Chapitre 5

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Je roule tellement vite qu'il me faut à peine huit minutes pour atteindre la maison. Ashley est assise sur le muret devant le parking, son sac à dos et sa valise posés près d'elle. Je la rejoins. Elle me serre dans ses bras et m'embrasse sur la joue.

- T'as encore grandi, non ? Sourit-elle.

- Possible.

Je prends son sac et me dirige vers la porte de la maison, l'ouvre avec ma clé. Elle me suit.

- Toujours aussi chaleureux à ce que je vois ! grogne Ashley.

- Désolé, j'ai pas spécialement passée une bonne journée. Bref, tu m'expliques pourquoi tu ne pouvais pas entrer ? Tu n'as pas ta clé ?

- Je l'ai perdue. Et puis, quand j'ai appelé Papa, il m'a dit qu'il avait bien mieux à faire et que je n'avais qu'à retourner en Californie. 

- Ça ne me surprend pas, il en veut à la Terre entière ces derniers temps.

Elle hoche la tête d'un air dubitatif. Nous montons à l'étage. Je lui montre la deuxième chambre d'ami, celle dans laquelle Père ne va jamais, et y dépose son sac. Elle ne me fait pas remarquer que nous avons fait des travaux dans son ancienne chambre alors qu'elle avait demandé à ce qu'elle soit laissée intacte. Je ne lui dit pas que Papa couche avec au moins deux femmes différentes chaque semaine.

Nous allons à la cuisine et je lui sers un verre de soda allégé.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Demandé-je.

- J'ai une amie de Californie qui a déménagé ici avec son mari et sa fille. Je voulais m'assurer que tout c'était bien passé et qu'ils allaient bien.

- Et donc tu traverses tous le pays ? Pour une amie ?

- Une très bonne amie. Et elle m'a beaucoup aidée quand je suis arrivée à Los Angeles. Je sais qu'elle est venu ici à cause d'un problème avec son fils et son ex-mari, mais elle n'a pas voulu m'expliquer clairement ce qui se passait.

- Tous le monde à des problèmes avec ses parents, c'est notre lot commun.

Elle me foudroie du regard. Je vois bien qu'elle en sait plus et qu'elle ne me dit pas tout, mais tant pis. Je n'ai pas à me mêler des affaires de ces gens.

- Tu manges ici ce soir ?

- Non, je vais chez elle. Tu me déposeras ?

- Bien sur. Je vais au travail cet après-midi, avec tout ce que je fais, Leroy ne pourra pas me refuser de m'en aller plus tôt. Je reviens te chercher à quelle heure ?

- Je reste chez elle pour deux semaines, elle me déposera à la maison, ne t'embête pas avec ça. On mange ensemble ?

Je sors un plat industriel du réfrigérateur et le fourre dans le micro-ondes. Elle rigole et ne manque pas d'ajouter que la cuisine maison est bien meilleure. Je hausse les épaules. Je n'ai jamais été un grand cuisinier.

Nous mangeons en tête à tête, sans un mot, avant que je m'en aille au garage.

J'y travaille depuis déjà deux ans, à chaque fois que j'ai du temps libre. C'est très bien payé pour un travail où je ne me montre que lorsque j'en ai envie, et même si ça n'a aucun rapport avec mes études actuelles, la mécanique est intéressante. Le propriétaire de l'entreprise, Leroy, m'a appris tout ce que je sais, et il dit que les machines sont le reflet des âmes humaines, et que savoir réparer un moteur revenait à savoir sauver quelqu'un. Je n'ai jamais vraiment compris ce qu'il veut dire par là. Dans tous les cas, cet emploi me procure le salaire dont j'aurai besoin si j'ai un problème où si je devais partir de chez moi dans l'urgence.

Je passe l'après-midi dans les moteurs, à réparer plusieurs voitures qui nous ont été confiées. Ça me permet, pendant l'espace de quelques heures, de laisser mon cerveau de côté. Puis la sonnerie de mon téléphone me rappelle à l'ordre et me reconnecte au monde réel.

Je retrouve Ashley devant la maison. Elle grimpe dans la voiture avant même que je ne me sois arrêté.

- Mais tu pues l'essence ! grogne-t-elle.

- Je t'ai dis que j'étais au travail. Et je t'avais oublié, alors je n'ai pas eu le temps de me doucher.

Elle lève les yeux au ciel avant d'inscrire l'adresse de son amie dans le GPS du véhicule.

- Sinon, ta petite amie, ça va ? demande-t-elle.

- Laquelle ?

Elle écarquille les yeux et fronce les sourcils, exaspérée, tandis que je réfléchis du mieux que je peux à la dernière fille qu'elle a pu voir en ma compagnie.

- Sérieusement ? soupire-t-elle. La petite brune, mignonne et un peu timide. Des grands yeux bleus et un air fragile de poupée en porcelaine. Elle était dans ton lit la dernière fois que je suis venue !

- Ah oui, Sarah. Ou peut-être Chloé... Je l'ai larguée, elle voulait une relation durable.

Ashley soupire bruyamment et affiche un air encore plus désespéré. Après un long silence agaçant, je lâche sèchement :

- Quoi ?

- Tu n'es donc jamais tombé amoureux ? T'as jamais eu envie de protéger une fille coûte que coûte même si elle devait te détester pour ça ?

- Non. Je devrais ?

Elle hausse les épaules. La voix féminine du GPS nous indique que nous sommes arrivés. Je m'arrête devant une petite maison aux volets bordeaux et aux murs d'un gris-blanc particulier. L'ensemble donne une bâtisse assez marginale.

- On est arrivés.

Ashley ouvre la portière, s'apprête à descendre mais se tourne vers moi.

- Depuis quand t'es devenu si con ?

- Je sais pas, je suppose que ça a un rapport avec le fait que ma sœur soit partie pour aider des jeunes à l'autre bout du pays alors qu'il y en avait un chez elle qui avait besoin d'elle ?

- Alors toi aussi tu vas tout me remettre sur le dos ?

Elle descend de la voiture. Je sais bien que je n'avais pas le droit de dire ça. Elle en voit déjà de toutes les couleurs avec nos parents. Surtout avec Père.

- Remets-toi en question, Aydan. A ton avis, pourquoi tu n'as jamais de petite amie sur la durée, hein ?

- Parce que je romps toujours au bout d'un mois.

- Non. Parce que t'es un abruti complet et un connard. Une fille amoureuse s'accroche. Même si son mec lui fait toutes les crasses possibles et imaginables, une fille ferait tout ce qu'elle peut pour y résister jusqu'à se faire du mal. Personne n'a jamais fait cet effort pour toi parce que tu regardes trop l'apparence, et tu oublies que les sentiments existent.

Je baisse les yeux. Ashley claque la portière, traverse le jardin et toque à la porte. Une femme brune avec l'air d'avoir des origines hispaniques lui ouvre la porte et la serre dans ses bras. Elle à l'air d'être gentille. Elle me fait un signe amical de la main. Je souris vaguement, par politesse, pour ne pas froisser encore plus Ashley qui ne se retourne pas. Elles entrent ensembles dans la maison et la porte se referme derrière elles.

Je jette un coup d'œil à la boite aux lettres. Elle s'appelle « Maria F. Jacoby ». Pour qu'Ashley revienne ici, elle doit être une personne fantastique, et avoir de sacrées difficultés.

Only Say The Truth [BoyXBoy]Where stories live. Discover now