Chap. 7

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-Ouvrez la cellule, ordonne le comte.

Aussitôt le garde obéit. Agnès et Colombe se précipitent dans les bras l'une de l'autre, en larmes.

-Oh Agnès, c'est fini je suis là, il ne va rien t'arriver.
-J'ai eu si peur! Je veux rentrer à la maison.
-Oui ma chérie, bien-sûr!

Colombe s'apprête à sortir des cachots, avec sa sœur contre elle, mais alors Walderic la saisit par le bras et dit tout contre son oreille:

-N'oublie pas que sa main ne sera vraiment sauvée que lorsque tu auras tenu ta promesse.

Colombe le foudroie du regard de la haine la plus farouche:

-Je sais.

Elle veut se dégager mais il resserre encore un peu plus sa prise et ajoute:

-Et ne me regarde plus jamais comme ça. Je déteste ça. Nous sommes fiancés après tout, tu devrais montrer ta reconnaissance et ton bonheur.

Colombe doit faire appelle à toute la paix de son âme pour réussir à apaiser son regard et faire ce qu'il demande. Lorsqu'il est satisfait il la lâche, et aussitôt elle part.
Elles marchent sans s'arrêter à travers tout le village jusqu'à chez elles, et Colombe referme soigneusement la porte à clef derrière elle.

-J'ai déjà fait nos bagages. Nous devons partir au plus vite, et léger. Dès que la nuit sera tombée, nous partirons.
-Qu...quoi?! Mais partir où? Qu'est-ce que tu racontes?!
-Je lui ai promis de l'épouser pour te faire libérer. Mais il est hors de question que je tienne cette promesse. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas être à lui. Et tu ne peux pas rester, il se vengerait sur toi. Nous allons partir tous les trois.
-Tous les trois?
-Anastase va venir avec nous. C'est un bon ami, il veut veiller sur nous et...

Agnès coupe son aînée:

-Tu n'es pas obligée de me mentir. Je ne suis pas Tante Adeline, ni qui que ce soit d'autre. Je sais très bien ce qu'il y a entre vous.

Colombe pâlit. Elle qui pensait avoir été suffisamment discrète, il s'avère qu'elle s'est lourdement trompée. Mais si sa sœur le sait, y en a t'il d'autres?

-...Depuis quand?
-Il y a un an je t'avais suivi dans la forêt, contrariée que tu ne veuilles pas que je t'accompagne. J'ai vite compris pourquoi...
-Oh... je vois.
-Ne t'en fais pas, je m'en fiche que vous ne soyez pas mariés. Je sais que tu ne veux épouser personne. Et j'aime bien Anastase, il a toujours été gentil avec nous. Je préfère que tu sois avec lui qu'avec le Comte.

Colombe sourit, touchée par ces paroles, et les deux sœurs s'étreignent un instant.

-Je trouve ça juste bizarre qu'il soit plus jeune que toi.
-Pourquoi?
-En général c'est l'inverse. Mais bon tu n'as jamais aimé faire les choses comme tout le monde...

Colombe éclate de rire.

A la nuit tombée, lorsque le village devient silencieux, elles quittent leur maison, emmitouflées dans leur capes et chargées de quelques sacs.
Elles doivent rejoindre Anastase dans la forêt.
Elles se dépêchent, sans un bruit, et arrivent rapidement au point de rendez-vous. Mais le jeune homme n'est pas là.

-Anastase! dit l'aînée des deux jeunes femmes, d'une voix à la fois forte et basse.

Aucune réponse. Agnès s'inquiète:

-Tu penses qu'il ne veut plus venir?
-Non. Il n'aurait jamais fait ça. Et si ça avait été le cas il m'aurait prévenu.

Elle tente de nouveau de l'appeler, mais aucune réponse.

Soudain, une ombre apparaît enfin entre les arbres.
Colombe est soulagée, et avance vers elle, la main de sa sœur dans la sienne. Mais alors, elle ne reconnaît pas ses cheveux, la forme de ses épaules, sa taille...
La jeune femme de vingt-deux ans se fige, et lorsqu'elle réalise qu'elles sont tombées droit dans la gueule du loup, il est déjà trop tard.

-Cours! hurle-t-elle a Agnès en laissant tomber ses sacs.

Mais elles n'arrivent qu'à parcourir que quelques  mètres avant de se retrouver projeter au sol, terrassées par des corps lourds.
Colombe se débat, crie, essaye de mordre et de griffer, et sent sous ses ongles un lambeau de chair s'arracher. L'homme dont elle ne distingue pas bien le visage pousse alors un cri de rage.

-Espèce de pute ensorcelée!

Il brandit son poing, et Colombe protège son visage mais alors un autre homme l'arrête dans son mouvement.

-Arrête. Le Comte ne serait pas content.
-Tu as de la chance sorcière!

Il se relève et saisit Colombe par le bras pour la forcer à faire de même. Agnès a quant à elle déjà les mains ligotées dans le dos, en larmes, assise sur un cheval, un soldat derrière elle.
Colombe continue de se débattre en hurlant comme une louve piégée, et il faut trois hommes pour réussir à l'attacher et la mettre sur un étalon. Celui qui allait la frapper s'apprête à monter derrière elle, mais celui qui l'en a empêché prend sa place, afin de s'assurer que la marchandise n'arrive pas en miettes.

ColombeWhere stories live. Discover now