Chapitre 3

31 5 0
                                    

William arrête aussitôt son échauffement. Dans un mouvement que l'on croirait sorti d'un film, il fait une pirouette en arrière et atterrit sur ses pieds. Il rejoint son ami aux tatamis. Mike lui attrape l'épaule, lui murmure quelque chose. Son regard se porte aussitôt sur moi. Et contrairement à cet éclat déterminé que j'y ai vu il y a trois mois, je ne vois dans ses yeux que du vide. Il ne me porte plus aucune attention, aucun intérêt. Tant mieux.

Le groupe est séparé. Mike prend avec lui quatre garçons dont Jackson. Et comme si le destin était contre moi, je me retrouve avec William, un autre garçon et les deux filles. Malgré ma présence, William reste très professionnel. Il apprend les mouvements d'attaque et de défense lentement, très explicitement pour que tous le monde puisse suivre aisément. Alors que je me demande s'il y a une chose qu'il n'est pas capable de bien faire, il hausse la voix pour reprendre le deuxième gars qui se tient mal. Il passe derrière une des filles pour la redresser à son tour. Nous enchaînons les mouvements avec plus de fluidité.

Au bout d'une heure, je suis couvert de sueur. J'ai de plus en plus de mal à tenir les enchaînements. J'en viens presque à m'énerver contre William qui, lui, transpire à peine et à encore la force de nous apprendre des enchaînements.

Nous avons une pause. Jackson me rejoint. Il a l'air vraiment très heureux de ce qu'il apprend jusqu'à maintenant. Je lui fais remarquer la présence du parti homosexuel de la classe.

 -C'est une tapette, rit-il, si ça te fait du bien, t'as qu'à te défouler sur lui.

- Pourquoi ça ?

- Pour le classement ! Tu lui en veux pas ?

Je lève les yeux au ciel, exaspéré par les pensées radicales de Jackson. En regardant vers le fond du gymnase, je vois une des filles de mon groupe se jeter dans les bras de Mike, et l'embrasser. Je fronce les sourcils. William les rejoins même, et rit avec eux. Donc ils ne sortent pas ensembles. William tape dans ses mains, et les deux groupes se reforment. Nous commençons alors les combats en duo. Les deux filles l'une contre l'autre, et moi contre le deuxième garçon du groupe. William nous tourne autour, critique, commente nos attaques et nos mouvements de défense. Alors que j'essaie en vain d'atteindre mon compagnon de combat, ce dernier s'écarte pour faire une pause.

- Tu as besoin d'une pause toi aussi ? Me demande William.

- Non, ça va parfaitement bien.

- Alors pourquoi tu n'atteins pas ta cible ? Dit-il d'un ton ironique.

Il se place alors en face de moi, en position d'attaque comme il vient de nous l'apprendre.

- Frappes-moi si ça peux te motiver, ricane-t'il.

Je ne bouge pas. Il essaie de me provoquer, et je le comprends. En fait je me demande même pourquoi il ne m'a pas déjà mis à terre car je ne doute pas un seul instant qu'il soit capable de le faire dans la seconde. Je reste là, face à lui, à le dévisager. Et puis tout à coup, il me frappe au visage. Je titube en arrière.

- Allez, réplique. Coup de pied droit, droite, gauche.

Je suis l'enchaînement qu'il vient de me décrire à un détail prêt. Je termine par un coup de pied gauche. Il reçoit bien les trois premiers coups, mais ce dernier qui était traître, le fait grimacer. Il réplique aussitôt, me mets au sol. Je me relève brusquement, l'orgueil prenant le dessus. Il garde sa position d'attaque avec méfiance.

Comme je ne bouge plus, il se redresse, et demande à l'autre garçon de reprendre le combat. William se dirige alors vers Mike. Il se tient les côtes, et sa démarche semble différente, affectée par ce qui vient de se passer. Mike laisse aussitôt tomber ses élèves pour le rejoindre. Je n'arrive pas à me concentrer sur mon combat. Je ne comprends pas ce qui se passe. Je les suis tous les deux du regard. Mike sort une trousse de premiers secours du dessous d'une banquette, et il aide William à retirer son tee-shirt. Je vois alors apparaître une énorme trace violacée rougeâtre sur ses côtes. Du sang en suinte par endroit. Je fronce les sourcils. Le coup que je lui ai porté n'aurait jamais pu causer une telle blessure, et encore moins aussi vite. Mike à l'air grave. Sa voix s'élève. Il semble gronder William qui ne dit rien et garde les yeux rivés sur le sol. Intrigué, je quitte les tatamis et les rejoins. Mike me foudroie de nouveau du regard avant de retourner à sa tache. Il applique des compresses sur la blessure, puis les recouvre d'adhésif. Dès qu'il a terminé, il se détourne de son ami pour me bousculer du bout des doigts.

- Toi, c'est pas parce que t'es un putain d'homophobe à la con que tu peux te permettre de te défouler comme ça sur les gens !

Je ne prends même pas la peine de défaire ses accusations. William remet son tee-shirt précautionneusement, comme s'il craignait la douleur que lui causerait un mouvement trop brusque. Je remarque alors qu'il est couvert d'autres contusions, sur le ventre, le dos, les bras... Même ses jambes ne semblent pas épargnées. Je fronce les sourcils. La majorité des ces ecchymoses ne peuvent absolument pas être causées par la boxe. William à le regard noir lorsqu'il voie que je le dévisage. Il demande à son ami de se calmer.

- Arrête, tu sais bien que c'est pas lui.

Mike hoche la tête, toujours en colère, mais il s'éloigne pour retrouver ses élèves. William range la trousse, et retourne vers son groupe. Il leur explique que le cours est terminé pour aujourd'hui, qu'ils peuvent revenir dès qu'ils le veulent, que les deux prochains cours seront toujours gratuits. Il commence alors à ranger les affaires autour de lui, puis il fourre des gants et ses chaussures de boxe dans un sac de sport et enfile des baskets. Il sort immédiatement. Je reste un moment debout, au milieu de la salle alors que les boxeurs la quittent au fur et à mesure. Mike me tape sur l'épaule alors qu'il s'apprête à sortir pour fermer le bâtiment.

- C'est l'heure. Rentre chez toi.

- Oui, j'y vais.

Je me dirige vers l'extérieur. Mais comme toujours, ma curiosité l'emporte et je fais demi-tour pour demander :

- Comment est-ce qu'il s'est blessé ?

Mike hausse les sourcils, écarquille les yeux.

- Ça t'intéresse maintenant ?

Je hausse les épaules, dédaigneux. En réalité, j'ai l'impression que ce que j'éprouve ressemble à de l'inquiétude. Comme si j'en avais quelque chose à faire de ce type... Mike semble le comprendre car il hoche la tête et déclare :

- Si tu veux vraiment savoir, demande à ton pote, dit-il avec l'air de n'avouer qu'une partie de la vérité.

Je fronce les sourcils, troublé. Mike me salue de la main et s'éloigne à pied. Il ne semble pas aussi antipathique qu'il voudrait le laisser croire. Mon regard se perd dans la nuit. Et je me mets à courir sur le chemin du retour.

Je me demande ce qu'il a voulu dire. Parlait-il de Jackson ? Les moqueries et les insultes, je supporte et je peux même les distribuer sans problème. En revanche la violence physique gratuite, ça, ça me met hors de moi, et je ne pourrais pas supporter ça. 

J'entre peut-être un peu trop brusquement dans la maison car mes parents se précipitent dans l'entrée en grognant. Je m'excuse, mens à propos d'un trop plein d'énergie accumulée à cause du cours. Ils ne s'attardent pas sur mon cas. Je file dans ma chambre.

Je me lave, me change. J'ai beau essayer de me concentrer sur les révisions de mes cours de la journée, l'idée que Jackson ait tabassé William me dégoûte. Je sais que si j'interviens, j'aurais l'air de m'intéresser à lui, mais je ne veux pas passer pour quelqu'un que je ne suis pas.

Only Say The Truth [BoyXBoy]Dove le storie prendono vita. Scoprilo ora