et aimait prendre soin de lui et de son environnement, se promenant dans les jardins du village à la recherche de plantes médicinales et de réponses aux questions les plus profondes de la vie. Il était respecté et vénéré par tous ceux qui le connaissaient pour sa patience, sa gentillesse et sa sagesse. Tamotsu aimait particulièrement partager ses connaissances avec sa petite-fille bien-aimée, Yoko, qui était sa confidente et son élève.

Les Élémentalistes T1 - Le Forgeur de CauchemarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant