Chapitre 43

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Prendre l'avion fut désespérément facile pour Drago. Il prétendit s'être fait dépouiller et ne plus avoir de papiers d'identité. Tennant Creek était un petit aéroport régional, et il put embarquer après avoir payé son billet, puisqu'il s'agissait d'un vol régional.

Au moment du décollage, Drago regretta d'avoir eu l'idée de prendre l'avion. Il maudit discrètement les moldus et leurs inventions diaboliques et il resta tout le long du vol crispé, les mains agrippant les accoudoirs, terrorisé.

Plutôt que de rejoindre Darwin — la capitale du Northern Australien — qui semblait être le choix le plus logique, Drago avait décidé de se rendre à Katherine, située à près de mille deux cents kilomètres de Alice Spring. Avec ses six mille habitants, la ville lui offrait un anonymat auquel il aspirait et il pensait y passer quelques jours, le temps de s'organiser et de se décider au sujet de sa prochaine destination.

Bien qu'il ait hâte de quitter l'Australie, Drago resta une semaine entière à Katherine. Après avoir acheté quelques vêtements et un sac à dos, il multiplia les emplois, ne rechignant devant aucune tâche. Ainsi, il fit la plonge dans un petit restauroute, nettoya les sols d'une entreprise, déchargea des camions et il cueillit des milliers de citrons dans une ferme agricole... Il n'avait pas le temps de réfléchir, travaillant jusqu'à dormir debout ou presque, refusant d'avoir le moindre temps libre.

Il n'était pas le seul saisonnier et il fit connaissance d'une poignée de jeunes dans ses âges qui voyageaient sans but, se laissant porter par leurs envies, travaillant uniquement pour manger et avoir un toit au-dessus de la tête.

Même s'il n'avait pas envie de lier des amitiés ou de discuter, Drago les rejoignit chaque soir autour d'un feu de camp, les observant et les écoutant, apprenant ce qu'il pouvait de cette vie emplie de liberté.

Personne ne demandait les raisons de leur mode de vie et le jeune homme se douta qu'il n'était pas le seul à fuir quelque chose. L'une des femmes du groupe lui rappelait Harry, dans sa façon de parler. Elle semblait être une force de la nature, prête à affronter n'importe quelle difficulté pour atteindre ses objectifs.

Lorsqu'elle se laissa tomber près de lui avec un sourire amical, il se tendit légèrement, craignant d'être démasqué. Comme s'il n'avait pas sa place parmi cette troupe hétéroclite de moldus.

Cependant, elle murmura, gentiment.

— C'est ta première fois, non ? Je veux dire, voyager comme ça, sans attaches ?

Drago hocha prudemment la tête, la surveillant du coin de l'œil. Elle eut un rire amusé et lui montra ses mains, abîmées par les quelques jours de travail.

— Tu as la peau trop douce. Tu t'endurciras avec le temps, mais cette vie n'est pas pour tout le monde.

Drago se tendit, mais elle tendit la main et lui pressa le bras avec sympathie.

— Ce n'est pas un reproche ou un jugement. Je serais bien mal placée pour ce genre de chose. Certains d'entre nous aiment cette vie sans attaches, d'autres essaient de fuir leur vie trop rangée. Je parie que tu es plus dans la seconde catégorie et... si c'est le cas, tu devrais te rapprocher de la côte. Certains navires emploient des extra pour des croisières. C'est plutôt mal payé, mais le voyage est gratuit.

Drago ouvrit la bouche, puis il la referma brusquement, un peu surpris. La jeune femme lui adressa un clin d'œil moqueur.

— Ne t'en fais pas, aucune question. Tu avais juste l'air... perdu. Et épuisé.

Cette fois, Drago se frotta le visage et murmura.

— Merci. Je suppose.

Elle le laissa avec un rire joyeux, pour s'installer avec un autre groupe, bavardant aisément. Drago l'observa papillonner de groupe en groupe, souriante, détendue. Contrairement à lui, elle était parfaitement à sa place, et Drago pensa soudain que le bateau était une meilleure alternative à l'avion. Il serait plus difficile de suivre sa trace après quelques semaines en mer et même si le pays était magnifique, il n'était pas à l'aise en Australie : tout était bien trop grand pour lui.

Dès le lendemain, Drago se renseigna sur les plus proches ports qui accueillaient des escales de croisières. Il y avait pensé toute la nuit et il avait admis que c'était une excellente idée. Il voyagerait sans cesse, il serait assez occupé pour ne plus avoir le temps de penser au gâchis de sa vie et tant qu'il restait loin de l'Europe, il n'avait pas la moindre raison de craindre d'être reconnu.

L'idée de faire plus de deux mille kilomètres pour rallier Port Douglas l'effraya un peu et ce fut le dernier argument dont il avait besoin pour quitter cet immense pays, à peine peuplé.

Par chance, il savait que la ville de Darwin n'était qu'à trois heures de route et il profita du camion d'un livreur qui s'y dirigeait après qu'il eut déchargé sa marchandise.

Ils échangèrent peu durant le trajet et Drago somnola majoritairement, ses pensées revenant toujours vers Harry. Il se demandait comment il allait et espérait qu'il n'était pas trop en colère contre lui.

Hermione devait avoir découvert qu'il n'avait pas encore rejoint Alice Spring, mais elle pensait peut-être encore qu'il prenait son temps pour atteindre sa destination. Il ne lui avait pas encore envoyé de nouvelles, mais il avait prévu de le faire en quittant l'Australie. Il voulait juste la rassurer et lui assurer qu'il était vivant, mais il lui avouerait qu'il suivait son propre plan et qu'il comptait se déplacer en permanence pour ne plus être retrouvé.

Ils arrivaient à proximité de Darwin quand son chauffeur se décida à engager la conversation.

— Tu as quelque chose qui t'attend à Darwin ?

Drago hésita brièvement, puis il secoua la tête avec une petite grimace.

— Non, monsieur. Je comptais prendre l'avion jusqu'à Port Douglas pour... essayer de trouver du travail sur un bateau.

L'homme se mordilla longuement la joue, puis il haussa les épaules.

— Darwin a un port qui accueille des navires, tu sais ? Le quai Stokes Hill est plutôt connu d'ailleurs. Si tu veux, j'ai un camion à charger à l'arrivée, je peux t'engager ?

Drago lui adressa un sourire reconnaissant.

— Bien sûr.

L'homme sembla satisfait, cependant, il reprit d'un ton neutre quelques minutes plus tard.

— La mer, ce n'est pas pour tout le monde. Si tu découvres que tu n'as pas le pied marin, passe par les entrepôts de Darwin et dis que tu viens de la part de Dan. Les gars te trouveront un travail.

Drago cligna des yeux puis il le remercia, la gorge nouée par l'émotion.

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