Chap. 1

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• Octobre 1347 •

Colombe attend silencieusement, assise sur la plus grosse branche d'un arbre, juste au-dessus du chemin, bien cachée entre les feuillages verdoyants de l'été. Elle entend des pas, retient sa respiration, et elle le voit enfin, lui.

-Colombe?

Elle ne répond pas. Il la cherche du regard, ne la voit pas. Elle l'observe, l'admire, avec ses cheveux bruns ébouriffés et ses vêtements découpés a même la toile qui laissent entrevoir la courbe de ses épaules, de ses reins, de ses cuisses musclées.
Elle attend qu'il se place pile en dessous de là où elle se trouve, et sans hésiter saute de sa branche. Elle lui tombe dessus et il pousse un cri tandis qu'ils s'effondrent tous les deux au sol et roulent sur quelques mètres. Anastase se relève d'un bond, son petit couteau à la main, et pousse un long soupir en découvrant la jeune femme, riant aux larmes.

-Ce n'est pas drôle. Tu aurais pu te faire mal.
-Si tu avais vu ta tête! dit-elle en riant de plus belle.
-Tu es vraiment une enfant, la sermonne-t-il en lui tendant une main pour l'aider à se relever.

Elle accepte sa main avec un sourire malicieux et se remet sur ses deux pieds, tandis que sa légère robe beige de l'été vole au rythme de ses mouvements.

-Je te rappelle que tu es plus jeune que moi, alors si je suis une enfant, toi tu es un bébé!
-Tu n'as que deux ans de plus que moi, et je suis le plus mature.
-Ne dis pas ça. Je ne t'ai pas choisi pour ta maturité. Je ne veux pas d'un homme mature. Les hommes matures sont bêtes et ne savent pas rêver.

Anastase s'approche d'elle, lui ayant déjà tout à fait pardonné sa petite plaisanterie, et vient poser ses mains sur ses hanches.

-Moi je sais rêver. Je rêve de toi. Toutes les nuits quand je dors, et tous les jours quand je vis.

Colombe sourit, et se met sur la pointe des pieds pour l'embrasser tendrement. Mais elle met très vite fin à se baiser et glisse sa main dans la sienne avant de se mettre à courir.

-Viens suis-moi.

Elle tient sa robe longue de sa main libre pour ne pas tomber, tandis qu'elle quitte le chemin et s'enfonce dans la forêt qu'elle connaît comme le fond de sa poche.

-Où m'emmène-tu?
-Chut, tu verras.

Ils trottinent un moment, et s'arrêtent devant des arbres tombés, qui forment une sorte de petite cabane.

-La tempête les a arrachés, il y a deux ans. Je me sens en sécurité quand je me cache ici. Je n'ai montré cet endroit à personne, pas même à Agnès.

Elle se tourne vers Anastase, cherchant sa réaction, mais il ne dit pas un mot et sans attendre d'avantage vient de nouveau plaquer sa bouche à la sienne, cette fois comme assoiffé.
Elle pousse un petit rire mêlé d'un cri lorsqu'il la porte pour l'allonger sous les arbres, sur la mousse verte et tendre.
Ils s'embrassent, se caressent, se mordillent. Mais ni lui ni elle ne veulent attendre davantage et précipitamment Colombe relève les jupons de sa robe et écarte les cuisses pour l'inviter à venir en elle, ce qu'il fait presque aussitôt.
La jeune femme pousse un gémissement satisfait lorsqu'elle le sent ouvrir et son intimité par la sienne, et elle cambre son dos, en s'accrochant désespérément aux épaules puissantes de celui qu'elle désire tant.
Anastase a beau commencé à connaître ce corps et ces sensations par cœur, il ne peut s'empêcher de la trouver toujours plus belle et désirable et il sent rapidement son plaisir approcher de son paroxysme. Colombe le connaît par coeur et sait qu'il va jouir, alors vite elle reprend ses esprits pour lui rappeler la règle essentielle:

-Retire-toi vite!

Il obéit et aussitôt éjacule sur le bas ventre de son amante qui sourit avec malice. Il appuie sa main sur le genoux plié de Colombe le temps de retrouver son souffle et ses esprits, tandis qu'elle essuie consciencieusement la semence avec une feuille.
Peu de personnes savent que c'est ça qui est le risque d'une grossesse, encore moins les femmes, encore moins les femmes jeunes... Mais Colombe, elle, le sait. Parce qu'elle a appris à écouter d'autres choses que la messe, et les gens. Elle a appris à lire, à compter, à comprendre le monde. Mais elle ne le connaît pas encore assez à ses yeux. Sa soif de savoir est encore plus intarissable que sa soif de désir charnel.
Elle se redresse assise et fait retomber sa robe sur elle, pour venir déposer un baiser sur la joue d'Anastase qui la regarde avec passion. Finalement il murmure:

-Épouse-moi.

Colombe éclate de rire en se relevant. Elle ne se moque pas de lui, bien sûr que non. Elle se moque de la simple idée du mariage.

-Tu sais bien que je ne veux pas me marier.

Elle fait quelques pas, prête à aller uriner un peu plus loin et éviter une infection qu'elle sait très désagréable, mais le jeune homme insiste:

-Mais il le faudra bien un jour.
-Moi je ne crois pas. Les nonnes et les putains ne se marient jamais elles.
-Mais tu n'es ni une nonne ni une putain Colombe.
-Justement. Il serait peut être temps de trouver une nouvelle catégorie de femmes célibataires dans ce monde.
-Laquelle?
-Les savantes.

ColombeWhere stories live. Discover now