Les enfants de Toulghar, tome 3, la domination

Chapitre 20

C

ette fois, l'heure n'est plus de fuir mais de combattre. Il n'y a plus d'autre endroit où aller et la mer de Siar est encore trop loin pour s'y réfugier. Les humains se rassemblent, cherchant un ultime contact avant une fin tragique. Les Thybes forment un demi-cercle autour des Toulghariens traqués et attendent le combat.

—Je ne peux pas croire que cela finisse comme ça ! s'exclame Nils de colère. Nous n'avons quand même pas fait tout ce chemin et subit autant de pertes, pour finir massacrés dans ce désert à notre tour !

La peur se lit sur les visages, même Taï ne prononce plus un mot. Il n'a pas la conscience tranquille. Lui qui a tant espéré et tout donné pour les sauver, se retrouve démuni, face à un destin qu'il ne parvient plus à déchiffrer. Les anciens lui auraient-ils menti ? Il pourrait encore sauver sa propre vie et repartir sur Terre, mais c'est quelque chose qu'il refuse. Jamais il n'aurait la force d'abandonner ceux qu'il aime à une mort aussi horrible, il ne se le pardonnerait pas. Lisbeth, elle aussi a eu cette pensée. Elle ne souhaite que la survie de son fils, à présent.

—Pars ! Fuis tant qu'il est temps ! Et ne reviens jamais !

—Non, maman ! Je refuse de vous abandonner ici. Je préfère mourir en les combattant que de fuir comme un lâche !

Les yeux rivés sur les monstres, ils ne voient pas ce qui se déroule dans leur dos. Surgi des profondeurs, le palais de cristal jaillit du sable. Le bruit est maqué par les tirs des sauraux et les hurlements de peur. Les restes de sable qui s'écoulent le long des parois s'étalent sur les vagues et disparaissent. Plusieurs grains sont portés par un vent léger et viennent fouetter la nuque de Taï. Immédiatement, il se tourne afin de comprendre. Il s'imagine voir une tempête tout au plus, mais cela dépasse toutes ses espérances. Face à lui se dresse le Molcrath dans sa magnificence. Les sauraux l'ont vu eu aussi et s'immobilisent sur le champ. Les rayons du soleil sont réfractés à la surface de la mer, créant encore plus de luminosité. Cette fois, les Toulghariens l'aperçoivent eux aussi. Pour beaucoup, c'est la première fois qu'ils le voient et n'en croient pas leurs yeux. Cette immensité de cristaux renfermant tout évènement passé sur Toulghar, est sortie de nulle part comme pour leur venir en aide. La stupéfaction crée une brève accalmie. Le Molcrath finit de sortir des flots, le sable s'écoulant encore ressemble à des petites cascades. Il est temps de trouver une issue dans ce palais. Lisbeth et ses amis se rappellent avec quelle difficulté ils ont dû y entrer auparavant. Elle prend son fils par le bras et le tire violemment.

—Vite, Taï ! Tu dois entrer là-dedans !

Nolhan lui aussi porte toutes ses espérances sur ce palais.

—Nous devons tous y aller ! En avant !

La centaine d'Alfats use ses dernières forces et court s'y réfugier. La forteresse est à moins de cent mètres, mais les vagues ne facilitent pas l'avancée. Voyant la fuite des Toulghariens vers un refuge sécurisé, les sauraux reprennent eux aussi leur course. À la vitesse où ils vont, les fuyards ont peu de chance d'y parvenir indemne. Wilmer et Zack portent sur leurs bras en croix le chef Alfat qui ne peut plus faire un pas. Il leur arrive de tomber plusieurs fois, déstabilisés par les mouvements des vagues. Les premiers arrivés près du Molcrath sont Taï et Lisbeth. Nils et Hanna ne sont qu'à une dizaine de mètres derrière. Ils entendent les gémissements des deux hommes portant Nolhan avec difficulté.

—Nous allons prendre le relais ! crie Nils. Pendant ce temps, Taï, trouve un moyen de nous faire entrer !

Le garçon et sa sœur portent le vieil Alfat pendant que Wilmer et Zack reprennent leur souffle. De leur côté, les tirs reprennent. Les Thybes commencent la bataille et chargent sur leurs adversaires avec fougue. Les tridents sont lancés, faisant plusieurs dizaines de victimes. En représailles, l'armée de sauraux ouvre le feu en rafale. Un à un, les guerriers de sable meurent en agonisant. Leurs corps s'enfoncent lentement et coulent jusqu'à disparaître définitivement. Il ne reste plus aucun survivant parmi eux. Le chef saural calme son armée mais maintient sa course.