Chapitre 32

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- C'est le dernier entraînement à Istra, les gars ! Demain, c'est sur la pelouse du stade qu'on le fera ! Crie Didier en passant devant le vestiaire des gars. Allez, hop ! Tout le monde à l'entraînement ! Lesly, tu viens arbitrer avec moi !

Je ne suis pas arbitre professionnelle, mais je sais quand même me débrouiller avec les règles du football. Je prends un sifflet et suis l'entraîneur des bleus jusqu'à la pelouse du stade au nom imprononçable et, avec lui, j'installe les ateliers pour les gars.

Justement, ils sortent des vestiaires au compte goûte. Il fait nuageux mais assez beau. Lucie est restée à l'hôtel : elle devait terminer quelques papiers de grande importance.

- Pour vous échauffer un peu les gars faites deux/trois tours de terrain puis vous ferez un toro quelques minutes, explique Didier alors qu'ils commencent à courir.

Les derniers retardataires montrent le bout de leur nez et rejoignent leurs coéquipiers. Quand ils pensent que leurs muscles sont assez échauffés, ils s'arrêtent et insistent un peu plus sur les chevilles et, mine de rien, la nuque et les bras.

Les vingt-trois joueurs se séparent en deux – un groupe de onze et un de douze – et commencent tranquillement leur toro. Le groupe de Pavard et Sam m'invitent à participer au leur. Je les rejoins pour une dizaine de minutes, mais c'est important qu'ils s'entraînent à fond pour le match décisif d'après-demain. Quand on a fini le toro, les garçons vont se poser cinq minutes pour boire un coup avant le début des ateliers.

Didier, qui n'a pas l'air épuisé par la chaleur qu'il fait, continue de marcher sur le terrain et là, l'arrosage automatique se met en route. Il a un souci avec les horaires encore. Il court se protéger à côté de Paul et moi et j'explose de rire avec Nabil. Le coach me pousse alors sur la pelouse en rigolant et je sors mouillée aussi vite que j'y suis entrée. Comme Nabil continue de rigoler, je vais lui faire un gros câlin bien mouillé.

- C'est bon, on peut y retourner, maintenant, dit Didier.

L'entraîneur des bleus retourne sur la pelouse, mais elle en a décidé autrement puisque l'arrosage se rallume sans raison et le coach court encore vers les bancs pendant que je rigole à nouveau avec Nabil. Il n'aura pas réussi l'exploit de s'accorder avec les horaires de l'arrosage automatique à Istra.

C'est ce genre de moments-là qui vont me manquer. Quand je vais rentrer chez moi, je vais me sentir bien seule.

*

Les garçons font tout un tas d'exercices sur la pelouse du stade. Moi, pendant ce temps, je me balade dans les tribunes. J'ai du mal à m'imaginer que demain, tout sera plein et que les Français seront peut-être les nouveaux champions du monde. Vingt ans après. Ça aurait quand même un petit quelque chose de magique. Parce que, en soit, le collage qui passe sur les réseaux comme quoi le Real a gagné la ligue des champions (même si ça fait trois fois consécutives), que l'Israël a gagné l'eurovision et la Croatie a été en demi-finale de la coupe du monde en 1998 comme en 2018 est assez troublant. À croire qu'autant de coïncidence puissent exister. C'est de la magie, je pense.

De mes tribunes, je regarde les garçons jouer. Depuis l'entraînement d'hier après-midi, voire la soirée au coin du feu d'avant-hier soir, je suis dans un mood un peu embêtant. En fait, c'est de la nostalgie. J'ai pas envie de partir, même heureuse d'être championne du monde, parce que, mine de rien, j'ai les meilleurs souvenirs de ma vie, ici, en Russie, avec les plus belles personnes qu'on puisse rêver de rencontrer. Du coup, ça me rend triste que la fin de tout ce chapitre de ma vie se déroule demain. J'ai aucune idée d'où se trouve Lucie, mais elle ne m'aurait pas été d'une grande aide parce qu'elle est pire que moi.

Never Stop Dreaming ~ Equipe de FranceWhere stories live. Discover now